Ndlr à propos du point 5 : La notion de "confusion sein-tétine" a évolué dans le temps. On pense aujourd'hui qu'elle englobe en fait plusieurs problématiques distinctes : elle couvre à la fois les perturbations de la succion liées aux différences de débit, et celles liées aux expériences sensorielles buccales du bébé différentes selon l'accessoire utilisé (biberon, sucette, sonde, seringue, bout de sein).
Si, après une autre expérience de succion, la tétée devient inconfortable ou douloureuse, et/ou si le bébé devient agité au sein, prenez rapidement contact avec une personne formée en allaitement pour observer la tétée et trouver des solutions aux difficultés rencontrées.
Tous les professionnels de santé disent soutenir l'allaitement maternel. Mais beaucoup le soutiennent uniquement lorsque cela se passe bien et encore, pas toujours. Dès que l'allaitement maternel, ou tout autre aspect de la vie d'une jeune mère, ne se déroule pas parfaitement, beaucoup trop d'entre eux préconisent le sevrage ou les compléments. Voici une liste partielle d'indicateurs vous permettant de savoir si un professionnel de santé soutient ou non l'allaitement maternel, ou le soutient au moins suffisamment pour qu'en cas de problème, il/elle fera les efforts nécessaires afin de vous aider à continuer l'allaitement.
Un professionnel de santé ne soutient pas l'allaitement si :
1. Il/elle vous donne des échantillons de préparations pour nourrissons ou des documents provenant des fabricants de substituts du lait maternel lorsque vous êtes enceinte ou après la naissance du bébé. Ces échantillons ou cette documentation sont des incitatifs à utiliser le produit en question, leur distribution est donc du marketing. Il n'y a aucune preuve qu'une marque soit meilleure ou pire qu'une autre pour tout bébé normal. Toute information ou vidéo accompagnant les échantillons ne sont ni plus ni moins que des messages subtils (parfois pas si subtils que ça) pour dénigrer l'allaitement maternel et glorifier les substituts. Si vous ne le croyez pas, demandez-vous pourquoi les fabricants de préparations pour nourrissons déploient avec acharnement des stratégies agressives pour amener les médecins ou les hôpitaux à distribuer leurs documentations et échantillons et non ceux des autres fabricants ? Et pourquoi les professionnels de la santé ne font-ils pas la promotion de l'allaitement maternel ?
2. Il/elle vous dit que l'allaitement maternel et l’alimentation artificielle sont essentiellement équivalents. La plupart des bébés nourris au biberon se développent harmonieusement et en bonne santé, et tous les bébés nourris au sein ne sont pas exempts de troubles de santé. Mais cela ne signifie pas que l'allaitement maternel et l’alimentation artificielle sont à peu près équivalents. Les préparations pour nourrissons ne sont qu'une grossière approximation par rapport aux connaissances que nous avions sur le lait maternel il y a plusieurs années déjà, ce qui ne représente encore qu'une grossière approximation de ce que nous découvrons chaque jour et qui nous émerveille toujours davantage. Par exemple, nous savons depuis longtemps que les acides gras essentiels DHA et ARA sont importants pour le développement du cerveau du bébé, mais il a fallu plusieurs années avant qu’on les ajoute aux laits artificiels. Et malgré leur présence dans les formules lactées, il n’est pas certain que l’on obtient l’effet désiré, puisque l’absorption du lait artificiel est différente de celle du lait maternel. Les différences entre le lait maternel et les laits artificiels ont d'importantes conséquences sur la santé. Certains éléments du lait maternel sont absents des préparations pour nourrissons bien que nous connaissions leur importance pour le bébé depuis plusieurs années déjà. Par exemple, les anticorps et les cellules protégeant le bébé des infections, et les facteurs de croissance favorisant la maturation du système immunitaire, du cerveau et des autres organes. De plus, l’allaitement maternel n'est pas la même chose que de nourrir au biberon, c'est une relation totalement différente. Si vous n'avez pas pu allaiter, c'est malheureux (bien que la plupart du temps, les problèmes auraient pu être évités), mais déclarer que cela est sans conséquence, c'est de la condescendance, et c’est parfaitement faux. Un bébé ne doit pas obligatoirement être allaité pour grandir heureux, en bonne santé et confiant, mais c'est un avantage.
3. Il/elle vous dit que la préparation pour nourrissons X est la meilleure. Cela signifie généralement qu'il/elle est trop influencé(e) par le représentant de cette marque particulière. Cela peut aussi signifier que ses enfants ont toléré cette marque-là plutôt qu'une autre. Cela signifie qu'il/elle a des préjugés non fondés.
