À lire la littérature parlant d'allaitement, il semblerait qu'il y ait un âge impératif pour le sevrage, au-delà duquel continuer à allaiter serait au mieux inutile, au pire nuisible à l'enfant.
Les raisons invoquées pour cette limitation sont soit nutritionnelles (au-delà de tel âge, le lait maternel deviendrait moins nourrissant et/ou insuffisant) soit psychologiques (risque de fusion pathologique empêchant l'enfant de grandir).
La limite varie selon les auteurs (3 mois pour les uns, 6 mois pour les autres, 9 mois, voire 12 mois pour les plus audacieux...), mais il semble toutefois qu'il y ait un âge à ne dépasser sous aucun prétexte.
Et pourtant... On sait bien qu'autrefois, les enfants étaient allaités plus longtemps. Dans beaucoup de cultures, ils pouvaient même continuer à avoir accès au sein pendant de nombreuses années : jusqu'à 12 ans, par exemple, dans les civilisations précolombiennes (1) et chez les Esquimaux.
Encore à l'heure actuelle, l'âge moyen du sevrage varie énormément selon les endroits et les cultures. En Afrique, en Asie, en Amérique latine, même si malheureusement la fréquence et la durée de l'allaitement diminuent dramatiquement, il est toujours courant de voir des bambins (2) de un ou deux ans allaités. Même en Occident, des pays comme l'Australie ou la Suède se distinguent par une durée moyenne d'allaitement dépassant de loin les trois mois qui sont la norme chez nous. Dans l’étude Epifane, qui avait inclus 3 368 couples mère-enfant avec des enfants nés entre le 16 janvier et le 5 avril 2012 dans 136 maternités en France, on peut lire que “parmi les enfants allaités à la naissance (74 %), la moitié l’étaient encore à 15 semaines, la médiane de l’allaitement exclusif exclusif ou prédominant étant, quant à elle, estimée à 3 semaines et demie.” ou “À 3 mois, 39 % des enfants étaient encore allaités : 10 % de façon exclusive, 11 % de façon prédominante et 18 % recevant aussi des préparations pour nourrissons (PN) du commerce. À 6 mois, seul un enfant sur quatre était encore allaité et plus de la moitié d'entre eux consommaient des PN en complément. À un an, seuls 9 % des enfants recevaient encore du lait maternel.”
Pourquoi continuer ?
La réponse la plus simple à apporter à cette question tient dans une autre question : pourquoi arrêter ? Et il est vrai que si l'on parle avec des mères allaitant ou ayant allaité des bambins, beaucoup disent que si elles ont continué à allaiter, c'est parce qu'elles ne voyaient pas vraiment de raison d'arrêter, et que cela s'est fait petit à petit, jour après jour, sans plan préétabli. Beaucoup même, la première fois qu'elles avaient vu un bambin téter (par exemple lors d'une réunion de La Leche League), avaient été choquées et s'étaient dit que jamais elles ne feraient une chose pareille...
Au-delà de ce simple bon sens (“je continue parce que ni l'un ni l'autre nous n'avons envie d'arrêter”), il est quand même bon d'avoir quelques informations pour répondre aux interrogations de l'entourage et, parfois, à ses propres doutes.
Pourquoi poursuivre l’allaitement ? Du côté de l’enfant
En fait, la recherche médicale, quand elle s'intéresse au sujet, montre qu'il y a vraiment un intérêt nutritionnel à allaiter au-delà d'un an.
Contrairement à ce qu'on lit trop souvent, le lait maternel continue tout au long de l'allaitement à être pour l'enfant un aliment de premier choix, avec notamment une augmentation du taux de protéines, de lipides et de calories avec le temps (3). C’est pourquoi le lait maternel reste “nourrissant” quelle que soit la durée de l’allaitement, fournissant en quantité adéquate les macronutriments (protéines, lipides), ainsi que certains micronutriments (vitamines). Par exemple, au cours de la deuxième année de vie (12-23 mois), 448 ml de lait maternel fournissent 29 % des besoins énergétiques, 43 % des besoins en protéines, 36 % des besoins en calcium, 75 % des besoins en vitamine A, 76 % des besoins en folates (vitamine B9), 94 % des besoins en vitamine B12, 60 % des besoins en vitamine C.
