Publié dans le n° 45 des Dossiers de l'allaitement, de Charlotte BODEVEN-CHARLES – Consultante en Lactation IBCLC – Formatrice à LLL France Formation – Intervention présentée au Congrès LLL France des 16 et 17 octobre 1999
Avec l'annonce « C'est un garçon » ou « C'est une fille » surgissent chez les nouveaux parents des émotions indescriptibles. On sèche le bébé, on vérifie rapidement son état clinique, et on le pose sur sa mère. Les parents vont faire connaissance avec leur bébé, l'enfant va découvrir ses parents. Durant cette « rencontre du troisième type », il se produit toute une cascade d'événements psychologiques, sensoriels, physiologiques et immunologiques. Il est nécessaire que chaque membre de l’équipe œuvre pour que cette reconnaissance se déroule aussi harmonieusement que possible.
Un « rendez-vous amoureux »
C'est un rendez-vous amoureux, mais ce n'est pas toujours un coup de foudre. Souvent, les mères sont déçues quand l’amour maternel ne surgit pas immédiatement à la naissance. Ce sentiment est plus susceptible d'être retardé si :
- les membranes ont été rompues artificiellement,
- le travail a été long et pénible,
- la mère a reçu des doses importantes d’analgésiques
C'est une rencontre qui nécessite un minimum d'intimité. De nombreux parents ont pu noter que cet amour s'est installé une fois qu'ils ont pu bénéficier de cette intimité. La présence de trop nombreuses personnes durant le travail et la délivrance peut être extrêmement dérangeante pour les parents, et peut interrompre le processus psychologique naturel qui se déroule : la création du lien entre les parents et leur enfant.
Les acteurs du rendez-vous
La mère et l'enfant vont mettre en jeu de nombreuses ressources intérieures durant ces premiers moments. Le père prend aussi sa place en permettant à la mère et à l'enfant de se rencontrer tranquillement. Les parents doivent préparer cette rencontre en en discutant entre eux, puis avec les membres de l’équipe soignante. C'est le père qui aura pour mission de faire respecter les choix du couple autant que faire se peut.
La plus importante tâche des professionnels de santé, durant ces premiers moments, est de permettre la mise en place du lien, en se gardant de toute interférence non absolument indispensable.
Le comportement du bébé
L'odeur du mamelon guide le nouveau-né au sein. Si un sein est lavé au savon et à l'eau, l'enfant se dirigera vers l’autre sein. Le bébé a une capacité remarquable à se diriger vers le sein, à le prendre et à téter, si on le laisse tranquillement sur le ventre de la mère. Dans une étude sur les naissances à domicile, la sage-femme Raven Lang a observé que les bébés à qui l'on proposait le sein ne le prenaient pas toujours ; l'action la plus habituelle du bébé était de lécher le mamelon. Il faut un certain temps, lors d'un accouchement non médicalisé, pour que l'enfant prenne le sein (en général dans les deux heures qui suivent la naissance). Il y a tout un cheminement qui doit être effectué par l'enfant.
Une étude suédoise a retrouvé le même comportement chez des enfants nés à l'hôpital. Cette étude insiste particulièrement sur le fait que les bébés placent leur langue contre le palais dur lorsqu'ils pleurent, probablement pour prévenir l'obstruction de la trachée pendant la phase inspiratoire. Les auteurs suggèrent qu’un enfant dont la tête a été manipulée dans le but de « l'aider » à prendre le sein peut, éventuellement, plaquer sa langue contre son palais dans un but de prévention similaire. Ils recommandent qu'on laisse les bébés chercher et lécher le sein en paix, et d'attendre qu'ils prennent le sein d'eux-mêmes.
D'autres chercheurs suédois ont noté que si les lèvres de l'enfant touchaient le mamelon durant la première heure, la mère était plus susceptible de garder son bébé avec elle qu'une mère qui n'a pas eu ce contact. De nombreuses études ont montré que, si l'enfant prenait le sein pendant la première heure de vie, cela augmentait le taux de réussite de l’allaitement et sa durée. Des auteurs ont constaté que le contact mère-enfant peau à peau pendant les premières 90 minutes abaisse considérablement la durée des pleurs par rapport à ce qui est enregistré chez des bébés enveloppés dans une couverture et placés dans un berceau.
Le comportement de la mère
Le comportement de la mère va évoluer pendant les premiers jours. Reva Rubin a observé des mères et leur bébé pendant trois jours, et a constaté que le comportement des mères changeait au fur et à mesure qu'elles s'habituaient à leur bébé. Une étude a noté que, en milieu hospitalier, les mères commençaient par explorer du bout des doigts les bras et les jambes de l'enfant, puis passaient à un massage léger de la tête et du corps avec les paumes des mains. Dans l'étude de Raven Lang sur les naissances à domicile, l’auteur a observé que les mères frictionnaient leur bébé du bout des doigts, en commençant par le visage, et ce avant la délivrance et la première tétée.
« Je ne peux trouver les mots pour expliquer quelles forces importantes sont au travail à ce moment critique. C'est une chose très curieuse qui se passe : la mère qui est peut-être épuisée physiquement, qui est dépendante des infirmières et du médecin pour des soins qualifiés, est en même temps la personne qui peut introduire le bébé dans le monde, d'une façon qui ait du sens. Elle sait comment le faire, pas à cause d'une préparation quelconque, ni en étant habile, mais juste parce qu'elle est la mère. Ses instincts naturels peuvent changer si elle a peur ou si elle ne voit pas son bébé ou si on le lui amène à des moments prévus à l'avance pour les tétées. ÇA NE MARCHE PAS DE CETTE FAÇON. » (Winnicott)
Il est important que la mère et l'enfant cohabitent. Une étude a noté une augmentation de la prévalence de l'allaitement et une diminution des appels téléphoniques de demande d’aide par la mère après le retour au domicile lorsque la mère et l’enfant cohabitaient après la naissance. Une étude suédoise a montré que les mères qui cohabitaient avec leur enfant étaient plus sensibles aux cris de leur bébé. Une étude thailandaise a constaté une prévalence plus basse d’abandons d'enfants restés avec leur mère dès la naissance. Le temps passé ensemble durant les premiers jours a des conséquences sur la qualité des soins donnés à l’enfant et sur le risque de maltraitance et d’abandon, tout particulièrement chez les mères socio-économiquement défavorisées.