4. Il/elle vous dit qu'il n'est pas nécessaire de mettre le bébé au sein juste après la naissance, car vous êtes (serez) fatiguée et que de toute façon le bébé est souvent peu intéressé. Ce n'est pas obligatoire, mais c'est très utile (voir L’allaitement : partir du bon pied et L’importance du contact peau-à-peau). Les bébés peuvent téter alors que leur mère est allongée ou qu'elle dort, bien que la plupart des mères n'ont aucunement envie de dormir à un moment pareil. Les bébés ne se montrent pas toujours intéressés à téter immédiatement, mais ce n'est pas une raison pour ne pas leur en donner l’occasion. La plupart des bébés tètent dans l'heure ou les deux heures qui suivent la naissance, et c'est le moment le plus propice à un bon départ, mais ils ne le peuvent pas s'ils sont séparés de leur mère. Si l’on vous donne l'impression que la pesée, les gouttes pour les yeux et l'injection de vitamine K sont prioritaires par rapport à la mise en route de l'allaitement, vous pouvez vous questionner sur l’engagement des uns et des autres vis-à-vis de l'allaitement.
5. Il/elle vous dit que la confusion sein/tétine n'existe pas et que vous devriez commencer à donner des biberons le plus tôt possible à votre bébé pour vous assurer que celui-ci acceptera la tétine. Pourquoi devriez-vous commencer tôt les biberons s'il n'existe pas de confusion sein/tétine ? Nier l'évidence de l'existence d'un tel problème, c’est mettre la charrue avant les boeufs. C'est la tétine, dont aucun mammifère autre que l'homme ne s'est jamais servi, et dont l'homme lui-même n'a fait un usage courant que depuis la fin du XIXe siècle, qui doit démontrer son innocuité. Mais cette innocuité vis-à-vis de l'allaitement n'a pas été prouvée. Les professionnels de santé qui affirment que les tétines sont anodines, regardent le monde comme si l'alimentation au biberon, et non l’allaitement maternel, était la méthode physiologique normale de nourrir les bébés. Le simple fait que pas tous les bébés, ni peut-être même la majorité des bébés à qui l’on donne des tétines, ont eu de problèmes ensuite pour téter au sein, n'implique pas que leur usage précoce ne puisse causer des dommages pour certains bébés. C'est souvent une combinaison de facteurs, dont l'un peut être l'utilisation d'une tétine, qui peut donner des problèmes.
6. Il/elle vous dit que vous devriez arrêter l'allaitement parce que vous êtes malade ou que votre bébé est malade, ou parce que vous allez prendre des médicaments ou bien encore subir des examens médicaux. Il y a de rares situations où l'allaitement ne peut être poursuivi, mais souvent les professionnels de santé ont tort de supposer que la mère ne peut pas continuer. Le professionnel de santé qui soutient l'allaitement maternel fera l'effort de trouver un moyen pour éviter l'interruption de l'allaitement (l'information des pages blanches du livre bleu Compendium des spécialités pharmaceutiques et du Physician’s Desk Reference – Ndlr : en France, le Vidal – n'est pas une bonne référence : chaque médicament y est contre-indiqué parce que les laboratoires pharmaceutiques se sentent plus concernés par le risque de poursuites que par l'intérêt des mères et des bébés). Lorsqu'une mère doit prendre un médicament, le médecin essaiera de prescrire un traitement compatible avec l'allaitement (en fait, très peu de traitements imposent l'arrêt de l'allaitement). Il est extrêmement rare qu'il n'existe qu'un seul traitement pour un type de problème. Si le premier choix du médecin est un traitement médical demandant l'interruption de l'allaitement, vous êtes en droit de penser qu'il/elle ne se sent pas réellement concerné(e) par l'importance de l'allaitement.
7. Il/elle est étonné(e) d'apprendre que vous allaitez toujours votre bébé de 6 mois. Beaucoup de professionnels de santé croient que les bébés devraient continuer à recevoir des préparations pour nourrissons au moins jusqu'à 9 mois et même 1 an (et maintenant que les fabricants de laits artificiels mettent sur le marché des préparations pour bambins jusqu’à 18 mois et même 3 ans, bientôt certains professionnels de la santé recommanderont d’en donner jusqu’à 3 ans), mais en même temps semblent croire que le lait maternel et l'allaitement ne sont pas nécessaires et même nuisibles au-delà de 6 mois. Pourquoi l'imitation serait-elle meilleure que l'original ? Ne devriez-vous pas considérer ce que ce raisonnement implique ? Sur l'ensemble de la planète, l'allaitement jusqu'à 2 ou 3 ans est chose courante et normale, quoique, en raison du marketing des laits artificiels, cela le devient de moins en moins.