Une étude de 1999 (4) a estimé le niveau de production de lait maternel, 15 mois après la naissance, à 208 ml en moyenne par sein, soit une quantité encore significative, malgré le fait que la taille des seins avait retrouvé son niveau préconceptionnel.
Les résultats d’une étude récente suggèrent par ailleurs que, contrairement à ce qu’on a longtemps pensé, le lait humain contient un taux de plus en plus élevé de certains composants immunitaires, notamment les immunoglobulines de type A, le lysozyme, la lactoferrine, susceptibles de protéger l’enfant au fur et à mesure que celui-ci se poursuit - qui devrait donc être activement encouragé - malgré le fait que l’enfant grandit et tète moins (5).
Par ailleurs, l’apport calorique fourni par le lait maternel est plus important que celui de la majorité des aliments qu’un bambin reçoit.
Du côté des minéraux, une étude portant sur 19 mères qui ont fourni des échantillons de lait maternel entre les 11 mois et les 17 mois de leur bébé, a montré que, sur cette période, les taux de fer et de potassium restaient stables, tandis que ceux de calcium et de zinc diminuaient (6). Le lait maternel ne suffit donc plus à fournir certains minéraux, et notamment le fer, le zinc et le calcium devront être apportés par la diversification alimentaire (7).
Depuis que dans les recherches médicales sur les effets de l'allaitement, on s'intéresse à sa durée, on s'aperçoit que ses effets sont "dose-dépendants", c'est-à-dire en corrélation avec la durée d’allaitement. Pour certaines affections, la protection à long terme est d'autant plus importante que l'allaitement a duré longtemps. Pour d'autres, la protection n'apparaît de manière statistiquement significative que s'il a duré un minimum de temps.
Voici quelques exemples, parmi beaucoup d'autres de ressources complémentaires sur le sujet :
Vécu de mères qui ont allaité au long cours (DA 98)
Vécu maternel d'un allaitement long (DA 99)
Le point sur l'allaitement long (DA 101)
Analyse du concept d’allaitement long (DA 116)
Valeur de l’allaitement après 1 an (DA 156).
Une étude de 1997 (8) a comparé 177 enfants atteints de troubles du langage avec 925 enfants non atteints. Elle a montré que le risque de troubles du langage était significativement plus bas chez les enfants qui avaient été allaités pendant au moins 9 mois. L’effet bénéfique persistait après avoir pris en compte le biais apporté par le niveau d’éducation de la mère.
Concernant le risque de malocclusion, la méta-analyse la plus récente montre qu’un allaitement prolongé plus de six mois permet de diminuer le risque de certaines malpositions dentaires, et que l’effet est encore plus marqué pour un allaitement de plus de douze mois (9).
Pourquoi poursuivre l’allaitement ? Du côté de la mère
Allaiter plus longtemps a aussi un impact sur la santé de la mère. Ainsi, allaiter longtemps diminue le risque de maladies cardiovasculaires plus tard dans la vie (après la ménopause) telles que l’hypertension artérielle (10). Allaiter plus de six mois diminuait de 47 % le risque de développer un diabète dans une cohorte de plus de 1 200 femmes états-uniennes qui ont été suivies pendant 30 ans (11).
Plus on allaite longtemps, plus l’impact sur la diminution du risque de cancer du sein, de cancer de l’utérus, ou de maladies chroniques comme l’endométriose (12), la sclérose en plaques (13)… est visible.
En particulier, la méta-analyse publiée en 2002 dans la revue Lancet, qui a porté sur presque 150 000 femmes dans 30 pays du monde, conclut à une diminution du risque de cancer du sein de 4,3 % par année d’allaitement (et 7 % par naissance) (14).
