Cet article est paru dans Allaiter aujourd'hui n° 72, LLL France, 2007
Une enquête française, menée entre septembre et octobre 2006 par deux consultantes en lactation, a étudié la manière dont les mères vivent la reprise du travail, et comment elles articulent vie familiale et vie professionnelle.
Cette enquête a été menée auprès de 49 mères qui avaient un enfant de moins de 1 an au moment de l'enquête, et qui avaient repris le travail, au moins à mi-temps, alors que leur enfant avait moins de 6 mois. Elles ont été recrutées lors de réunions de mères, sur des forums et des listes de discussion sur Internet et sur des salons.
Ces mères ont en moyenne 30 ans, et 47 d'entre elles ont au moins un bac+2. 75 % ont un emploi d'ingénieur, de cadre ou d'employée de bureau.
Les premiers résultats concernant les 40 mères qui ont poursuivi l'allaitement à la reprise du travail montrent des éléments intéressants.
75 % de ces mères déclarent penser fréquemment à leur bébé lorsqu'elles travaillent. 70 % y pensent en termes d'amour, seules 13 % y pensent en termes de culpabilité.
Plus les mères reprennent le travail tôt, plus elles sont anxieuses : 45 % des mères de bébés de moins de 4 mois se déclarent très anxieuses à la reprise du travail contre 26,5 % des mères de bébés de plus de 4 mois.
La reprise du travail est un gros facteur de stress : 42,5 % des mères se sont déclarées très stressées à la reprise du travail, alors qu'elles ne sont plus que 19,5 % au moment où elles répondent au questionnaire. Notons que 37 mères allaitent encore au moment de l'enquête.
Si le stress diminue au fil du temps, la fatigue, elle, augmente : 30 % des mères se sont déclarées très fatiguées au moment de la reprise du travail, alors que 49 % d'entre elles sont fatiguées au moment où elles répondent au questionnaire.
Quand on observe les conditions matérielles de la reprise, on s'aperçoit que toutes les mères diminuent leur temps passé au travail : avant d'avoir un enfant, 53 % travaillaient plus de 35 h alors qu'elles ne sont plus que 26 % après la naissance du bébé. De même, 24 % rapportaient du travail à la maison tous les jours ou presque avant d'avoir un enfant, elles ne sont plus que 11 % après la naissance du bébé à le faire.
62,5 % des mères sont satisfaites de leurs conditions de travail. Notons que 36 mères tirent leur lait à la reprise du travail.
Après la naissance, 24 femmes perçoivent leurs conditions de travail différemment, mais pour 2/3 d'entre elles, ce changement est uniquement dû à un changement de perception et non à un changement réel des conditions de travail. Le fait d'avoir un enfant change donc leur regard sur leurs conditions de travail.
53 % des mères n'ont pas de contrôle horaire sur leur lieu de travail, mais seules 34 % peuvent modifier leurs horaires facilement en cas d'imprévu pour pouvoir aller chercher leur enfant. Ceci montrerait-il qu'elles ne s'autorisent pas à modifier leur vie professionnelle en raison de leur vie familiale ?
En cas d'urgence, pour aller chercher leur enfant, 26,5 % peuvent s'arranger avec les collègues, 41 % peuvent demander une demi-journée de congé, mais 22 % déclarent ne pas pouvoir quitter leur lieu de travail : c'est donc compliqué pour elles d'avoir un enfant en bas âge qui risque d'être malade. Pour ces mères, si le bébé est moins malade, cela simplifie leur vie quotidienne.
45 % des mères se sentent pleinement au travail quelques jours après la reprise, 37,5 % ont besoin de une à quatre semaines. 12,5 % des mères ne se sentent pas pleinement au travail au moment de l'enquête alors qu'elles ont repris le travail en moyenne depuis 3,3 mois.
En ce qui concerne l'organisation familiale, 84 % des mères se trouvent bien organisées dans leur vie quotidienne, alors que la plupart tirent leur lait au travail.
51 % des mères passent de une à trois heures avec leur bébé les jours travaillés, 35 % passent de trois à sept heures et 13,5 % passent plus de sept heures avec leur bébé les jours travaillés.
81 % des mères passent toute la journée avec leur bébé lorsqu'elles ne travaillent pas.
Enfin, les pères de bébés allaités s'impliquent beaucoup dans les tâches domestiques : préparation des repas, mettre et débarrasser la table, faire la vaisselle, les courses, nettoyer et ranger la maison (sur ce point, les résultats sont comparés à ceux obtenus chez les pères de bébés non allaités de l'enquête). Certaines activités restent essentiellement masculines : jardiner, bricoler, réparer. Les soins aux enfants (nourrir, laver, soigner les enfants) sont très bien partagés entre les deux conjoints.
Ces résultats montrent que les 40 mères qui ont fait le choix de poursuivre l'allaitement à la reprise du travail, majoritairement en tirant leur lait, sont satisfaites de leur choix et vivent bien la reprise du travail même si la fatigue augmente au fil du temps. Il est intéressant d'observer que ces mères ont changé de regard sur leurs conditions de travail.
Il sera intéressant de confirmer ces résultats avec une population plus large et moins homogène.
Source : La poursuite de l'allaitement maternel après la reprise du travail favorise-t-elle l'articulation vie familiale – vie professionnelle ?, Véronique Darmangeat, Christine Koehler, mémoire Crefam 2007.
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