Le comportement du père
Ces premiers contacts sont aussi importants pour les pères. Si on leur permet de rester avec leur bébé et de le toucher, ils s’impliqueront ensuite davantage dans les soins à l’enfant. Dans le service de maternité de deux hôpitaux suédois (Göteborg), les pères peuvent prendre leur enfant après une naissance par césarienne (quand la mère n'est pas en état de le faire), juste après la naissance, pour maintenir l'enfant au chaud. Le comportement de ces pères avec leur enfant, trois mois plus tard, était différent de celui des pères dont le bébé avait été mis en incubateur.
Les routines hospitalières
Les membres de l’équipe doivent effectuer un examen clinique rapide mais complet ; ils devraient avoir un comportement efficace, mais le plus discret possible.
- Vérifier l'Apgar.
- Sécher l'enfant et le couvrir (l’hypothermie peut induire des problèmes en cascade). Le contact peau à peau avec la mère constitue le moyen le plus efficace de réchauffer l’enfant. Si nécessaire, réchauffer la mère avec un radiant ou une couverture.
- L'aspiration gastrique perturbe la succion. Une étude suédoise a comparé 10 bébés qui n'ont pas été aspirés et 11 bébés qui ont été aspirés délicatement sur le ventre de leur mère 5 minutes après la naissance. Ces 11 bébés présentaient une perturbation de la séquence comportementale qui amène l’enfant à prendre spontanément le sein. Par ailleurs, le contenu gastrique a une utilité métabolique (aide au maintien de la glycémie). L’aspiration peut induire des fissures ou une inflammation des parois de l'œsophage (50 % des bébés). Elle ne résout pas la question des glaires bronchiques, qui vont remonter dans les 48 heures qui suivent. Si l'enfant est encombré, on peut se contenter de dégager sa bouche et sa gorge.
- L'atrésie œsophagienne est rare (1/4000), et dépistée par échographie, ou soupçonnée devant un hydramnios ou un bébé qui « mousse ». En cas de doute, donner du colostrum à la seringue représente un excellent test. C’est un liquide physiologique, et une fausse route est sans danger : il est rapidement résorbé par l'arbre respiratoire. L'atrésie des choanes est exceptionnelle. L'enfant a généralement un Apgar bas et d’importantes difficultés respiratoires. Il ne peut téter ni le sein, ni quoi que ce soit d’autre.
- L’instillation d’un collyre antibiotique ne devrait être faite immédiatement que s'il y a un risque connu de gonorrhée, ce qui est rare. Elle peut provoquer un blépharospasme (spasme du bord libre de la paupière) qui perturbera le contact visuel mère-enfant. Le don de vitamine K, la pesée, les mensurations, le bain… peuvent être faits plus tard.
La reconnaissance
À la naissance, l'enfant va être dans une phase d'éveil tranquille de 45 minutes en moyenne. Dans ce stade, l'enfant démontre diverses capacités sensorielles et motrices, et leur expression va provoquer des réactions chez ses parents. Ces réactions mutuelles sont une récompense pour chacun des acteurs, et les encouragent à continuer le dialogue.
Le contact visuel
Les parents cherchent spontanément à capter le regard de leur enfant, et celui-ci est attiré par le visage et les yeux de ses parents. Les nourrissons montrent une préférence marquée pour les visages. Leur vision est la meilleure à environ 25 cm. C'est à cette distance qu'ils voient le visage de leur mère lors d'une tétée. Ils ont une bonne capacité à focaliser sur des objets lorsqu'ils sont dans un état de veille calme. Dans l'étude de Raven Lang sur les naissances à domicile, les mères prenaient leur bébé et le tenaient en face d’elles immédiatement après la naissance et avant la délivrance.
La voix
L'enfant se tourne vers une source de bruit. Il est très sensible aux voix humaines. Les nouveau-nés préfèrent les voix haut perchées, et beaucoup de parents, dans de nombreuses cultures, utilisent ce type de voix quand ils parlent pour la première fois à leur bébé après la naissance. Des études ont montré qu'un nouveau-né préfère la voix de sa mère à celle d'une autre femme. Par contre, juste après la naissance, il ne montre pas de préférence pour la voix de son père par rapport à celle d'un autre homme. Il lui faudra un peu plus de temps pour reconnaître la voix de son père. La mère peut, quant à elle, reconnaître les vocalisations de son enfant un ou deux jours après la naissance. Les enfants se souviennent également des histoires ou des musiques qu'ils ont entendues de façon répétée pendant la grossesse.
La voix de sa mère induit des réactions chez le bébé. Le fait d'entendre pleurer son enfant induit aussi des réactions physiologiques chez la mère. Une étude a montré que 90 % des mères présentaient une importante augmentation de l’afflux sanguin mammaire lorsqu'elles entendaient des pleurs d'enfants (constaté par thermographie).
Odeur et toucher
L'odorat et le toucher sont les premiers moyens par lesquels une mère reconnaît son enfant. Il semble que cette reconnaissance fonctionne comme si elle laissait de côté la logique et la raison pour permettre à la mère d'appréhender son bébé à un niveau plus profond et plus primitif. En outre, le fait d'être touché par ses parents et d'être au contact de sa mère permet à l'enfant d'être colonisé par les germes familiaux.
