Texte original de Jayne Joyce, animatrice LLL pour LLL Grande-Bretagne, 2017, Fat content of breastmilk
Traduit par Julie Hamdan, animatrice LLL France, DIULHAM, IBCLC, et Vanessa Lasne, animatrice LLL France, IBCLC.
Dernière mise à jour avril 2024.
Une connaissance partielle peut être dangereuse. Cela n'a jamais été aussi vrai que dans le débat actuel sur les laits de début et de fin de tétée et leur impact sur l'allaitement. Les malentendus autour de ces concepts ont causé de l'anxiété, de la contrariété et ont même conduit à des problèmes d'allaitement et à des sevrages prématurés. (Nancy Mohrbacher, animatrice LLL, IBCLC, membre d’ILCA, Worries About Foremilk and Hindmilk)
Qu'est-ce qui détermine la teneur en graisses du lait maternel ?
La teneur moyenne en graisses du lait humain est relativement constante, car les graisses sont synthétisées dans la glande mammaire.
La teneur en matières grasses au cours d'une tétée est déterminée par le degré de remplissage du sein. La teneur en matières grasses augmente progressivement au fur et à mesure que le sein est drainé, les globules graisseux étant "poussés" hors du sein par les réflexes d’éjection successifs.
Un intervalle plus long entre deux tétées implique une teneur initiale en graisses plus faible au début de la tétée suivante, car les graisses adhèrent aux alvéoles et canaux lactifères tandis que la partie aqueuse du lait reste mobile dans le sein entre les tétées. Par conséquent, la teneur en matières grasses au début d'une tétée peut être différente de la teneur en matières grasses au début de la tétée suivante. Plus l'intervalle entre les tétées est long, plus la réduction de la teneur en graisses dans le lait obtenu par le bébé est importante entre la fin d'une tétée et le début de la suivante.
La durée de la tétée n'a pas d'importance : certains bébés prennent une tétée complète en 4 minutes de chaque côté, tandis que d'autres mettent 40 minutes (note de la traductrice : les deux seins compris) pour obtenir la même quantité. En aucun cas, la quantité de graisses obtenue par le bébé ne peut être déterminée par la durée de la tétée, mieux vaut donc laisser le bébé décider de la durée de son repas.
Qu'est-ce que la surcharge en lactose ? (parfois connue auparavant sous le nom de "déséquilibre lait de début/lait de fin de tétée")
Les concepts de "lait de début de tétée" et "lait de fin de tétée" sont incorrects, c’est-à-dire qu’il ne s'agit pas de différentes sortes de lait. Ces appellations décrivent simplement la façon dont la teneur en graisses du lait maternel augmente au fur et à mesure que le sein se vide. Le terme “lait de début de tétée” renvoie au lait disponible au début de la tétée, celui de “lait de fin de tétée” correspondant au lait qui peut être exprimé à la fin de la tétée. Le lait de début de tétée n'est pas nécessairement "pauvre" en matières grasses, car cela dépend du temps écoulé depuis la dernière tétée (ndlt : et du degré de remplissage du sein).
Les graisses du lait maternel ralentissent le transit du bébé. Si un bébé boit beaucoup de lait relativement pauvre en matières grasses, celui-ci peut passer dans l'intestin plus rapidement, entraînant un dépassement des capacités du bébé à digérer le lactose (sucre du lait). Une fermentation dans l’intestin et des symptômes digestifs peuvent alors se produire.
Comment savoir si un bébé souffre d'une surcharge en lactose ?
Les symptômes sont spécifiques : selles vertes, mousseuses, explosives, gaz (flatulences) en grande quantité et douleurs importantes (cris, pleurs fréquents et prolongés) (ndlt : le tout chez un bébé qui prend du poids de manière rapide, voire explosive). Un bébé confortable qui a des selles jaunes n'a pas de problème avec la teneur en matières grasses du lait !
Il existe d’autres causes aux selles vertes, notamment un apport total en lait insuffisant, une maladie, des effets secondaires liés à des médicaments ou supplémentations (ndlt : vitaminiques), une allergie, etc. Des selles vertes seules, sans gaz ni douleur, n’évoquent pas une surcharge en lactose. Chez un bébé épanoui et confortable, des selles vertes occasionnelles peuvent être ignorées sans crainte.
Que faire face à une surcharge en lactose ?
