Bébé est né par une césarienne en urgence, à terme et avec un bon poids de naissance. Il a réussi à prendre le sein 5 heures après sa naissance. Ensuite il a dormi. Il regurgitait beaucoup de glaires. Puis il n'a pas repris le sein. On a tenté de lui donner du colostrum congelé avant la naissance (à la seringue), ou exprimé sur le moment (à la cuillère), mais peu importe, il ne faisait que régurgiter et n'avalait rien. À 48 heures, l'équipe a introduit une sonde rectale, et le meconium est sorti. Bébé a repris le sein avec enthousiasme juste après et semblait se sentir mieux. Puis retour à la case départ : bébé écœuré, qui régurgite beaucoup et refuse de s'alimenter. Il a eu un examen qui a montré plein d'air dans son ventre, et un transfert vers l'hôpital a été décidé. Là-bas, il y a eu confirmation par biopsie du diagnostic soupçonné : une maladie de Hirschsprung.
Il s'agit d'une paralysie d'une portion plus ou moins longue du tube digestif, qui bloque totalement le transit. La solution à long terme était une opération qui consiste en l'ablation de la partie malade du colon (environ la moitié). À l'issue de cette opération, ce qui est attendu est une vie normale malgré une plus forte tendance à la constipation et aux ballonnements. L'hôpital m'a rapidement prêté un tire-lait. Même si l'idée m'attristait car ce n'était pas l'idée que je me faisais de l'allaitement, je me disais que ce qui comptait était qu'il ait mon lait. L'hôpital n'acceptant que le lait tiré sur place, j'ai passé pendant 3 semaines mes journées branchée au tire-lait avant de rentrer pour la nuit. Cela m'a donné le sentiment d'être utile, c'était mon objectif quotidien. Le lait était donné par sonde gastrique essentiellement, afin de contrôler précisément le débit. Parfois il avait des biberons également, ou alors un DAL au doigt, rarement (et difficilement) le sein. La sonde au doigt a vite été arrêtée car ces contenants multiples rendaient bébé tellement confus qu'il ne voulait plus rien prendre.
Il a été opéré à l'âge de 8 jours, et tout s'est très bien passé. Après l'opération, il a fallu reprendre l'alimentation petit à petit. Cela se faisait à la sonde gastrique, puis les médecins ont voulu diminuer l'alimentation par sonde pour la remplacer par des biberons et des tétées. Problème : gavé par la sonde, bébé n'avait plus faim. Les médecins lui donnaient donc par la sonde ce qu'il ne mangeait pas et ainsi de suite. Ça a duré jusqu'à ce que le papa insiste pour le retrait de la sonde, et bébé a alors immédiatement pris "ses rations". On lui a par ailleurs proposé le sein plusieurs fois, et il a fini par y arriver, ce qui a été un grand bonheur pour moi. Chaque prise alimentaire était consignée : heure et quantité. Pour les tétées, il s'agissait de peser le bébé avant et après chaque tétée systématiquement. Pour le biberon, seul le personnel avait accès au frigo, et il fallait donc toujours demander et attendre que quelqu'un soit libre.
Restait le problème de la prise de poids. En effet, une complication possible de l'opération est une mauvaise absorption. Et bébé ne prenait pas de poids alors qu'il semblait manger assez. Ce problème s'est résolu de lui-même du moment où on l'a ramené à la maison contre avis médical avec la chaleur de ses parents, une alimentation libérée des contraintes de l'hôpital et des pesées effectuées toujours dans les mêmes conditions. Depuis, on a un bébé qui grandit et grossit bien. Ce n'est certes pas un gros bébé mais il suit bien sa courbe, fait ses acquisitions et grandit harmonieusement. Il prend facilement le sein et le biberon (de lait maternel). Oh, nous avons eu des difficultés assez classiques : des périodes de refus du sein, des périodes de refus du biberon, deux engorgements, un REF, un reflux très embêtant, une suspicion d'enterocolite, un bébé qui refuse l'un ou l'autre sein certains jours... Mais on forme une belle équipe, et, avec le soutien du papa et d'une animatrice LLL, à 18 mois il est toujours allaité. Ses cicatrices sont presque invisibles, ses difficultés chroniques à émettre ses gaz se sont résolues spontanément quand il a appris à se tourner sur le ventre, et il n'a jamais eu la moindre complication de sa maladie.
J'ai eu de nombreux doute : Tète-t-il efficacement ? L'hôpital m'avait mis en tête que le volume devait être surveillé. Mon lait est-il assez nourrissant ? En effet, c'est un gros mangeur, qui peut boire plus de 800 ml sur une journée de garde (rarement moins de 600) en plus d'au moins 4 grosses tétées sur la journée. Avec cet appétit on s'attendrait à ce qu'il grossisse plus que la moyenne, mais ce n'est pas le cas. J'ai fini par me dire que c'est ainsi. Après tout, il en est de même pour les adultes : certains vont manger plus que d'autres sans prendre plus de poids. Du moment que le bébé va bien, qu'importe la quantité ? En somme, ce qui nous a réussi, c'est essentiellement de faire confiance à ce super bébé.
Juillet 2024 : À partir de l'âge de 2 ans, les biberons de lait maternel ont été supprimés, et quelques mois après, les tétées aussi se sont espacées spontanément. Jusqu'au sevrage naturel, à 33 mois, quand mon bambin a voulu téter pour rigoler et a rapidement déclaré "y'a plus de lait !" d'un air très amusé. Avec une tétée de quelques secondes tous les 10/15 jours, c'était prévisible.
Ce qui est certain, c'est qu'au moins jusqu'à ce sevrage, nous n'avons eu aucune complication médicale. Peut-être que c'est l'allaitement, peut-être que c'est la chance, mais il est en bien meilleure santé que ce que l'équipe médicale nous avait prédit.
Merci pour ce témoignage mon bébé ebe vient d'être opéré il ya quelques jours et je m'inquiétais quant à la prise de poids. Je souhaite bcp de courage à toutes les mamans
Merci pour ce témoignage, mon fils est aussi porteur d'un hirshprung et votre témoignage me donne bcp d'espoir
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