Une mère est capable de reconnaître à l’odeur son bébé parmi d'autres enfants dès J1, si elle a eu contact avec lui ne serait-ce que pendant une heure. De son côté, un bébé âgé de 6 jours peut distinguer à l'odeur le lait de sa mère de celui d'une autre femme. La mère reconnaît aussi son enfant par le toucher. Dans une étude, 24 heures après la naissance, des mères qui avaient passé plus d'une heure avec leur enfant et à qui on avait bandé les yeux et supprimé les autres sens (odorat et ouïe) pouvaient reconnaître leur enfant en touchant le dos de la main des bébés qui leur étaient présentés.
Le climat hormonal
Le fait d'allaiter l'enfant ou de lui permettre de lécher le mamelon entraîne une libération d'ocytocine. Cette dernière induit des contractions utérines, ce qui abaisse le risque d’hémorragie. Par la suite, voir l’enfant, l’entendre pleurer, voire simplement penser à lui, pourra déclencher le réflexe d'éjection du lait. L'ocytocine a un effet calmant sur la mère ; elle abaisse le taux des hormones de stress. L'ocytocine favorise également la création du lien mère-enfant, raison pour laquelle on l'appelle l'hormone de l’amour.
Chaque fois que l'enfant tète, le taux sérique maternel de prolactine augmente (cet effet est également obtenu avec toute stimulation mammaire). Ces pics de prolactine stimulent la production lactée. D'autre part, chaque fois que l'enfant tète, on constate la sécrétion d’une bonne vingtaine d'hormones gastro-intestinales chez la mère et l'enfant. Ces hormones stimulent la maturation intestinale de l'enfant, et augmentent l’efficacité du métabolisme maternel.
L'imitation
Si une mère regarde son bébé et lui tire la langue, le nouveau-né, après 30 ou 45 secondes, va commencer à tirer la langue. Winnicot observe que les mères sont le miroir du bébé et passent beaucoup de temps, dans les premiers temps, à imiter leur bébé. Il commente : « Que voit le bébé quand il regarde le visage de sa mère ? Je suggère qu'ordinairement, ce que le bébé voit, c'est lui-même. » Ainsi, la mère et le bébé s'imitent mutuellement.
Faciliter la reconnaissance
Marshall Klaus s'est posé la question de l'importance des premières heures de vie et des premières interactions parents-enfant. Il est évident que même les parents qui ne bénéficient pas de ces premières interactions arrivent à créer des liens. Les êtres humains ont d’importantes facultés d'adaptation. Mais quand on ne respecte pas ce qui se passe pendant ces premiers instants, la création du lien parents-enfant sera plus difficile, surtout pour les parents qui ont de faibles capacités d'adaptation : les mères célibataires, celles qui ne bénéficient d’aucun soutien, les mères adolescentes... Pour ces mères, le respect de cette période est encore plus crucial que pour les autres.
Ce qui se passe pendant les premières 24 heures
Il faut bien reconnaître que, pour de nombreuses mères, le démarrage de l’allaitement s’apparente à un parcours du combattant. Si tout apprentissage présente des difficultés, il n'est pas normal d’assister à des « chemins de croix ». Il est indispensable d’informer les parents sur ce qu'il est normal de vivre pendant la première semaine. Cela implique que les professionnels sachent quelles informations donner, et quelles conduites pratiques encourager.
Le comportement de l'enfant
Lorsque l’enfant est laissé à sa mère après la naissance, le nouveau-né allaité présente un schéma de sommeil spécifique. De la naissance à 2 heures, il est généralement éveillé et avide de contacts. Entre 2 et 20 heures, l’enfant alternera les épisodes de sommeil léger et de sommeil profond. Entre 20 et 24 heures, il présentera un état d’éveil croissant, pouvant comporter 5 à 10 épisodes de tétée sur une période de 2 à 3 heures. Surviendra ensuite une nouvelle période de 4 à 5 heures de sommeil profond.
Après un accouchement à domicile (ou en maternité et non médicalisé), cette période de tétées fréquentes peut survenir dans les 2 heures qui suivent la naissance. Ensuite l'enfant va dormir 4 à 5 heures. Après cela, il tètera souvent, mais avec un espacement plus régulier des tétées. Après un accouchement médicalisé en milieu hospitalier, on observera souvent une alternance de sommeil léger et profond entre 2 et 20 heures de vie, puis une augmentation importante du niveau d’éveil avec tétées fréquentes entre 20 et 24 heures de vie, suivie de 4 à 5 heures de sommeil profond.
Pourquoi ces différences ? Le comportement de l'enfant est modifié par les analgésiques et les anesthésiques très souvent administrés pendant le travail en milieu hospitalier. Ces produits peuvent induire des problèmes d'allaitement en désorganisant la succion du bébé et sa coordination motrice générale. Sepkoski (1992) et ses collègues ont découvert que les bébés des mères ayant eu une péridurale étaient moins éveillés et moins organisés que les bébés de mères qui avaient accouché sans analgésiques. Ces différences pouvaient perdurer durant tout le premier mois de vie. Righard et Alade (1990) ont constaté que les problèmes de succion sont plus fréquents chez les bébés des mères ayant reçu de la péthidine pendant leur travail que chez les bébés ayant eu une naissance sans péthidine. Nissen (1995) a conclu que le fait de recevoir de la péthidine diminuait et retardait le réflexe de fouissement et le réflexe de succion du bébé. Crowell et son équipe (1994) ont observé que la première tétée efficace était retardée de plus de 11 heures en moyenne chez les mères ayant eu du butorphanol ou de la nalbuphine pendant le travail, par rapport à des mères n'ayant eu aucun analgésique. D'autres études le confirment.