Pour ce qui est du cancer de l'utérus, une étude de 1995 a montré que les femmes qui avaient allaité plus de 72 mois avaient diminué leur risque de 75 %, comparé à celles qui avaient allaité de 1 à 22 mois. Allaiter plus de douze mois par grossesse diminuait le risque de plus de moitié, comparé à un allaitement de zéro à trois mois (15).
Et au niveau psycho-affectif ?
Il suffit d'écouter les mères de bambins allaités (et quand ils parlent, d'écouter les bambins eux-mêmes !) pour connaître ces bénéfices.
Il est tout d'abord évident que le besoin de succion persiste bien au-delà de la première année. Il suffit de voir le nombre d'enfants suçant leur pouce, une sucette, un "doudou", ou prenant un biberon, et ce bien au-delà de l'âge auquel les enfants se sèvrent généralement du sein ! Pourquoi cette indulgence amusée pour l'enfant qui suçote sa couverture, et ce regard scandalisé pour celui qui vient se réconforter au sein de sa mère ? Evidemment, le premier est considéré comme plus "autonome" puisqu'il se débrouille tout seul, se satisfaisant d'un objet plutôt que d'un contact très proche avec un être humain.
Il y a quand même d’autres voix qui se font entendre, par exemple le psychologue Sylvain Missonnier qui, en 2003, déclarait sur le plateau de l’émission Les Maternelles : "Nous les psys en particulier, il faut qu’on fasse un mea culpa. On a été pendant très longtemps en train de tirer à vue sur des allaitements qui perduraient, comme s’il y avait une norme, qu’au-delà de 6 mois, c’était la fusion et la psychose symbiotique en vue. On a dit beaucoup de bêtises, tous les psys et un certain nombre de professionnels, là-dessus."
Il y a ensuite le réconfort. Quand on est malade, quand on est triste, quand on s'est cogné au coin de la table, quel merveilleux moyen de se consoler que d'aller se se blottir dans les bras de maman !
Et puis tout simplement, le plaisir, l'envie de faire un câlin. Quand on est un(e) bambin(e) trottinante qui découvre le monde et n'arrête pas une seconde, cela fait du bien (et à maman aussi !) de se poser un peu, d'avoir ces moments de calme, de douceur, que sont les tétées.
Et quand maman travaille et qu'on ne l'a pas vue de la journée, quel bon moment pour tous les deux que la "tétée de retrouvailles" (16).
Citons enfin l'un des rares "psys" qui soit sans réserve pour l'allaitement long, Alexander Lowen, le père de la bio-énergie : "La difficulté, là encore, consiste à définir le "normal". Dans une civilisation qui renonce à l'allaitement naturel ou qui se limite aux trois, six, neuf premiers mois, le développement "normal" d'un enfant passe en effet par toutes les phases dont nous venons de parler : frustration - colère - perte. Mais les nourrissons qui ont accès au sein maternel au gré de leurs besoins et aussi longtemps qu'ils le désirent, ceux-là ne passent pas par ce stade de "rapacité insatiable, fantasmes destructeurs, pulsions d'agressivité" dirigées contre cette source de plaisir. Si l'enfant l'a à sa disposition pendant environ trois ans, ce qui est à mon avis le temps requis pour combler ses besoins fondamentaux, le sevrage ne provoque alors guère de traumatisme puisque la perte de ce plaisir est contrebalancée par les nombreux autres plaisirs que l'enfant découvre à ce moment-là" (in La Dépression nerveuse et le corps).
On connaît des peuples où certes on allaitait longtemps, mais où le sevrage, conçu comme un rite de passage, était particulièrement brutal. Dans les ethnies africaines plutôt guerrières, on ne revenait pas dessus, même si l'enfant pleurait. Chez les Wolofs par exemple, l'enfant était emmené "un beau matin" par le père chez quelqu'un d'autre, dans un village voisin, où on lui donnait de la nourriture, du pain. Dans d'autres ethnies au contraire (qui pouvaient être très proches géographiquement des premières), le sevrage était plus progressif. Si l'enfant était trop triste, la mère pouvait revenir sur sa décision et lui redonner le sein pendant quelques semaines, voire quelques mois.
