D'après : Eight things fostering kittens have taught me about infant feeding. Robertson BD. Clin Lact 2018 ; 9(1) : 39-41.
L’auteur est infirmière et consultante en lactation. Depuis trois ans, elle accueille des portées de chatons orphelins pour une association locale. Elle s’est ainsi occupée de 20 portées, 50 chatons au total. Elle a trouvé très gratifiant de voir son fils participer aux soins des chatons. Elle a également fini par réaliser que cela lui permettait d’apprendre, jour après jour, comment gérer de petits mammifères lorsqu’ils n’étaient pas allaités par leur mère. Elle décrit dans cet article les 8 leçons que cela lui a appris.
Savoir quelles quantités de lait donner
Chaque fois qu’elle accueillait une nouvelle portée de chatons, on lui fournissait des informations détaillées sur leur alimentation : quoi leur donner, comment, en quelle quantité en fonction de leur âge. La première portée avait 5 semaines, et les chatons savaient déjà relativement bien se nourrir par eux-mêmes. Les choses ont donc été faciles, les chatons ont grandi et grossi tout à fait normalement. L’une des dernières portées était constituée de très jeunes chatons qui devaient être nourris à la seringue toutes les 3 heures pendant la journée (10 ml par repas), avec un intervalle d’au maximum 6 heures la nuit. Il fallait aussi prévoir d’augmenter légèrement les quantités tous les 2 à 3 jours. En comparaison, quelles informations reçoivent les familles dont l’enfant n’est pas allaité ou commence à recevoir des biberons en plus des tétées ? Cela varie beaucoup en fonction du médecin qui suit l’enfant. L’auteur se rappelle ne jamais avoir reçu d’informations sur le sujet, et elle a l’impression que les choses n’ont guère changé depuis. On sait que, pendant les premiers jours de vie, les nouveau-nés n’ont besoin que de quelques ml de colostrum. Pour les jours suivants, tabler sur 150 ml/kg/jour est globalement approprié, et cette quantité montera jusqu’à un plateau d’environ 750 à 900 ml par jour où elle se stabilisera pendant des mois. Elle baissera ensuite progressivement lorsque le bébé commencera à consommer d’autres aliments.
Quelle position pendant les repas
On lui donnait également des informations sur la position des chatons pendant qu’on les nourrissait. Apparemment, les chatons aussi aiment être détendus pendant les tétées. Lorsqu’ils tètent leur mère, celle-ci se couche sur le côté et ils sont à plat ventre sur elle. On nous conseillait de les poser à plat ventre sur nos genoux et d’amener la seringue devant leur bouche, un peu en hauteur en glissant un doigt sous leur menton pour le stabiliser. Dans cette position, les chatons tétaient parfaitement bien. Lorsqu’ils étaient mal positionnés, ils cherchaient l’embout de la seringue, le prenaient, le lâchaient, et le repas était difficile pour tout le monde.
Les petits prennent ce dont ils ont besoin s’ils sont nourris lentement
Au départ, l’auteur n’en avait pas pris conscience. Le chaton affamé, lorsqu’il était enfin calmé et mis dans la bonne position qui lui permettait de prendre correctement le biberon, avalait sa dose de lait en moins d’une minute. Et il recommençait à miauler de faim parce qu’il avait mangé tellement vite qu’il avait l’impression de ne pas avoir mangé. Il fallait alors le caresser, nettoyer sa petite tête, masser sa zone génitale pour qu’il émettent ses urines et ses selles, et il finissait par se calmer, mais cela prenait du temps. Si on lui avait proposé davantage de lait, il l’aurait avalé.