Parents et soignants devraient donc être conscients qu’un bébé né sous analgésiques posera davantage de problèmes, et qu’il faudra être plus patient ; le démarrage de l’allaitement devra être suivi de beaucoup plus près. En 1995, en France, 50 % des enfants naissaient sous péridurale et 6 % sous anesthésie générale. Ces enfants auront besoin d'être stimulés. Or, le bébé est souvent séparé de sa mère la première nuit. En outre, s’il dort, on le laisse « tranquille » le premier jour. À J3, les conséquences en sont un engorgement mammaire, une perte de poids importante de l’enfant, et le découragement de la mère.
Quelques considérations physiologiques
Le volume de l'estomac du bébé est de 5 à 7 ml. La plupart des bébés commencent à éliminer le méconium. Tant que la mère ne produit que du colostrum, le bébé ne mouillera qu'une à deux couches par jour. Le volume de la sécrétion lactée est, d’après une étude, de 25 à 56 ml/jour. La mère sécrète du colostrum, un concentré de substances nutritives et immunologiques. Il n'est pas très abondant, mais le fait de ne pas avoir l’estomac rempli encourage le bébé à téter fréquemment. En outre le colostrum a un effet laxatif.
Démarrage de l’allaitement
La mère devrait être informée de ce qu'est une mise au sein correcte. Elle doit être rassurée sur la sensibilité des mamelons les premiers jours, sensibilité qui devrait disparaître rapidement si l'enfant prend correctement le sein. On peut montrer à la mère les signes qui montrent que son bébé tète efficacement. L'enfant devrait passer la majeure partie de son temps dans les bras de sa mère ou près d’elle, 24 heures sur 24. La mère devrait être informée et rassurée sur la normalité des tétées « anarchiques ». Un minimum de 8 tétées efficaces devrait être considéré comme la norme.
Si un bébé est somnolent ou ne s'intéresse pas au sein les premiers jours, il est utile de suggérer à la mère de stimuler son bébé pour qu'il tète au moins 8 fois par 24 heures. Elle peut essayer de le réveiller quand il est dans une période de sommeil léger (mouvements rapides des globes oculaires sous les paupières closes, mouvements des bras et des jambes, mouvements de succion…).
Quand les tétées sont fréquentes et anarchiques en fin de soirée, la mère peut penser que son enfant a faim et qu’elle manque lait. On peut lui dire que cette période de tétées fréquentes correspond à un repas de 2 à 3 heures où chaque tétée représente un plat. Souvent cet épisode de tétées rapprochées survient durant la nuit ou aux petites heures du matin. Or on dit souvent à la mère de mettre son bébé en nurserie pour « se reposer ». Mais la mère est souvent bien éveillée la nuit qui suit l’accouchement, en raison du bouleversement hormonal que consitue la naissance. Il sera préférable de lui conseiller de se reposer pendant les phases de sommeil profond de son bébé. Attention aux visites, parfois très nombreuses, qui empêchent ce repos nécessaire.
Il est nécessaire d’expliquer à la mère que les tétées fréquentes (8 à 12 par 24 heures) sont importantes pour son bébé :
- Elles sont une bonne prévention de l’ictère. Elles stimulent le péristaltisme intestinal, ce qui permet l'élimination rapide de la bilirubine.
- Elles sont une excellente prévention de l'engorgement.
- Elles facilitent l’établissement d’une sécrétion lactée abondante chez la mère, et d’une bonne coordination succion-déglutition-respiration chez le bébé.
- Elles permettent à l'enfant de bénéficier au maximum des avantages immunologiques du colostrum.
- Elles aident à contrôler les pertes de sang maternelles en améliorant la tonicité utérine.
J2 (de 24 à 48 heures)
Le comportement de l'enfant
Il est normal pour un bébé de vouloir téter longtemps et souvent au cours des premiers jours. Lorsque l'allaitement se fait à la demande, de nombreuses mères constatent que leur enfant tête une heure ou deux, dort durant une heure ou deux, puis recommence jusqu'à ce que la production lactée augmente D'autres bébés tèteront plus souvent et moins longtemps (Frantz 1983). Kittie Frantz indique que, juste avant la montée laiteuse, les enfants sont « des téteurs acharnés » (Frantz 1999, conférence LLLI).
Ruth Lawrence a classé les bébés en différentes catégories :
- Les barracudas : ils prennent bien le sein et tètent très vigoureusement pendant 10 à 20 minutes. Ils sont rapides et efficaces.
- Les excités inefficaces : ils sont très excités et très actifs au sein, et passent leur temps à l'attraper et à le perdre. Puis ils se mettent à pleurer. Il faut alors calmer l'enfant avant de le remettre au sein.
- Les temporisateurs : ils remettent souvent au 4ème ou 5ème jour ce qu'ils auraient pu faire dès le début. Ils attendent que le lait « monte ». Il ne faut pas les brusquer.
- Les gourmets : ils commencent par goûter le sein, prennent un peu de lait, font claquer leurs lèvres avant de commencer à téter. Il ne faut pas les bousculer, sinon ils se mettent à hurler.
- Les grignoteurs : ils tètent quelques minutes, puis se reposent quelques minutes. Si on accepte leur rythme, ils vont téter efficacement, mais le repas prendra beaucoup de temps. Les bousculer est totalement inutile.
Quelques considérations physiologiques
Le volume de l'estomac du bébé est de 10 à 13 ml. De nombreux bébés n'auront pas de selles. Ceux qui en ont continuent à éliminer le méconium. Ces selles sont mélangées, plutôt méconiales. Si le bébé tète souvent et efficacement, il urinera régulièrement. Si la production lactée maternelle est encore basse, il n'aura qu'une à deux couches mouillées. L'augmentation de la sécrétion devrait débuter si l'enfant tète fréquemment. Le volume constaté dans une étude sur la sécrétion lactée est de 113 à 185 ml.