On ne sait si c'est le sevrage brutal qui engendre une société guerrière, ou la société qui volontairement endurcit ses futurs guerriers par un arrachage brutal du sein maternel, puis, plus tard, par une initiation souvent traumatisante. Ce qu'on sait en tout cas, c'est qu'il y a bien assez de guerriers comme ça dans le monde actuel...
Pourquoi est-ce parfois si problématique ?
Faire quelque chose qui n'est pas dans la norme culturelle de la société où l'on vit, n'est jamais confortable. Et ceci pour deux raisons principales.
Tout d'abord le manque de modèles auxquels se référer. Où trouver d'autres mères vivant ou ayant vécu la même expérience ? Avec qui partager ses joies, mais aussi ses inquiétudes et ses interrogations, sans être aussitôt taxée de mère abusive et fusionnelle ?
Heureusement il existe les réunions de La Leche League, qui sont chez nous un des rares lieux où l'allaitement des bambins est reconnu et soutenu.
Mais si, pour certaines, assister à une réunion mensuelle suffit à les “regonfler" assez pour tenir jusqu'au mois suivant, d'autres vivent mal ce qu'elles ressentent un peu comme une "ghettoïsation" : en-dehors des quelques mères qu'elles rencontrent aux réunions, tout le monde leur serine qu'elles ont tort de continuer.
En effet, et c'est la seconde raison du malaise de ces mères, faire quelque chose "hors normes" implique d'être stigmatisé par toutes les autorités, qu'elles soient médicales, sociales ou psychologiques.
Où qu'elle aille, quoi qu'elle fasse, quoi qu'elle lise, la mère d'un bambin allaité risque de rencontrer de l'incompréhension, voire de l'hostilité.
Si elle se plaint à son entourage ou à son médecin d'être fatiguée, que pensez-vous qu'elle va avoir comme réponse ? Arrêtez l'allaitement !
Si elle est mère célibataire et qu'elle demande de l'aide aux services sociaux ou qu'elle consulte un psychologue, le fait qu'elle allaite son bambin pourra être mal perçu par des personnes qui ne sont pas familiarisées avec des durées d'allaitement plus longues que celles qu'on voit habituellement en France.
Si son enfant a plus de mal à se séparer d'elle que le petit voisin, on dira que c'est anormal et que c'est la faute de l'allaitement...
De même, l’allaitement, lorsqu’il dure, peut cristalliser les difficultés lorsque le couple de parents se sépare et faire l’objet de douloureuses batailles.
Alors, comment bien le vivre ?
Il y a sûrement un certain nombre de choses qui favorisent un allaitement non écourté serein, et d'autres qui peuvent être contre-productives
Tout d'abord, dans la mesure du possible, ne pas écouter les commentaires négatifs. C'est évidemment plus facile à dire qu'à faire, surtout lorsqu'il s'agit de sa meilleure amie ou de sa mère qu'on voit trois fois par semaine...
Mais en ce domaine, il y a vraiment un cercle vicieux à briser. Car plus on écoute les critiques, moins on se sent sûre de soi et de ce qu'on fait... et plus on attire ce genre de critiques ! Alors qu'au contraire, si les autres nous sentent claire dans notre décision, il y a fort à parier qu'elle sera plus facilement respectée.
Une autre façon de ne pas s'attirer de remarques désagréables, c'est d'être discrète sur la durée de cet allaitement. À mesure que l'enfant grandit, il devient possible de passer avec lui des petits "contrats" du genre : "On ne tète plus chez mamie, ou chez tante Ursule, ou en-dehors de la maison".
Et même si l'on continue à allaiter en public, il est possible de le faire discrètement, à condition de s'habiller en conséquence (plutôt un haut - T-shirt, pull ou sweat-shirt - qu'on pourra légèrement soulever, qu'une robe à déboutonner entièrement) et d'adopter avec l'enfant un code non compréhensible par l'extérieur pour demander à téter.
