Trois enquêtes récentes menées dans différents pays africains montrent que la violence est massivement utilisée comme méthode d'éducation aussi bien par les parents que par les enseignants. Ainsi, une enquête menée au Maroc par l'ONG ATFAL et publiée par l'UNICEF en juin 2002 (Libération de Casablanca, 30 juin 2002), a montré que 85 % des enfants sont soumis à des punitions corporelles à l'école de la part de leurs éducateurs. Au Cameroun, d'après une enquête de l'association EMIDA, menée avec le soutien de l'UNICEF, ce sont 90 % des enfants qui sont soumis à la bastonnade à l'école et à la maison. Au Togo, la Fédération Internationale pour les Droits de l'Enfant (FIDE) aboutit, elle, à un pourcentage de 96 % d'enfants soumis à la violence éducative. Les parents qui frappent leurs enfants ne le font pas, sauf exceptions, par sadisme, mais « pour leur bien », pour bien les éduquer, et donc avec le désir de bien faire. Ils ont d'ailleurs pour la plupart été élevés de la même façon et ne font que reproduire de bonne foi l'éducation qu'ils ont subie.
Mais en quoi cette tradition, probablement plurimillénaire, pose-t-elle problème ? L'usage de frapper les enfants pour les éduquer n'est-il pas universel ? Son caractère traditionnel n'est-il pas le garant de sa valeur ?
On pouvait le croire jusqu'à ces vingt ou trente dernières années. Mais aujourd'hui, plus aucun doute n'est possible. De nombreuses études scientifiques ont montré que la violence infligée aux enfants par leurs parents ou par leurs maîtres a de graves conséquences.
Le système nerveux de l'enfant n'est pas achevé à la naissance. Ces conséquences sont d'abord dues au fait que le système nerveux de l'enfant n'est pas achevé à la naissance. Le cerveau d'un enfant ne pèse, à la naissance, qu'un quart de son poids définitif. Il atteint 50 % de ce poids à 6 mois et 95 % à 10 ans.
Les coups sont donc donnés à l'enfant pendant toute la période où son cerveau est en pleine formation et où ses neurones, les cellules du cerveau, s'interconnectent, faisant ainsi augmenter le poids et les capacités de cet organe. À cette époque de la vie, toutes les expériences faites par l'enfant s'impriment en lui et le marquent de façon souvent indélébile, même s'il ne s'en souvient pas plus tard. Certains neurobiologistes disent que les parents « sculptent » littéralement le cerveau de leur enfant par leur comportement éducatif et soit lui permettent de s'épanouir, soit l'empêchent de se développer normalement.
Des coups donnés par les personnes qui sont la base de sécurité de l'enfant. De plus, et c'est la deuxième raison de la gravité des conséquences des coups, ils sont donnés par les personnes qui sont la base de sécurité de l'enfant, celles dont il est entièrement dépendant, qu'il aime et qui sont ses modèles. Agressé par une personne extérieure à sa base de sécurité, l'enfant peut trouver consolation et protection auprès de ses parents. Mais agressé par ses parents eux-mêmes ou par la personne qui l'élève (et les coups sont une agression exactement comme ils le sont pour un adulte), l'enfant n'a aucun recours, il se retrouve seul et désarmé et rien ne le prépare à une telle situation. L'éducation par les coups risque de former des jeunes et des adultes sans pitié, capables de faire souffrir les autres sans se rendre compte de ce qu'ils font. Les solutions qu'il est alors obligé d'adopter pour survivre sont toutes dangereuses, aussi bien pour sa santé physique que pour sa santé mentale et pour son sens moral. Il peut par exemple s'endurcir, s'insensibiliser, mais en s'efforçant de se rendre sourd à sa propre souffrance, il devient sourd à la souffrance d'autrui. L'éducation par les coups risque de former des jeunes et des adultes sans pitié, capables de faire souffrir les autres sans se rendre compte de ce qu'ils font.
La soumission à la violence ? Il peut aussi, c'est vrai, apprendre l'obéissance, la soumission. Mais la soumission à quoi ? Non pas à la loi et à la morale, mais à la violence et aux individus violents, qu'il s'agisse d'un chef de bande de son quartier, d'un chef de gang ou d'un dictateur qui font naître en lui les mêmes réactions de soumission que le parent ou le maître qui l'a frappé. Il peut enfin faire semblant de se soumettre et apprendre à faire en cachette ce qui lui a valu d'être frappé. Les coups lui auront ainsi appris l'hypocrisie. Est-ce vraiment ce que nous voulons apprendre aux enfants ?
En frappant, on apprend à l'enfant à frapper. Mais il y a pire. Parmi les comportements innés de l'enfant, un des principaux est le comportement d'imitation. C'est grâce à ce comportement que l'enfant effectue la plupart de ses apprentissages, bons et mauvais. C'est ainsi que la première chose qu'on apprend à un enfant en le frappant, ce n'est pas à bien faire ses devoirs ou à être sage, c'est à frapper. Et à frapper de préférence, comme il le voit faire par ses parents quand ils le frappent, les êtres petits et faibles. À coup sûr, plus tard, ses propres enfants.