Qu'ils soient allaités ou nourris au lait industriel, les nouveau-nés ont tendance à perdre du poids les 3 ou 4 premiers jours, en raison de l’élimination des liquides excédentaires et du méconium. Une perte de poids de 5 à 7 % est normale. Une étude révèle que les bébés des mères bien informées sur l'allaitement ont rarement perdu plus de 7 % de leur poids de naissance. Bien qu'une perte de poids de 10 % soit considérée comme acceptable, cela peut indiquer que l'allaitement démarre mal, et que la mère a besoin d'un soutien accru.
Si l'on n'observe pas de selles et/ou très peu d'urines, si le bébé semble avoir un problème, la supplémentation avec du lait maternel exprimé peut être envisagée. La plupart des problèmes se résolvent avec le temps, mais un nouveau-né ne devrait pas être laissé à jeun pendant une longue période. L'enfant né à terme dispose de réserves de liquides extracellulaires. Mais après un ou deux jours sans recevoir de nutriments, l'enfant peut se déshydrater. Si l'enfant ne prend pas le sein pendant 12 heures, il faut évaluer la situation.
J3 (de 48 à 72 heures)
À J3/J4, l'enfant placé entre les seins de sa mère montre le même type de comportement destiné à l’amener à prendre le sein qu'à la naissance. Mais l'enchaînement de ces comportements est beaucoup plus rapide. S'il a eu accès librement au sein, l'enfant est devenu très efficace pour téter et cette journée devrait bien se passer. 8 à 12 tétées par 24 heures représentent la norme.
Le volume de l'estomac du bébé est de 22 à 27 ml. La plupart des bébés auront plusieurs selles. L'émission régulière de selles est un bon indicateur de l'adéquation des rapports caloriques du bébé. Les selles sont mélangées, de couleur jaune-vert. La plupart des bébés urineront régulièrement. La sécrétion lactée augmente rapidement et atteint généralement 200 ml sur la journée. C'est un jour où la mère est souvent fragile sur le plan émotionnel (baby-blues).
Le déroulement de l’allaitement
Encourager la mère à faire téter son bébé fréquemment. Si le bébé ne tète pas régulièrement, la stase du lait peut commencer à compromettre la synthèse du lait. La mère peut débuter un engorgement qui doit être traité rapidement.
Un sein ou les deux ? La mère donnera à son bébé le premier sein jusqu'à ce qu'il semble repu ; elle peut ensuite lui faire faire un rot, changer sa couche, et lui proposer le second sein.
J4 (de 72 à 96 heures)
Le cap « difficile » est généralement passé. Le bébé se met à téter sur un rythme plus régulier, plus prévisible. Il commence à reprendre du poids, la mère se rassure. Le volume de l'estomac du bébé est de 36 à 46 ml. Le bébé doit avoir 2 à 5 selles par 24 heures, et mouiller 5 à 6 couches. Les selles sont jaune d'or plus ou moins clair. La sécrétion lactée atteint ou dépasse 400 ml/jour.
En cas de problème, la mère tirera son lait pour le donner à son bébé et la situation sera étudiée de près pour détecter la cause du problème et y remédier au plus vite.
J5 (de 96 heures à 120 heures)
Le volume de l'estomac du bébé est de 43 à 57 ml. Il continue à reprendre du poids. Le bébé doit avoir 2 à 5 selles par 24 heures et mouiller 5 à 6 couches. Les selles sont jaune d'or. La sécrétion lactée atteint ou dépasse 600 ml/jour.
À ce stade, soit les choses se passent bien (tétées, urines et selles régulières), soit il est évident qu'elles vont mal (bébé ictérique, léthargique…) et il est vraiment urgent de remédier au problème.
En conclusion
Marshall Klaus, dans son livre « Bonding », propose les recommandations suivantes.
La première heure. Tout de suite après la naissance, le bébé devrait être séché soigneusement, et il faudrait lui mettre un bonnet. Une fois que le bébé est rose et actif (plus de 90 % des bébés arrivent à ce stade dans les quelques minutes qui suivent la naissance), il faudrait l’installer confortablement avec ses parents, d'une manière qui lui assure un réchauffement continu. L'enfant maintiendra bien sa température s'il est placé en contact peau à peau avec sa mère et couvert avec un drap chaud et sec ou une couverture légère, ou avec un dispositif chauffant au dessus d'eux. Après la délivrance et les éventuelles sutures, les parents devraient pouvoir passer au moins une heure à faire connaissance avec leur bébé. Cette période devrait être organisée de façon à respecter l'intimité des parents et de leur bébé. Tomber amoureux de son bébé ne peut se faire dans une pièce pleine d'agitation et de monde.
Laisser le bébé trouver le sein. Si la mère a décidé d'allaiter, même pour une courte période, demander aux parents s'ils souhaitent permettre au bébé de trouver lui-même le sein. Pour cela, il faut laisser le bébé dans les bras de sa mère durant sa première heure de vie. Mesurer et peser l'enfant, lui administrer de la vitamine K, un collyre, le baigner, tout cela peut être fait plus tard.
La cohabitation. S'il n'y a pas de réelle contre-indication médicale, les bébés ne devraient pas être séparés de leur mère durant tout le séjour en maternité. Chaque fois que possible, les enfants nécessitant davantage de chaleur resteront dans un incubateur près de la mère. Cela inclut les enfants hypotrophiques ou les prématurés cliniquement stables. Pour les bébés présentant un ictère, la photothérapie devrait avoir lieu dans la chambre de la mère.