Il ne s'agit pas pour autant de raser les murs. Si l'on est assez sûre de soi, il peut être bon de ne pas se cacher pour allaiter. C'est la seule façon pour que ce geste redevienne un jour naturel dans notre société. Et c'est sûrement plus clair pour l'enfant, qui ne comprend pas toujours pourquoi cette activité si gratifiante doit rester clandestine...
Vous avez dit "autonomie" ?
Mais la vraie révolution, qui permettra de bien vivre l'allaitement d'un bambin et le genre de maternage qui en découle, c'est de s'affranchir de la vision très répandue à l'heure actuelle qui consiste à survaloriser l'autonomie précoce de l'enfant : plus il ferait les choses tôt (marcher, parler, être continent, se séparer de sa mère), mieux ce serait.
Il faut dire et redire que cette autonomisation n'est sans doute pas naturelle, que l'enfant de 2 ans n'a pas à être autonome, que ceux qu'on a poussés trop tôt hors du nid risquent de ne jamais savoir vraiment bien voler.
Un enfant qu'on n'a pas laissé être dépendant le temps nécessaire, est finalement obligé de se materner lui-même et peut développer ce que les psychologues appellent un "faux-self". Comme le dit le Dr B.Golse, pédopsychiatre, “Pour bien se détacher, l’enfant doit d’abord bien s’attacher”. C'est sans doute la chose la plus difficile à comprendre, surtout lorsqu'on en est à son premier enfant et qu'on voit les autres enfants du même âge beaucoup moins "accrochés" à leur mère. Comment croire, tant qu'on ne l'a pas vécu, que ces bambins collants deviendront des enfants réellement autonomes, indépendants, curieux du monde et de la vie ? (17)
Du besoin au désir
Cela dit, il ne s'agit pas non plus de materner et d'allaiter un enfant de 3 ans comme un nouveau-né de 3 semaines.
Et c'est bien ce qu'il y a de plus difficile : savoir faire évoluer la relation d'allaitement avec l'âge de l'enfant. Autant le nourrisson a besoin qu'on réponde sans délai à sa demande, autant, chez un enfant plus grand, la demande de téter est multiforme : faim évidemment, mais aussi consolation après une chute, apaisante dans un moment de stress ou de fatigue, moyen de tromper son ennui, etc., etc. C'est alors à la mère de juger au cas par cas de l'opportunité de répondre à cette demande, qui n'est plus toujours de l'ordre du besoin, mais de plus en plus de celui du désir : c’est l’allaitement à l’amiable !
La mère peut donc si elle le souhaite proposer d'autres choses que la tétée : faire un jeu, lire un livre, manger un en-cas, aller se promener...
L'évolution dans la relation avec un premier enfant peut parfois être compliquée, notamment parce que concernant l’allaitement et au-delà, on peut rencontrer des difficultés à poser des limites.
La tétée ne devrait pas devenir un moment difficile pour la mère, qui peut parfois se sentir réduite à n'être qu'un sein pour son enfant. Le ou la partenaire est alors un(e) allié(e)/associé(e) de taille qui peut aider la mère tout en prenant un peu plus encore sa place de co-parent avec son enfant.
Vers un nouveau maternage
Beaucoup de mères d'enfants de 2-3 ans ressentent cette impression d'être accaparées, ne supportent plus cette proximité avec l'enfant, cette dépendance réciproque, ces journées en tête-à-tête avec lui.
Ce n'est pas nécessairement leur style de maternage qui est en cause. C'est aussi que la société n'est pas du tout organisée pour aider ces mères. Car hors du circuit "normal" (travail à l'extérieur et garde de l'enfant), on est complètement livrée à soi-même, sans structures de relais, sans réseaux de soutien qui pourraient permettre de rencontrer d'autres mères avec leurs bambins et éventuellement souffler de temps en temps.
L'enfant de 2-3 ans (et même plus petit) n'est pas fait pour vivre toute la journée en tête-à-tête avec sa mère seule. Et sa mère n'est pas faite pour passer sa journée avec son seul enfant, sans la compagnie et la conversation d'autres adultes.
