Article paru dans Leaven, La Leche League International, 2005.
Le Body Art existe depuis presque aussi longtemps que l'allaitement maternel. Des tatouages ont été trouvés sur des restes datant de l'ère glaciaire et des momies égyptiennes.
L'allaitement maternel et le tatouage connaissent actuellement un regain de popularité. Plus de 20 millions d'Américains, dont la moitié sont des femmes, ont un ou plusieurs tatouages.
Les animatrices LLL qui accompagnent les mères qui allaitent remarquent une augmentation du nombre de contacts téléphoniques et de demandes d'aide par courrier électronique au sujet de la compatibilité des tatouages avec l'allaitement maternel.
Ni l'American Academy of Pediatrics ni l'American College of Obstetricians and Gynecologists ni l'American Academy of Family Physicians ni l'American College of Nurse-Midwives n'ont fait de déclaration sur le sujet. Cependant, les ouvrages The Breastfeeding Atlas et Maternal and Infant Assessment for Breastfeeding and Human Lactation indiquent tous deux que les tatouages déjà présents, sur le sein ou ailleurs, n'ont pas d'impact sur l'allaitement.
Le mot "tatouage" vient du mot tahitien tattau, qui signifie "marquer". Beaucoup de femmes marquent leurs corps avec des tatouages afin de célébrer des passages de la vie, des personnes spéciales, des lieux ou des choses dans leur vie. Le tatouage est également pratiqué pour revendiquer l'identité avec un groupe, pour des raisons spirituelles, d'embellissement et de statut social, ainsi que pour des raisons esthétiques (maquillage permanent) et pour camoufler des défigurations ou des cicatrices.
Les tatouages sont réalisés en injectant de l'encre dans l’épiderme (deuxième et troisième couches). Les tatoueurs utilisent une machine électrique à main munie d'aiguilles solides enduites d'encre. Les aiguilles pénètrent dans la peau des centaines de fois par minute jusqu'à une profondeur de quelques millimètres. Les encres qui sont utilisées dans les tatouages aux États-Unis sont soumises à la réglementation de la FDA (Food and Drug Administration) en tant que cosmétiques, mais aucune n'est approuvée pour l'injection sous la peau. Les personnes qui se font faire des tatouages doivent savoir que les encres utilisées par les tatoueurs n'ont pas l'approbation spécifique de la FDA pour le tatouage.
Le tatouage n'est pas sans risque
Il est important d'examiner attentivement le tatoueur et le studio de tatouage, en vérifiant auprès du service de santé local les lois et règlements locaux. Le tatouage est actuellement légal dans tous les États américains, à l'exception du Massachusetts, de l'Oklahoma et de la Caroline du Sud. Il est illégal dans quelques villes américaines. Il est également légal dans toutes les provinces du Canada. Cependant, la formation des artistes, la stérilisation des instruments et les inspections des studios dépendent des lois de l'État ou des provinces. 74 % des États américains exigent des licences, des enregistrements et/ou des permis. Les tatoueurs réputés suivront les précautions universelles telles que la stérilisation de la machine à tatouer à l'aide d'un autoclave ; encres, gobelets d'encre, gants et aiguilles à usage unique ; ensachage de l'équipement pour éviter la contamination croisée ; et lavage soigneux des mains avec du savon désinfectant.
Beaucoup, sinon la plupart des tatoueurs professionnels ne tatoueront pas une femme qui est enceinte ou qui allaite. Le tatoueur de renommée mondiale, Pat Fish, de Santa Barbara (Californie, États-Unis), dit : “Il y a toujours un élément de risque à se faire tatouer. Le tatouage pourrait avoir un effet négatif sur le système immunitaire de la mère qui pourrait être transmis au bébé.”
Pendant que le corps cicatrise après un tatouage – et produit du lait – et si le corps de la mère "rejette" le tatouage, la possibilité existe que cela puisse nuire au bébé. C'est particulièrement un problème si le client ne suit pas les instructions de suivi et développe une infection. Alex Stewart, d'un ancien site Web de parentage naturel au Royaume-Uni, suggère que les mères laissent à leur corps dix-huit mois pour récupérer complètement de l'accouchement avant de le soumettre à la cicatrisation d’un tatouage.
Les informations générales sur le tatouage s'appliquent également aux femmes qui allaitent. Selon la recherche, les infections locales et systémiques sont les risques les plus répandus. Des infections locales peuvent survenir. Les soins post-tatouage consistent à maintenir le tatouage propre avec de l'eau et du savon doux, à le garder à l'abri du soleil et à ne pas enlever les croûtes. Les infections systémiques se produisent lorsque les précautions universelles ne sont pas suivies par le tatoueur, et peuvent inclure des maladies telles que l'hépatite, le tétanos et le VIH.
Les lactariums n'acceptent pas les dons de mères qui se sont fait tatouer au cours des douze derniers mois, en raison de la possibilité de diverses infections causées par des pathogènes à diffusion hématogène. En 1985, les CDC (Centers for Disease Control) à Atlanta, en Géorgie, aux États-Unis, ont publié des directives nationales pour la protection pendant le processus de tatouage. Il n'y a jamais eu de cas enregistré d'infection par le VIH transmise par tatouage ; le dernier cas d'hépatite lié au tatouage a été signalé en 1950. En outre, selon un sondage informel et non publié fait par Mary Jozwiak, IBCLC, modératrice du magazine HipMama et e-zine, sur les mères tatouées ou percées, le risque de maladies transmissibles par le sang n'a pas été augmenté pour les mères qui ont été tatouées par un professionnel ayant suivi les précautions universelles.