Responsabiliser les parents. Dans toute la mesure du possible, on devrait laisser aux parents la responsabilité complète des soins à leur enfant, l’équipe soignante étant disponible quand ils ont besoin d'aide. Il serait bon d’inverser le schéma habituel de « l'expert » qui corrige la mère quand elle dévie de la routine hospitalière, afin de lui permettre d’avoir confiance en elle.
Informer les parents. Toutes les informations devraient être données de façon individualisée, en respectant le rythme de chaque femme et de son bébé. Les informations devraient être adaptées au niveau de connaissance des parents, et présentées clairement. Les mères ont des difficultés à mémoriser tout ce qui leur est dit dans les premières 24 heures qui suivent l’accouchement. Durant cette période, les informations devraient donc être limitées aux points vraiment essentiels. Pour renforcer ce qui a été dit, des informations écrites seront données aux parents avant leur départ.
Les groupes d’aide aux nouvelles mères. Les discussions sur les sujets concernant les soins à donner à la mère et au bébé « passent » mieux si elles ont lieu en petits groupes pendant le séjour en maternité. Ces groupes devraient être informels, et offrir à chaque mère la possibilité d'émettre ses idées et poser ses questions. Quand les pères sont là, ils devraient être inclus. Ces réunions devraient être proposées deux fois par jour dans les services.
Règles d’or pour le démarrage de l’allaitement
Tétée efficace dans l'heure qui suit la naissance. Dès la première tétée, allaiter dans une bonne position (85 % des crevasses sont dues à une mauvaise position).
Ne pas hésiter à allaiter le bébé très souvent les premiers jours. Cohabitation mère-enfant souhaitable 24 h/24. Favoriser le contact peau à peau. Apprendre à la mère à repérer les signes d'éveil de l'enfant. Stimuler l'enfant pour arriver à une moyenne de 8 à 12 tétées par 24 heures au troisième jour.
Allaiter le bébé sans restriction de durée. Apprendre à la mère comment se déroule une tétée, les éléments qui lui permettent de savoir que son enfant est efficace au sein, ainsi que ceux qui indiquent que la tétée est terminée.
Éviter les biberons de complément ou d'eau sucrée, les tétines, téterelles et bouts de sein.
Leçon suédoise : les bébés sont compétents
Lessons from Sweden : aren’t babies cleaver. AM Widstrom. Associates in Childbirth Education, Sept 1999.
Chez les animaux, le premier contact mère-enfant est contrôlé par toute une série de programmes instinctifs spécifiques à chaque espèce. Chez les mammifères, un de ces programmes est la recherche rapide et instinctive de la mamelle pour téter. Chez la plupart des mammifères, le fait que la mère ait son petit près d’elle pendant les heures qui suivent la naissance est capital pour la reconnaissance du petit par la mère. Dans bon nombre d’espèces, lorsque le petit a été enlevé à la mère tout de suite après la naissance, il sera rejeté par elle lorsqu’on le lui rendra. Le comportement « maternant » semble être sous contrôle hormonal ; le taux d’ocytocine est très élevé pendant l’accouchement, et cette hormone semble jouer un rôle important dans la création du lien mère-enfant.
Lorsqu’un nouveau-né en bonne santé est placé contre la poitrine de sa mère immédiatement après la naissance, et lorsqu’on s’abstient de toute intervention susceptible de le perturber, on pourra observer chez l’enfant un enchaînement de comportements qui l’amèneront à trouver le sein et à le prendre environ 1 heure après la naissance. Lorsque cette dernière s’est bien passée, et après le premier cri, l’enfant est généralement calme. Après un moment, il devient plus actif et éveillé, il ouvre les yeux et commence à bouger les bras. 30 minutes environ après la naissance, il commence à porter ses mains à sa bouche et à avoir des mouvements de succion, qui deviennent de plus en plus importants. Puis il commence à chercher le sein.
Certains auteurs persistent à croire que la « période sensible » observée chez d’autres mammifères n’existe pas chez les humains, en dépit des études de plus en plus nombreuses qui démontrent le contraire. Par exemple, des études ont montré que si l’enfant était placé contre la peau de sa mère immédiatement après la naissance et pendant quelques temps, la mère allaite plus longtemps et a un comportement plus « maternant » que lorsqu’elle a été séparée de son enfant. De plus, le fait que l’enfant touche les mamelons de sa mère peu après la naissance semble accélérer la création du lien mère-enfant. Cette période pendant laquelle la mère est particulièrement sensible au contact cutané avec l’enfant et à la succion des mamelons est aussi celle pendant laquelle le nourrisson est biologiquement programmé pour chercher à téter et prendre le sein. Certes, cette période n’est pas la seule pendant laquelle la mère pourra s’attacher à son enfant. Mais pourquoi refuser à une mère et à son nouveau-né la possibilité de créer immédiatement un lien fort et gratifiant pour tous deux, lorsqu’il n’y a aucune raison médicale exigeant impérativement une séparation ?
L’enfant sait aussi montrer dès la naissance qu’il a faim : il a des mouvements de succion, porte sa main à sa bouche, tourne la tête à la recherche du sein. Si ces signaux ne sont pas reconnus, il commencera à pleurer pour attirer l’attention. Il est important de ne pas le laisser pleurer longtemps, car dans ce cas il sera souvent trop agité pour être mis au sein. Lorsqu’un petit nourrisson est mis contre le sein de sa mère, il est souvent impatient, et tourne la tête de tous les côtés à la recherche du sein, la bouche ouverte, d’une façon désordonnée, comme s’il n’arrivait pas à trouver le mamelon. Ce « prélude » semble jouer un rôle de stimulation des mamelons pour les préparer à la tétée. Lorsque le mamelon « ressort » suffisamment, l’enfant ouvrira généralement grand la bouche, aplatira sa langue, et prendra largement le sein.