L'enfant est fait pour être libre d'aller et venir, entre des compagnons de jeu, des activités libres (et non pas toujours programmées par l'adulte) et la possibilité de revenir de temps en temps, quand il le souhaite, à la mère, sa "base arrière", reprendre de l'énergie et repartir aussitôt de l'avant.
Pour l'instant, une telle vision tient de l'utopie. Mais espérons que nous verrons un jour se répandre ce nouveau maternage où tout le monde, parents et enfants, trouvera son compte.
(1) Guzman Peredo, Miguel (éd.), Practicas médicas en la América Antigua, Ediciones Euroamericanas, Mex. DF, 1985.
(2) Dans tout ce dossier, bambin signifie enfant ayant atteint l'âge de la marche.
(3) Breast milk macronutrient components in prolonged lactation. Czosnykowska-Lukacka M et al. Nutrients 2018 ; 10 :1893.
(4) Changes in human milk immunoglobulin profile during prolonged lactation. Czosnykowska-Lukacka M et al. Front Pediatr 2020 ; 8 : 428.
(5) A longitudinal study of human milk composition in the second year postpartum : implications for human milk banking. Perrin MT et al. Matern Child Nutr 2016.
(6) Kent JC, Mitoulas L, Cox DB, Owens RA, Hartmann PE. Breast volume and milk production during extended lactation in women. Exp Physiol 1999 ; 84(2) : 435-47.
(7) Dewey KG. Nutrition, growth, and complementary feeding of the breastfed infant. Pediatr Clin North Am 2001 ; 48(1) : 87-104.
(8) Tomblin JB, Records NL, Buckwalter P, Zhang X, Smith E, O'Brien M. Prevalence of specific language impairment in kindergarten children. J Speech Lang Hear Res 1997 ; 40(6) : 1245-1260.
(9) Boronat-Catalá M, Montiel-Company JM, Bellot-Arcís C, Almerich-Silla JM, Catalá-Pizarro M. Association between duration of breastfeeding and malocclusions in primary and mixed dentition : a systematic review and meta-analysis. Sci Rep 2017 ; 7(1) : 5048.
(10) Sangshin Park, Nam-Kyong Choi, Breastfeeding and Maternal Hypertension, American Journal of Hypertension 2018 ; 31(5) :615–621.
(11) Gunderson EP, Lewis CE, Lin Y, et al. Lactation Duration and Progression to Diabetes in Women Across the Childbearing Years : The 30-Year CARDIA Study. JAMA Intern Med 2018 ; 178(3) : 328-337.
(12) Farland L V, Eliassen A H, Tamimi R M, Spiegelman D, Michels K B, Missmer S A et al. History of breast feeding and risk of incident endometriosis: prospective cohort study. BMJ 2017 ; 358 : j3778.
(13) Langer-Gould A, Smith JB, Hellwig K, Gonzales E, Haraszti S, Koebnick C, Xiang A. Breastfeeding, ovulatory years, and risk of multiple sclerosis. Neurology 2017 ; 89(6) : 563-569.
(14) Collaborative Group on Hormonal Factors in Breast Cancer. Breast cancer and breastfeeding : collaborative reanalysis of individual data from 47 epidemiological studies in 30 countries, including 50 302 women with breast cancer and 96 973 women without the disease. Lancet 2002 ; 360(9328) : 187-95.
(15) Étude de Rosenblatt KA and Thomas DB.
(16) Voir les témoignages dans les n° 70 et 98 d'Allaiter aujourd'hui.
(17) Comme le dit Lowen dans l'ouvrage déjà cité : "Un enfant qui a eu une relation gratifiante avec sa mère réagira avec plus de violence qu'un autre. C'est la raison pour laquelle les nourrissons allaités supportent moins bien les frustrations que les bébés nourris au biberon. Bien que bébé réagisse vivement aux frustrations et que cela puisse poser problème à certains parents, je ne peux que dire : "Tant mieux pour les petits !", car ce n'est sûrement pas en acceptant les frustrations et les séparations qu'un enfant gagne la santé émotionnelle dont il a besoin pour vivre en ces temps difficiles. Tous mes patients déprimés ont tenté de s'adapter à une privation qu'on n'aurait pas dû leur faire subir, et tous ont échoué".
