Article publié dans Les Dossiers de l'allaitement n° 33, LLL France, 1997.
L'allaitement est le moyen normal, conçu par la nature, de nourrir un enfant. Or, il y a quelques années, la grande presse et jusqu'aux mouvements écologiques ont répandu des propos alarmants sur la pollution du lait maternel. « Si le lait maternel était un médicament, il faudrait le retirer de la vente », titrait même une publication de Greenpeace. Et ce en dépit du fait que toutes les études effectuées sur le sujet montraient que, même avec un taux de polluants relativement élevé, le lait maternel induisait un meilleur développement et une morbidité plus basse chez les enfants allaités. Il faut se souvenir que, même dans les meilleures conditions d'hygiène prévalant dans nos pays, le taux des pathologies digestives est 5 fois plus élevé chez les enfants nourris au lait industriel ; lorsque ces conditions d'hygiène sont moins satisfaisantes, ce qui se voit même dans nos pays chez les personnes de bas niveau socio-économique, c'est à un risque 10 fois plus élevé que sera confronté le bébé nourri au lait industriel.
De plus, divers rapports, publiés récemment dans les pays occidentaux (Suède, Allemagne, Canada...), font état d'une baisse importante des polluants retrouvés dans le lait humain. Un article émanant du comité de toxicologie de Grande-Bretagne annonçait une baisse de 30 % du taux de dioxine du lait humain, tandis que des recherches effectuées en Allemagne montraient une baisse de 50 % des taux de dioxine et de PCBs. Cela est dû aux mesures que certains pays ont prises pour interdire l'emploi de produits particulièrement polluants.
Les fabricants de lait industriel se sont ingéniés à monter en épingle tous les faits leur permettant de proclamer que le lait maternel n'était pas « sain », alors que leurs produits étaient soigneusement contrôlés. Ils ont passé sous silence le fait que le lait industriel est lui aussi pollué. Ce n'est que contraints et forcés qu'ils acceptent de reconnaître publiquement un problème de contamination par des salmonelles ou autres germes pathogènes. Et ils font tout pour minimiser la médiatisation des questions que l'on commence à se poser sur les phyto-œstrogènes ou les phtalates.
L'industrie du lait industriel est polluante, et produit nombre de déchets. En Norvège, pays dans lequel 98 % des femmes allaitent, l'association de soutien aux mères Ammehjelpen a calculé que, si tous les bébés norvégiens étaient nourris au lait industriel pendant six mois, cela représenterait 260 tonnes supplémentaires de déchets solides (une moyenne de 4,3 kg par enfant). Elle a aussi calculé qu'allaiter un enfant pendant les six premiers mois permettait aux parents d'économiser environ 3900 francs, et ce uniquement sur l'achat du lait industriel, du matériel de biberonnerie et des produits nécessaires pour le nettoyer et le stériliser. Le comité norvégien de nutrition a calculé que, dans les années 1990, les mères norvégiennes produisaient plus de 8,2 millions de litres de lait par an, un lait qui ne coûte rien aux familles. Pour nourrir au lait industriel un million de bébés, 140 millions de tonnes de lait industriel seront nécessaires. Il en résultera plus de 23 000 tonnes de déchets métalliques provenant des emballages, qui ne seront généralement pas recyclés. Il faut y ajouter la pollution induite par la fabrication, puis l'élimination des biberons, tétines et autres ustensiles de biberonnerie.