Il ne viendrait pas à l’idée de la plupart des éleveurs de se mêler de mettre les petits à la mamelle, ou de les en enlever. Malheureusement, il existe chez les soignants la conviction profondément ancrée qu’il est nécessaire d’aider les enfants à prendre le sein (datant probablement de l’époque où le nouveau-né était systématiquement séparé de sa mère dès la naissance, ce qui ne lui permettait pas de démontrer ses compétences). Leurs tentatives d'« aide » ont le plus souvent pour conséquence de perturber l’enfant, voire de l’amener à refuser de prendre le sein.
Le suivi en période périnatale
Perinatal care in the 21st century : evidence that supports changing the management for both mother and infant. K Marshall. LLLI Conférence, session 106, 4 juillet 1999.
La période de l’accouchement et du post-partum représente une « période sensible » pendant laquelle la mère est particulièrement ouverte aux besoins de son enfant. Ce centrage de la mère sur l’enfant est très important pour la mise en place d’un lien mère-enfant solide. Pendant cette période, une mère a besoin d’être soutenue émotionnellement, et d’être protégée.
Il est donc utile de se pencher sur les interventions qui, en post-partum précoce, peuvent augmenter le temps de contact entre la mère et l’enfant, et ce pour un coût modique. L’un des facteurs les plus importants est le démarrage de l’allaitement. Lorsque la mère souhaite allaiter, le fait de pouvoir mettre son enfant au sein dans l’heure qui suit la naissance et de pouvoir ensuite avoir son enfant avec elle en permanence lui permettra de mieux démarrer son allaitement. Lorsque ce démarrage se passe bien, les mères allaitent généralement plus longtemps que lorsque ce démarrage s’est mal passé. Lorsqu’une infirmière passe ne serait-ce que 10 minutes avec la mère après l’accouchement pour l’aider à découvrir son enfant et à décrypter son comportement, la mère interagit davantage et de façon plus appropriée avec son enfant (Brazelton, 1990).
Depuis la mise en place de l’Initiative Hôpital Ami des Bébés, les maternités de certains pays dans le monde ont constaté un effet inattendu : la baisse massive du taux d’abandon des enfants. Cela suggère que le contact entre la mère et l’enfant pendant les premiers jours post-partum est crucial pour l’attachement.
O’Connor et son équipe ont effectué une étude sur 277 mères, dans une population où la prévalence des problèmes de parentage est élevée ; dans le premier groupe, les mères n’ont pas eu de contact précoce avec leur enfant, mais ont pu l’avoir avec elles pendant 6 heures le second et le troisième jour ; dans le second groupe, les mères n’ont eu leur bébé avec elles que pendant 20 minutes toutes les 4 heures, ce qui était la routine à l’époque dans les services de maternité ; 10 enfants de ce dernier groupe ont souffert d’un problème de relation avec les parents (mauvais traitements, négligence, abandon, stagnation staturo-pondérale) contre 2 enfants dans le premier groupe qui avait bénéficié de 12 heures de contact supplémentaires. Il semble que le fait de permettre à la mère de passer davantage de temps avec son bébé pendant les premiers jours de vie induit une réduction significative du risque de maltraitance ou de négligence.
L’observation d’un bébé dont on respecte le comportement montre que le nouveau-né humain a, tout autant que les autres petits mammifères, la capacité de trouver le sein maternel pour téter. Après une naissance normale, l’enfant est généralement calme et éveillé ; il pleure rarement et semble très occupé à regarder sa mère. Environ 30 à 40 minutes après la naissance, il commence à faire des mouvements de succion, la salive commence à couler sur son menton. S’il est placé contre la poitrine de sa mère, il se déplacera pour tenter d’atteindre le mamelon en rampant, en poussant avec ses bras et ses jambes. L’odeur particulière du mamelon aide l’enfant à le repérer. Certaines substances odorantes du liquide amniotique sont aussi présentes dans la sécrétion des glandes mammelonnaires (mais pas dans le lait). De ce point de vue, le fait que l’enfant tète ses mains pourrait jouer un rôle dans la reconnaissance du sein.
Toute cette période de progression vers le sein favorise la sécrétion d’ocytocine chez la mère, ce qui facilite l’expulsion du placenta et abaisse le risque d’hémorragie. Toute intervention intempestive désorganisera ce comportement programmé du bébé. En conséquence, il est fortement recommandé d’attendre que cette première tétée ait eu lieu avant de se préoccuper d’administrer de la vitamine K, des gouttes dans les yeux, de peser et mesurer l’enfant.
Pendant des décennies, la règle a été de limiter au strict minimum nécessaire les contacts mère-enfant en post-partum précoce. Actuellement, rien ne permet de penser que le fait de restreindre le contact entre une mère et son nouveau-né soit susceptible de présenter un quelconque avantage. En revanche, des études ont montré que cela peut présenter divers inconvénients, dont des difficultés d’allaitement et des problèmes dans la relation mère-enfant. Dans la mesure où les routines hospitalières induisant une séparation mère-enfant ont démontré des effets nocifs, il est nécessaire de les supprimer pour adapter des routines respectueuses de la biologie de la mère et de l’enfant pendant cette période critique.
Les recommandations suivantes semblent appropriées :
- Permettre à la mère de bénéficier pendant l’accouchement de l’aide physique et émotionnelle d’une « doula ».
- Éviter autant que faire se peut l’utilisation des analgésiques et de la péridurale, dont on sait maintenant qu’ils ont un impact négatif sur le démarrage de l’allaitement et les interactions mère-enfant.