Hormones du stress. L'enfant dispose aussi d'un autre comportement inné, c'est le comportement de sauvegarde, celui qui déclenche instantanément dans notre organisme l'émission d'un flot d'hormones pour nous préparer à fuir ou à nous défendre, quand nous nous croyons en danger. Quand nous avons effectivement cette possibilité, les hormones jouent normalement leur rôle et l'organisme n'en subit aucune conséquence nocive. Mais quand nous ne pouvons ni fuir ni nous défendre, alors ces hormones, qu'on appelle hormones du stress, attaquent l'organisme, notamment le système digestif et le cerveau. Elles ont la capacité de détruire les neurones. Si bien que le cerveau des personnes qui ont été soumises à des stress violents peut montrer, sur l'écran des scanners, de véritables atrophies.
Or, un enfant frappé ne peut précisément ni fuir ni se défendre. Et cette situation se répète bien des fois pendant toute son enfance, parfois quotidiennement. Il n'est donc pas étonnant que, parmi les conséquences des mauvais traitements, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), dans son rapport de novembre 2002, note la déficience intellectuelle, les retards de développement, les mauvais résultats scolaires. Pas étonnant non plus que les enfants frappés subissent plus d'accidents que les autres, comme l'ont prouvé plusieurs enquêtes. Leur système de sauvegarde, trop souvent mis à l'épreuve dans de mauvaises conditions, a pu se détériorer dès leur enfance et les empêcher d'avoir les bons réflexes au moment voulu.
Enfin, une des fonctions fondamentales de l'organisme, le système immunitaire, qui permet à notre corps de se défendre contre les maladies, risque d'être perturbé par les coups. En effet, quand l'organisme est en état de stress, comme l'essentiel pour lui est de provoquer la fuite ou la défense, il désactive, par économie d'énergie en quelque sorte, les fonctions qui ne sont pas indispensables sur le moment, notamment la fonction digestive et le système immunitaire. Ainsi, toutes les fois qu'on frappe un enfant, on le rend non pas plus fort mais, bien au contraire, plus vulnérable aux maladies, qu'elles soient physiques ou mentales. L'OMS cite ainsi, parmi les maladies qui peuvent être causées par les violences subies dans l'enfance : le cancer, les affections pulmonaires chroniques, la fibromyalgie, le syndrome du colon irritable, les cardiopathies ischémiques, les maladies du foie et la dépression.
Olivier Maurel
auteur de La Fessée, Cent questions-réponses sur les châtiments corporels, aux Editions La Plage
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Merci beaucoup pour cette article ca ma ouvert les yeux et j ai appris beaucoup des choses.Merck Millie fois
Vous pourriez peut-être lire la brochure "Sans frapper, comment faire ?" :
http://ddata.over-blog.com/xxxyyy/0/19/43/08/sansfessee05.pdf
Cet article ne m'aide pas. Je cherche de l'aide sur comment ne plus frapper mon enfant.
Je reconnais certaines conséquences décrites dans cet article sur moi, mais en plus large partie je reconnais les conséquences/ comportements du père de mes enfants, qui sans avoir vécu/grandi avec la peur au ventre d'être battu, n'a aucune empathie pour autrui, a des problèmes de santé, d'échec et de sentiment d'impuissance tels qu'il n'a aucun courage face à toute situation.
Aujourd'hui j'ai craqué et battu ma fille, pour affirmer mon autorité au final (idiot, n'est-ce pas ?). Elle appelait son père (absent). Une fois calmée nous l'avons appelé au téléphone. Conversation banale entre ma fille et son père, interrompue par une mauvaise manipulation du téléphone. Je rappelle. Elle me supplie de ne pas rappeler. J'explique au père la situation. Il demande pourquoi je l'ai tapée et il refuse de consoler sa fille car "ça ne me regarde pas, c'est entre vous. Et moi est-ce qu'on pense à moi, elle m'a raccroché au nez" (mauvaise manipulation du téléphone et il le sait). Pauvre enfant...
J'ai besoin d'aide pour ne plus la frapper, sur le comment ne plus frapper, pas sur le pourquoi ne plus frapper.
La page Wikihow sur le sujet n'a pas été suffisante.
Merci d'avoir lu.
Être battu les cicatrices que cela laisse , moi je fais au moins chaque mois un cauchemar dans lequel je vois mes deux parents entrain de le frapper et la douleur est tellement attroce que je le réveille en pleurant . J'ai 19 ans et cela m'empêche même de m'asseoir au salon avec eux ou même toute seul , je n'aime souvent pas la maison et froncer la mine est un réflexe dés que j'ouvre la porte tout m'irrite mes les cris continuent , je vois mes jeunes frères subirent comme moi j'ai subit et je n'ai même pas la force de consoler . Je fais la promesse a moi et a l'univers de ne jamais porter la mains sur un être qu'importe son âge , qu'importe sa bétise . Merci pour cet article
VIOLENCE CONTRE L'ENFANT EST GENERATRICE D'HYPOCRISIE
Aujourd’hui j’ai frappé ma petite-fille ma princesse de 2ans et demi , et quand j’y repense j’ai presque les larmes aux yeux , merci de cette article dorénavant elle ne va plus les subir. Je l chérirai tous les jours ainsi que sa petite sœur et je les éduquerais sans des fouets.
Je ne frappe jamais mon fils de 2ans et demi meme c defois il m'enerve a la fin. et comme je viens de lire cet article franchement je me sent fier et je continurais n'challah comme ca.??????
ma mere me frappait mais pour mon bien !!!!!!
C'est dure de me voir visé par cette analyse. Ceux qu'avons été frappés par nos parents et professeurs dans notre enfance traînons le lourd fardeau de conséquences.
J'ai aimé cet article qui nous servira de conseil pour nous les parents en puissance merci
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