Les mouvements écologiques ont des mots-clés pour définir les produits qui nous mettent en harmonie avec la nature. Ces mots conviennent tout à fait à l'allaitement, qui utilise une ressource naturelle sans aucune nuisance pour l'environnement. Le lait maternel est :
- vivant : c'est un véritable « sang blanc », contenant des cellules vivantes et de nombreuses molécules biologiquement actives. Il est autant un aliment qu'un vaccin naturel. Le lait industriel est un produit mort. Après tous les traitements qu'il a subis avant de se retrouver dans son emballage, les seuls éléments qui y soient encore vivants sont les éventuels germes pathogènes qui ont pu le contaminer. Une étude effectuée en Hollande a retrouvé des bactéries pathogènes dans 52,5 % des échantillons de lait industriel testés, provenant de pays aussi divers que la Belgique, le Brésil, le Japon ou l'Uruguay (Mutyens et al) ;
- sain : les germes s'y multiplient beaucoup moins rapidement que dans le lait industriel. Si le lait humain est pollué, les laits industriels le sont aussi, et souvent davantage que le lait humain, car ils sont un produit se situant en fin de chaîne alimentaire. Une étude effectuée au Canada a retrouvé dans des échantillons de lait industriel des taux d'aluminium 40 fois plus élevés que ceux retrouvés dans le lait humain. L'aluminium est un toxique pour le système nerveux, à effet cumulatif. Une étude américaine a montré que les bébés nourris au lait industriel absorbaient 9 fois plus de plomb que la dose considérée comme étant la limite supérieure acceptable ;
- naturel : que peut-il y avoir de plus naturel que le lait maternel ? Produit en quantité nécessaire et suffisante, passant directement du producteur au consommateur, s'adaptant à ses besoins et à son environnement, comment peut-il être comparé au lait industriel, coûteux et polluant à tous les stades de sa fabrication, ayant toujours le même goût et la même composition ? Le lait maternel n'est pas la seule ressource de grande valeur gaspillée lorsqu'un enfant est nourri au lait industriel. Pour préparer dans de bonnes conditions les biberons d'un bébé âgé d'un mois, il faut quotidiennement 1 litre d'eau de haute qualité, ainsi que l'eau nécessaire pour nettoyer, rincer et stériliser les biberons, le combustible nécessaire à la stérilisation par ébullition ou les produits indispensables à la stérilisation à froid... Le coût élevé d'une alimentation correcte au lait industriel peut être lourd à assumer même pour certaines familles de notre pays. Il sera insupportable pour bon nombre de familles des pays en voie de développement, lorsque les ressources naturelles en eau et combustible ne seront pas carrément indisponibles.
Le lait humain est l'aliment normal de nos enfants. L'allaitement représente aussi un moyen de préserver les ressources de notre planète, et de diminuer le taux de pollution. Une mère qui allaite accomplit donc un acte d'une grande importance, non seulement pour son bébé et pour elle, mais aussi pour sa famille, sa société et notre planète. Un choix qui mérite d'être reconnu à sa juste valeur, et soutenu par tous les moyens disponibles.
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Bibliographie :
· E Helsing. Breastfeeding is Environment- and Budget Friendly. New edition Gyldendal Norwegian Publishing Company, Oslo, 1995. Translated from the original by Rachel Myr.
· Good news on breastfeeding show the effectiveness of environmental campaign. Women's Environmental Network and Baby Milk Action.
· Alison Linnecar, GIFA. Breastfeeding - Ecology With Love ; 7/1997.
· Mutyens, H.L. et al. Quality of Powdered Substitutes for Breast milk with regard to the Enterobacteriaceae. Journal of clinical microbiology, 26 (4), 1988.
· Nwanko, M.U. et al. Bacterial Growth in Expressed Breast Milk. Journal of Tropical Pediatrics, 8, 92-95, 1988.
· World Health Organisation, Environmental Health Series No. 29. Assessment of health risks in infants associated with exposure to PCBs, PCDD's and PCDFs in Breast Milk. Copenhagen, 1988.
· Palmer, Gabrielle. The Politics of Breastfeeding. Pandora Press, 1988.
· Jelliffe DB, and Jelliffe EF. Human Milk in the Modern World. Oxford University Press, 1989.
· JE Rhode. Mothers, Milk and the Indonesian Economy, a major national resource. Journal of Tropical Pediatrics, 28, (4), 1982.
" Une mère qui allaite accomplit donc un acte d'une grande importance........................ Un choix qui mérite d'être reconnu à sa juste valeur et soutenu par tous les moyens disponible."
Alors que cela fais plus d'un mois et demi que j'allaite mon fils qui est aussi mon premier enfant, je me sens épuisée et parfois un peu seule alors que je vis avec mon compagnon.. Dans un moment comme à cet instant où je me sens déprimée, où j'aurais envie d'arrêter d'allaiter et pour tout un tas de raisons alors que l'allaitement se passe bien, je viens ici, lis des rubriques et cela me fait du bien et me soutient d'une certaine manière.. La reconnaissance que "j'attends d'entendre", je la lis et même si cette phrase recopiée plus haut n'est pas exclusivement adressée à moi, je me réjouis de la lire car cela renforce mon idée d'avoir vraiment fais le bon choix, d'allaiter, ce qui me tenait très à cœur déjà bien avant d'être enceinte et ainsi tenir et ne pas craquer alors que tout et tous autour de moi me laisserai facilement stopper cette expérience gratifiante pour mon fils et moi même..Merci donc de part ces petites phrases qui fond du bien à lire, de remonter le moral à des mamans comme moi qui quelque fois lâcherait tout pensant que l'allaitement est la cause de leurs déprimes passagères ce qui évidemment n'est absolument pas le cas.. Bravo à toutes les femmes qui quelque soit la durée de l'allaitement on fait ce choix!! Et bravo à moi même car il faut penser à se le dire aussi!!
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