Optimiser la prise du sein en bouche par le bébé, en faisant en sorte qu’il attrape une grosse bouchée de sein, et laisser le bébé téter aussi longtemps qu'il le souhaite sur chaque sein peut suffire à améliorer la situation.
Le positionnement de la maman en position semi-inclinée en arrière, la tête du bébé au-dessus du sein, ou encore allongée sur le côté, peut aider le bébé à gérer un flux de lait rapide.
Des tétées plus fréquentes peuvent aider le bébé à absorber des quantités plus facilement gérables à chaque prise. Cela peut lui éviter de recevoir en une fois un volume important de lait relativement "pauvre en graisses", qui dépasserait ses capacités de digestion.
Peut-il être approprié de limiter un bébé à un seul sein par tétée ?
IMPORTANT : La conduite habituelle de l’allaitement consiste à laisser le bébé prendre autant de lait qu'il le souhaite sur le premier sein, puis à lui proposer le suivant. La majorité des bébés ont besoin des deux seins, au moins pour une partie des tétées. Le fait de refuser délibérément le deuxième sein est une stratégie qui réduit la production de lait, en laissant chaque sein non drainé pendant une période plus longue (et donc en diminuant la stimulation). Limiter un bébé à un seul sein par tétée est indiqué uniquement s’il est clairement établi que la mère a une surabondance de lait (hyperlactation) :
- Le bébé a manifestement du mal à gérer le flux de lait : il avale de travers, recrache du lait pendant la tétée, se retire du sein lors du réflexe d’éjection, pleure, est inconfortable. Il présente les symptômes d'une surcharge en lactose : selles vertes, mousseuses, explosives, gaz importants, douleur significative.
- Des mesures visant à aider le bébé à gérer le flux de lait ont été essayées, mais la situation ne s'est pas améliorée.
- ET le bébé a une prise de poids importante : gain d'au moins 340-450 grammes par semaine (ndlt : le gain pondéral moyen habituellement attendu durant les premières semaines de vie est de 175 à 245 grammes par semaine) ; courbe de poids qui change de couloir en franchissant les lignes de percentile vers le haut.
ATTENTION : un bébé fragilisé (prématuré, malade, avec un frein de langue restrictif, etc.) peut ne pas être en mesure de gérer un débit de lait normal ; ce bébé a besoin de plus de soutien, pas de moins de lait !
Quelles sont les implications pour un bébé dont la croissance est lente ?
Lorsque la prise de poids est inférieure aux paramètres attendus, et que la présence d’un autre problème de santé a été écartée, c’est le volume global de lait reçu par le bébé qui est insuffisant, et non la quantité de graisses (à moins qu'il ne présente également les symptômes spécifiques d'une surcharge en lactose : selles vertes, mousseuses, explosives, gaz et douleurs importantes).
Refuser le deuxième (et le troisième, le quatrième...) sein à ce bébé reviendrait à compromettre encore davantage la production de lait et la quantité reçue par le bébé.
Le soutien à l’allaitement s’attache alors à optimiser l’efficacité de l'extraction du lait (prise du sein en bouche et/ou expression du lait par d’autres moyens), la conduite de l’allaitement (fréquence des tétées et/ou expressions) et, si nécessaire, à augmenter la production de lait afin de fournir du lait supplémentaire à l'enfant.
Tout bébé dont la croissance est plus lente qu’attendu devrait être suivi par un médecin.
Qu'entendez-vous par "globalement la même" ?
La composition change bien au cours de la tétée et selon les tétées, mais pas de la façon mécanique et simpliste dont on en parlait avant : lait aqueux de début de tétée et lait gras de fin de tétée.
Je ne peux que vous renvoyer à l'article ci-dessus. C'est justement pour clarifier les choses que nous l'avons écrit.
Bonjour ,
Je suis puéricultrice depuis 7 ans et jai toujours appris que la composition du lait de mère variait au cours de la tétée. Sabord une phase d'hydratation sucrée, puis protidique nfin lipidique.
Une amie ayant accouché d'une petite fille depuis 4mois, m'indique que plusieurs consultantes en lactation auraient déclaré que la teneur en lipides n'est pas seulement à la fin.
Dans votre article je lis que cela dépend si la maman a donné le sein récemment ou pas et si le sein est bien rempli.
Pouvez-vous me confirmer que sa composition est globalement la même au cours de la tétée?
Merci par avance pour vos précieux conseils,
Belle journée à vous,
Maroussia
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