La possibilité que l'encre migre dans le plasma sanguin de la mère et ensuite dans les cellules du sein qui produisent le lait est négligeable, selon Frank Nice, RPh.
Il est possible d'avoir des réactions allergiques aux encres de tatouage.
Est-il sans risque de se faire enlever un tatouage pendant l'allaitement ?
On estime que 50 % des personnes ayant des tatouages regrettent plus tard leur décision et souhaitent les faire enlever. La littérature médicale dit peu de choses sur la sécurité du détatouage pendant l'allaitement, mais l'information générale disponible s'applique toujours.
Le détatouage est maintenant réalisé en utilisant des lasers, en particulier des lasers à commutation Q. Le laser fonctionne en produisant de courtes impulsions de lumière intense qui traversent l'épiderme pour être absorbées par le pigment de tatouage dans le derme. L'énergie du laser provoque la fragmentation du pigment de tatouage en particules plus petites qui sont captées par le système immunitaire du corps et filtrées. Le processus d'élimination est sans effusion de sang, à faible risque, et a des effets secondaires minimes. Le même suivi que pour un tatouage s'applique à son retrait. Un analgésique léger, comme le paracétamol, est souvent prescrit pour la douleur, si nécessaire. Les effets secondaires possibles comprennent des changements de pigmentation, une infection locale et une possible réaction allergique aux particules d'encre qui circulent dans le système de la mère après un traitement au laser.
Les mères n'ont généralement aucun problème si elles suivent les procédures de suivi recommandées. Le corps filtre les particules d'encre via les globules blancs (macrophages et neutrophiles) et, selon le Dr Jack Newman, "il est douteux que le détatouage puisse influencer l'allaitement de quelque façon que ce soit". Quand il y a des inquiétudes au sujet d'un tatouage, la mère devrait consulter le tatoueur ou le dermatologue qui en a effectué le retrait. En cas d'urgence, elle devrait contacter son médecin immédiatement.
Il n'y a aucune preuve suggérant que les tatouages affectent la relation d'allaitement ou ont un effet sur le lait maternel. Indépendamment de leurs points de vue personnels sur les tatouages, les animatrices peuvent offrir des informations actuelles aux femmes qui s'intéressent aux tatouages.
Références
Cadwell, K. et al. Maternal and Infant Assessment For Breastfeeding and Human Lactation. Sudbury, Massachusetts: Jones and Bartlett, 2002 ; 74.
Kuperman-Beade, M., Levine, V., and Asinoff, R. Laser removal of tattoos. Am J Clin Dermatol 2001 ; 2(1) :21-25.
Martin, J. Is nipple piercing compatible with breastfeeding ? J Hum Lact 2004 ; 20(3) :319-21.
Millner, V. and Eichold, B. Body piercing and tattooing perspectives. Clin Nurse Res 2001 ; 10(4) :424-41.
Mothers Milk Bank San Jose. Donor FAQ 2004. [www.milkbanksj.org]
Newman, Jack, 2004. Personal communication.
Nice, Frank J., 2004. Personal Communication.
Wilson-Clay, B. and Hoover, K. The Breastfeeding Atlas, 2nd edition. Austin, Texas : LactNews Press, 2002 ; 146.
Traduction de l’article "Are Tattoos Compatibles With Breastfeeding", de Robyn Roche-Paull (San Diego, CA, USA) et Karen Spicer (British Columbia, Canada)
Leaven, vol. 41, n° 1, February-March 2005, p. 3-4.
Version française janvier 2018 par Vanessa Lasne, animatrice LLL France
Ce qu'en dit e-lactancia
Traduction de la fiche Tatoo
Faible risque pour l'allaitement
Modérément sûr. Probablement compatible.
Risque léger possible. Suivi recommandé.
Le tatouage doit répondre à toutes les normes de sécurité et d'hygiène connues afin d'éviter la transmission des infections par l'hépatite B, l'hépatite C et le VIH. Par mesure de sécurité, les banques de sang et de nombreux lactariums n'acceptent pas les dons de produits biologiques avant qu'une période de 4 à 12 mois ne se soit écoulée après le tatouage. Sur cette base, certaines autorités recommandent d'attendre la fin de l'allaitement pour se faire tatouer.
L'aluminium, le cadmium (jaune), le charbon (noir), le cinabre (rouge), le cobalt (bleu), le chrome (vert), le fer (brun), le magnésium (violet), le mercure (rouge), le titane (blanc), le zinc (blanc), le plastique et le formaldéhyde sont quelques produits utilisés comme colorants et pigments pour le tatouage.
Bien que les colorants et les pigments utilisés pour le tatouage puissent présenter un risque de toxicité, ils sont conservés sous la peau, ce qui les empêche de pénétrer dans la circulation sanguine. C'est la raison pour laquelle un ancien tatouage ou un nouveau tatouage effectué pendant l'allaitement n'est pas contre-indiqué, à condition que les meilleures normes de sécurité et d'hygiène soient respectées pour garantir la prévention de la transmission des maladies infectieuses.
Les crèmes utilisées à des fins anesthésiques, antiseptiques ou anti-inflammatoires avant ou après le tatouage sont compatibles avec l'allaitement, de même que le paracétamol ou l'ibuprofène utilisés pour soulager la douleur.
Les tatouages sur le mamelon sont à éviter car ils présentent un risque d'ingestion de colorants qui peuvent être toxiques.
Dissimuler un tatouage avec du maquillage ou une couverture est compatible avec l'allaitement. L'enlèvement par rayons laser peut désagréger les pigments du tatouage qui passent dans la lymphe et le sang et seraient excrétés dans le lait maternel ; c'est une raison pour attendre prudemment, selon le colorant à enlever, que l'allaitement soit terminé.
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