Ressources
La mère, le bambin et l'allaitement, Norma Jane Bumgarner.
À propos du sevrage... quand l'allaitement se termine, Diane Bengson.
Allaiter plus longtemps, Claude Didierjean-Jouveau.
L'allaitement quand il dure (longtemps), hors-série AA.
Les années de lait, Marie Australe.
L’allaitement long expliqué à mon psy, mon généraliste, mon pédiatre, ma voisine, Agnès Vigouroux.
Merci pour cet article. Toujours allaité à 2 ans et 3 mois, mon petit garçon n'est pas du tout du genre "collant". Il a besoin de ses temps câlins (que je lui accorde volontiers et très souvent ! ?), mais il est très autonome et sociable. Tout le contraire de l'archétype de l'enfant allaité qui fait douter toutes mes amies mamans qui ont un tel "profil". De même, la plupart des gens que je rencontre pense que c'est un enfant "gardé", parce que ça se voit : il n'est pas fusionnel ! ? Bref, tout est fait pour qu'on doute de nous et qu'on remette en question nos choix. Mais force est de constater qu'il faut s'écouter et écouter les besoins de son enfant.
Bonjour,
Merci pour cet article et pour votre travail.
Pour ça comme pour l'allaitement, je ne dirai qu'un mot : encore !
1 enfant, 43 mois d'allaitement sans complexes
Merci pour cet article qui permet de prendre du recul et de se conforter dans l’idée que l’on fait ce que l’on veut. Mon petit a 29 mois et il n’est pas prêt pour le sevrage Quand il avait un mois on me disait qu’il t’était trop (8 fois par jour). Si ces personnes le voyaient maintenant!!!
Bref merci pour ce moment de réconfort
Bonsoir, si vous voyez l’heure, vous comprendrez que je suis réveillée pour une tétée de mon bébé de 15 mois. Et même la nuit ça fait du bien de lire votre article qui m’a regonflée face aux « après 1 an il faut arrêter d’allaiter » alors que ni bébé ni moi en avons envie. Je ne sais pas jusqu’où nous irons mais j’espère que lorsque nous arrêterons cet allaitement nous serons dans de bonnes conditions, contrairement à son grand frère qui a été gardé plus tôt vers ses 3,5 mois et qui a découvert le débit du biberon mais on m’y reprendra plus !
Merci pour cet article très enrichissant !!
Je trouve que cet article est celui qui fait le plus honneur à l'allaitement au delà de deux ans ❤️
Je suis enceinte,,, et,, mon garçon a 3 ans et est allaité pour son dodo , il est vraiment heureux et très actif , la tétée le calme et je respecte son besoin . Sa grande sœur qui est plus calme a cessé autour de 1 an et demi . Nous sommes tous différents, notre maman est celle qui devrait respecter le plus nos besoins! Je n’ai pas eu la chance d’Avoir une maman ,,, et croyez-moi « l’amour Inconditionnel » c’est le début de l’estime de soi !
J'en suis à 74 mois d'allaitement et ce n'est pas fini, le dernier n'a que 29 mois ;) !
Depuis mes 16 ans, je suis convaincue que c'est la meilleur chose au monde, sans cela (l'allaitement) nous ne serions , nous, pas là!
C'est bien ça ! Durée totale d'allaitement sur toute la vie.
Je pense que ce n' est pas une coquille mais bien 72 mois sur toute une vie.. plusieurs enfants...lol
Merci pour cet article, tréès complet et tellement juste...
Je crois qu'il y a quand même une petite coquille dans la partie "les avantages pour la santé de la mère ": une étude de 1995 a montré que les mères qui avaient allaité plus de 72 mois..." Euh... Ça fait beaucoup quand même 72 mois! Ce n'était pas plutôt 22 ?
Bravo pour le nouveau site en tous cas! Et merci!
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