8. Il/elle vous dit que le lait maternel n'a plus de valeur nutritionnelle pour le bébé au-delà de 6 mois. Même si c'était vrai, il y a toujours intérêt à allaiter parce que l'allaitement est une interaction unique entre deux personnes qui s'aiment, même sans lait. Mais ce n'est pas vrai. Le lait maternel reste du lait contenant des lipides, protéines, calories, vitamines et le reste. Et les anticorps et autres éléments qui protègent le bébé contre les infections sont toujours là, certains même en plus grande quantité que lorsque le bébé était plus jeune. Quiconque vous dit une chose pareille ne connait rien à l’allaitement.
9. Il/elle vous dit que vous ne devriez jamais permettre à votre bébé de s'endormir au sein. Pourquoi pas ? C'est bien si un bébé peut aussi s'endormir sans téter, mais un des avantages de l'allaitement est justement d'avoir un moyen commode pour endormir votre enfant fatigué. Toutes les mères du monde, depuis les premiers mammifères, ont fait de même. Un des grands plaisirs d’être parent est d'avoir un enfant endormi dans les bras, et de ressentir la quiétude qui le submerge avec le sommeil. C'est l'un des plaisirs de l'allaitement, pour la mère et probablement pour le bébé, lorsque celui-ci s'endort au sein.
10. Il/elle vous dit que vous ne devriez pas rester à l'hôpital pour nourrir votre enfant malade parce qu'il est important que vous vous reposiez chez vous. C'est important que vous vous reposiez, et l'hôpital qui soutient l'allaitement maternel s'arrangera pour que vous puissiez vous y reposer tout en allaitant votre bébé. Les bébés malades n'ont pas moins besoin d'être allaités que les bébés en bonne santé, ils en ont plus besoin.
11. Il/elle n’essaie pas de vous trouver de l’aide si vous avez des problèmes avec l’allaitement. La plupart des problèmes peuvent être évités ou surmontés, et la plupart du temps, la solution à un problème d’allaitement n’est pas de donner du lait artificiel. Malheureusement, beaucoup de professionnels de santé, particulièrement les médecins, et encore plus particulièrement les pédiatres, ne savent pas comment aider. Cependant, l’aide existe. Insistez pour qu’on vous en donne. « Vous n’avez pas besoin d’allaiter pour être une bonne mère » est vrai, mais ce n’est pas la réponse à un problème d’allaitement.
Traduction du feuillet « How to know a health professional is not supportive of breastfeeding »
Révision janvier 2005
par Jack Newman, MD, FRCPC © 2005
Version française, mai 2005, par Stéphanie Dupras, IBCLC, RLC
Peut être copié et diffusé sans autre autorisation, à condition qu’il ne soit utilisé dans aucun contexte où le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel de l’OMS est violé.
Merci beaucoup pour cet article.
Je co-allaite mes 2 enfants (3 ans et demi et 5 mois) et rien n'est plus précieux que le lait de maman !!! ?
Nous sommes partis au Canada il y a quelques mois, mais lorsque nous étions en France quelle galère pour trouver un médecin pro-allaitement !
Famille-alternative.blog
Ah merci pour ce feuillet!
Petite histoire perso :
Lorsque j ai emmené mon fils voir le médecin pour visite de ses deux mois j ai eu le droit aux questions sur son sommeil. "Il s endort au sein et se rendort la nuit au sein et dort près de vous... Attention il faut faire autrement sinon vous allez devenir un sein-doudou.". Il n en a fallut pas plus pour me mettre le doute sur mon allaitement et ma relation avec mon bébé. Heureusement l animatrice de la LLL m a écouté et soutenu. Merci
Et aujourd'hui mon fils a 4 mois passé et s endort au sein le soir comme certaines siestes et j adore ces moments rien qu à nous. Et merci aux hormones sécrétées lors de l allaitement pour m aider à dormir aussi.
Alors à toutes les mamans qui doutent, surtout face aux médecins et autres professionnels représentant le "savoir", faites vous confiance et en cas de besoin la Leche League est là pour vous soutenir avec bienveillance.
Marie, j'ai envie de te dire , ton enfant ne te prend pas pour son doudou, c'est le doudou qui se prend pour une maman..et la maman existait avant le doudou ! Alors c'est toi qui as raison ⯑
Je suis la maman d'un petit garçon de 7 mois que j'allaite. Merci pour le soutien que vous nous apportez.
Les professionnels de santé me font chaque fois douter du bien fondé de mon allaitement. À les entendre je fais tout de travers. " Il tète trop, me prend pour son doudou, ne fait pas ses nuits à cause de ça, aura des carences,etc ..."
J'ai bien l'intention de n'écouter que mon instinct, hors de question que des médecins me fassent passer à côté de ses doux moment avec mon petit!
Alors pour être tranquille je leurs dis ce qu'ils veulent entendre, et ne pose plus de questions ....
Pour poser une question, n'utilisez pas l'espace "Commentaires" ci-dessous, envoyez un mail à la boîte contact. Merci