Article publié dans les Dossiers de l'Allaitement numéro 66 (Janvier-Février-Mars 2006)
D'après "Parenting practices that limit transitional object use : an illustration." KE Green, MM Groves, DW Tegano. Early Child Dev Care 2004 ; 174(5) : 427-36.
La norme dans les pays occidentaux est de donner à l’enfant un « doudou », un objet transitionnel. Ce dernier est considéré comme plus ou moins indispensable au développement de l’enfant. De très nombreux spécialistes de psychologie infantile ont étudié les troubles induits par l’absence d’un objet transitionnel. Mais ces études ont été effectuées sur des cultures occidentales. John Bowlby estime que l’attachement de l’enfant à un objet n’est ni aussi fréquent, ni aussi « sain » qu’on le pense chez nous.
Dans de nombreuses cultures traditionnelles, le petit enfant passe l’essentiel de son temps contre le corps de sa mère, il dort avec elle, et il a accès au sein aussi souvent qu’il le désire. Ses besoins d’attachement sont totalement satisfaits par le corps de la mère. Dans les sociétés occidentales, la plupart des jeunes enfants passent le plus clair de leur temps seuls, et doivent donc se contenter d’une sucette à la place du sein, et d’un doudou à la place du corps de leur mère. Une étude effectuée sur des bébés vivant en Italie en 1970 a constaté que 5% des bébés italiens vivant en zone rurale avaient un doudou, contre 31% des bébés italiens vivant en ville, et 61% des bébés anglo-saxons vivant dans une ville italienne. D’après les études effectuées sur le sujet, il semble que l’utilisation d’un doudou est rare dans les cultures où l’allaitement long est la norme, où le bébé dort avec sa mère, et a beaucoup de contact physique avec elle. L’objectif de cette étude était d’évaluer la fréquence d’utilisation d’un doudou par rapport aux pratiques de parentage.
Un questionnaire a été publié dans une grande revue internationale destinée aux parents et tirée à 14 000 exemplaires, portant sur les pratiques de parentage et l’utilisation d’un doudou, et dont la réexpédition était payée par l’éditeur. 275 questionnaires ont été retournés (5,5% de nombre d’abonnés). Les mères étaient âgées d’en moyenne 34 ans, étaient essentiellement américaines et canadiennes, la majorité d’entre elles étaient blanches, mariées, et d’un bon niveau socioculturel. 89,1% avaient allaité exclusivement, et la plupart d’entre elles mettaient l’enfant au sein à la demande, y compris pour le réconforter ou l’endormir. Ces mères ont allaité en moyenne pendant 35,8 mois (de 1 à 90 mois). 48,7% de ces mères estimaient « être le doudou » de leur enfant. 18,2% des enfants avaient un doudou traditionnel (défini comme un linge, une sucette, ou la succion du pouce).
Pour cette étude, les auteurs ont défini le parentage comme étant à « contact important » avec la mère (allaitement long et à la demande de l’enfant, sommeil avec la mère, enfant fréquemment porté), ou à « faible contact » avec la mère (lorsque la mère ne pratiquait pas l’ensemble des points cités ci-dessus). 211 mères (76,7%) disaient pratiquer un maternage de contact important. Les enfants de ces femmes utilisaient essentiellement le sein comme objet transitionnel. Les bébés des mères à faible contact étaient beaucoup plus nombreux à utiliser un objet transitionnel traditionnel. De plus, les bébés des mères à faible contact ont été allaités pendant nettement moins longtemps que les bébés des mères à contact important (environ 24 mois contre 40 mois). L’âge de l’enfant lorsqu’il a commencé à utiliser un objet transitionnel variait suivant l’objet : 3 mois pour la sucette, 4,3 mois pour le pouce, 8,35 mois pour un linge, 24,2 mois pour un jouet. 18,5% des enfants de cette étude utilisaient leur pouce comme objet transitionnel, et 13,8% utilisaient un linge ou un jouet.
Dans le groupe de mères occidentales pratiquant un maternage à contact physique important, l’utilisation par l’enfant d’un objet transitionnel était beaucoup plus rare que dans la population générale. Il semble donc bien que les enfants qui bénéficient d’un contact physique intense avec la mère n’éprouvent pas le besoin d’avoir un objet transitionnel. On peut donc conclure que l’utilisation d’un objet transitionnel n’est pas un passage obligatoire pour l’enfant, universel dans toutes les cultures, mais un mode d’adaptation à des pratiques de maternage ne permettant pas à l’enfant de satisfaire ses besoins de contacts physiques avec sa mère. Cela ne veut pas obligatoirement dire que l’utilisation d’un objet transitionnel signale un dysfonctionnement chez l’enfant, mais plutôt que l’enfant a dû trouver un autre moyen de satisfaire ses besoins et de se rassurer.
Les jeunes enfants doivent voir leurs besoins satisfaits de façon correcte pour développer un sentiment de sécurité et d’attachement. Un bébé qui passe l’essentiel de son temps loin de sa mère sera habituellement beaucoup plus anxieux, et aura du mal à développer ces sentiments de sécurité et d’attachement. Les spécialistes estiment que l’enfant doit d’abord s’attacher à sa mère avant de pouvoir s’attacher à un objet transitionnel ; or, ce sont les enfants qui ont le moins de contacts physiques avec la mère qui seront le plus enclins à utiliser un objet transitionnel.
Les auteurs concluent qu’il semble y avoir une hiérarchisation dans les objets transitionnels utilisés par l’enfant. Les bébés qui ont la possibilité d’utiliser le sein maternel et/ou le corps de la mère ont rarement besoin d’un autre objet transitionnel. Les bébés qui n’ont pas cette possibilité apprennent à se réconforter seuls avec leur pouce, un linge, une sucette ou un jouet. D’autres études seraient nécessaires sur le sujet, afin d’évaluer les différences culturelles de parentage et d’utilisation d’un objet transitionnel, ainsi que l’impact à long terme de ces pratiques ; en particulier, certains auteurs craignent qu’un mode de parentage à contact important avec l’enfant (qui a été la norme pendant des millénaires, et qui le reste dans la plupart des cultures traditionnelles) rende ce dernier dépendant et incapable de se séparer de sa mère, tandis que d’autres affirment qu’un mode de parentage à faible contact ne respecte pas les besoins fondamentaux des bébés.
aBonjour.
Je viens chercher des idées pour m’aider avec mon petit garçon de 18 mois.
Nous sommes en cosleeping depuis sa naissance et maternage proximal.
Mon allaitement n’a pas été simple au début. Petit frein de langue… nous sommes donc en tiers allaitement depuis sa naissance.
Mon bébé tête la nuit. Rarement la journée. Il n’a pas la patience. Sauf pour se rassurer après un chagrin ou un bobo. Je suis donc devenue naturellement son doudou tété. J’aime beaucoup cette relation . Par contre la nuit je suis sa tétine! Si je le décroche du sein c’est la crise. Il se réveille donc toutes les heures et demie pour tetouiller et se rendormir à quelques centimètres. Sauf à partir de 5h du matin ou la c’est non stop. Je mnt suis habituée. J aime ce contact. Par contre ça devient compliqué si je dois m’absente mR une nuit prochainement. Commentimerions dormir la chambre à côté avec mon conjoint mais je suis terrorisée a l’idée du cataclysme que ça va être pour nous. Merci de vos précieux conseils. July
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