Il est facile de suralimenter un bébé nourri au biberon (ou à la seringue)
Là encore, bien des parents ne reçoivent pas les informations nécessaires. Même si une mère sait quel volume de lait donner à son bébé, il est tentant de lui en donner davantage si elle constate que son bébé semble encore affamé, parce qu’après avoir avalé ce volume supplémentaire, comme les chatons qu’on a suralimentés, le bébé est beaucoup plus calme et agréable et tout le monde se sent bien. Dans notre société, on associe souvent alimentation et amour. Si une mère allaite et que son bébé semble ne pas avoir pris assez de poids, lui donner un supplément la fait se sentir mieux. Certes, un bébé qui ne prend réellement pas assez de poids a besoin de recevoir davantage de lait pour booster sa croissance. Mais lorsque sa croissance est devenue satisfaisante, il est nécessaire de diminuer ses apports. Les chatons ont un moyen efficace de faire savoir à la personne qui s’occupe de les nourrir qu’ils reçoivent trop de lait : ils ont la diarrhée, ce qui amène rapidement à baisser le volume de lait donné. Les bébés humains portent des couches, et la diarrhée est donc un problème plus facile à gérer. Qui peut savoir le pourcentage de coliques du nourrisson causées par la suralimentation ?
La prise de poids d’un bébé varie suivant les jours
Les chatons ne prenaient pas régulièrement du poids jour après jour. Certains jours, ils prenaient beaucoup de poids, d’autres jours, ils en prenaient peu, et il y avait même des jours où ils en perdaient. Il en est de même chez les bébés humains. En conséquence, si la prise de poids d’un nouveau-né doit être surveillée, le peser environ deux fois par semaine est tout à fait suffisant. Sauf s’il y a de sérieuses raisons de s’inquiéter, le peser tous les jours est inutile et peut même être contre-productif pour des parents stressés et fatigués.
Il est facile de devenir « accro » à la balance
« Addiction » semble un terme très fort, mais l’auteur a constaté qu’elle était elle-même susceptible de le devenir. Il lui est arrivé de peser jusqu’à quatre fois par jour certains chatons ! Lorsqu’elle s’est rendu compte qu’elle était complètement obsédée par leur prise de poids, elle a réagi. Les plus petits sont maintenant pesés une fois par jour (ceux de moins de 4 semaines), et lorsqu’ils sont plus âgés, il le sont tous les quelques jours. L’auteur a constaté qu’il était important de regarder l’ensemble du tableau (comment se portent globalement les chatons) plutôt que de se focaliser sur leur prise de poids.
Globalement, un petit qui mange bien et semble bien se porter se porte bien
Habituellement, un bébé (ou un chaton) réellement malade mange mal et il est apathique. Tant qu’un petit mange normalement, joue et se montre actif, il est permis de penser qu’il ne souffre pas d’un problème sérieux même s’il a le nez qui coule ou qu’il tousse un peu.
Utiliser ses compétences en matière d’alimentation
Une mère sait généralement lorsque son bébé a un problème, et un professionnel compétent peut se rendre compte d’un seul coup d’œil si un bébé a un problème qui nécessite une action immédiate. L’auteur a suivi un prématuré né à 34 semaines de gestation. On avait dit aux parents d’enrichir le lait maternel exprimé qu’il recevait jusqu’à ce qu’il ait 12 semaines post-partum (soit 6 semaines d’âge corrigé). L’auteur a vu le bébé à 8 semaines d’âge corrigé et il ressemblait à une boule. Elle a contacté le pédiatre pour en discuter avec lui. Certains bébés ont besoin de recevoir davantage de calories, mais cela n’était vraiment pas le cas de cet enfant. Après avoir vu l’enfant, le pédiatre a établi un nouveau planning d’alimentation.
S’occuper de ces portées de chatons a permis à l’auteur de mieux comprendre les familles qui souhaitaient donner des suppléments à leur enfant. Certes, elle recevait des instructions précises pour s’occuper des chatons, mais elle a constaté que le bon sens et l’observation étaient également des outils très utiles. C’est également le cas pour les parents avec leur nourrisson : ils ont besoin de recevoir des informations précises, ce qui les sécurisera, et les encouragera à regarder leur bébé, ce qui les aidera à avoir confiance en eux.
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