- Lorsque l’enfant est né à terme et qu’il semble en bonne santé, il sera placé nu contre sa mère immédiatement après la naissance, et recouvert d’une couverture, et ce pendant au moins la première heure, sans être dérangé. On lui permettra de décider du moment où il sera prêt à prendre le sein.
- Les nurseries seront fermées. Tous les bébés seront systématiquement gardés par leurs mères. Éventuellement, une petite nurserie sera disponible pour les nourrissons dont la mère est malade.
- Un contact physique fréquent favorise le démarrage de l’allaitement et permet la création d’un lien étroit entre la mère et son enfant. On conseillera donc aux mères de débuter l’allaitement dans l’heure qui suit la naissance, et d’allaiter à la demande pendant au moins les deux premières semaines.
Références
MH Klaus, JH Kennell and PH Klaus. Bonding. Addison-Wesley/Lawrence, 1999.
D Morris, Le Bébé Révélé. Ed. Calmann-Levy, 1993.
BM Martino, Le Bébé est une Personne. J'ai Lu Bien-Etre, 1985.
JA MacFarlane, DM Smith, and DH Garrow. The Relationship between Mother and Neonate. In The Place of Birth, ed. S Kitzinger and J A Davis. New York : Oxford University Press, 1978.
J M Pascoe and J French. Development of positive feelings in primiparous mothers toward their normal newborns. Clin Pediatrics 28 (1989) : 452-456.
K Robson and R Kumar. Delayed Onset of Maternal Affection after Childbirth. British Journal of Psychiatry 8 (1967) : 13-25.
J Winberg. Examining breastfeeding performance : forgotten influencing factors. Acta Paediatr 84(1995) : 465-67.
H Wallardi, RH Porter, and J Winberg. Does the Newborn Find the Nipple by Smell ? Lancet 336 (1990) :1105-7.
AM Widström, AB Ransjö-Arvidson, K Christensson, AS Matthiesen, J Winberg, and K Uvnäs-Moberg. Gastric Succion in Healthy Newborn Infants : Effects on Circulation and Developing Feeding Behavior. A Paediatr Scand 76 (1987) : 566-72.
R Lang, Birth Book. Ben Lomond, Calif. : Genesis Press, 1972.
L Righard and MO Blade. Effect of Delivery Room Routines on Success of First Breastfeed. Lancet 336 (1990) :1105-07.
AM Widström and J Thingstrom-Paulsson. The Position of the Tongue during Rooting Reflex Elicited in Newborn Infants before the First Suckle. Acta Paediatr Scand 82 (1993) : 281-83.
AM Widström, W Wahlburg, AS Matthieson, P Eneroth, K Uvnäs-Moberg, S Wernert, and J Winburg. Short-term Effects of Early Suckling and Touch of Nipple on Maternal Behaviour. Early Human Development 21 (1990) : 153-63.
K Christensson, T Cabrera, E Kritensson, K Uvnäs-Moberg, and J Winberg. Separation distress call in the Human Neonate in the Absence of Maternal Body Contact. Acta Paediatr 84 (1995) : 468-73.
K Michelsson, K Christensson, H Rothangänger and J Winberg. Crying in separated and non-separated newborns : sound spectographic analysis. Acta Paediatr 85 (1996) : 471-75.
R Rubin. Maternal Touch. Nursing Outlouk 11 (1963) : 828-31.
MH Klaus, JH Kennel, N Plumb, and S Zuehlke. Human Maternal Behavior of Mothers and Fathers with Their Newborn Infants. Israeli J Med Science 30 (1994) : 79-82.
DW Winnicott, Babies and Their Mother. Reading, Mass : Addison-Wesley,1987, 78.
A McBryde. Compulsory Rooming-in in the Ward and Private Newborn Service at Duke Hospital. JAMA 145 (1951) : 625-28.
M Greenberg, I Rosenberg, and H Lind. First Mothers Rooming-in with Their Newborns : Its Impact on the Mother. Am J Orthopsychiatry 43 (1973) : 783-88.
B Buranasin. The Effects of Rooming-in on the Success of Breastfeeding and the Decline in Abandonment of Children. Asia-Pacific J Public Health 5 (1991) : 217-20.
Data on Costa Rica : L Mata, P Saenz, JR Araya. Promotion of Breastfeeding in Costa Rica: the Puriscal Study. Ed. JB Jelliffe and EF Patrice Jelliffe Programmes to Promote Breastfeeding (Oxford, England Oxford University Press, 1988) : 55-69.
K Christensson. Fathers can effectively achieve heat conservation in healthy newborn infants. Acta Peadiatr, 85(1996) : 1354-60.
M Rödholm. Effects of Father-Infant Postpartum Contact on Their Interaction Three Months after Birth. Early Human Development 5 (1981) : 79-85.
NS Masaitis, JW Kaempf. Developing a frenectomy policy at one medical center : a case study approach. JHL 1996 ; 12(3) : 229-32.
L Righard and MO Blade. Effect of Delivery Room Routines on Success of First Breastfeed. Lancet (1990) 336 : 1105-07.
RA Lawrence, RM Lawrence. Breastfeeding : a Guide for the Medical Profession, (Mosby, 5ème édition, 1999).
AJ DeCasper and WP Fifer. Of Human Bonding : Newborn Prefer Their Mothers' Voices. Sciences (1980) 208 : 1174-76.
AJ DeCasper and PA Prescott. Human Newborns' Perception of Male Voices : Preference, Discrimination, and Reinforcing Value. Developmental Psychobiology 17, n°5 (1984) : 481-91.
L Seitamo and O Wasz-Hackert. Early-Mother Relationship in the Light of Infant Cry Studies. Acta Paedopsychiatr 47 (1981) : 25-222.
J Lind, V Vuorenkoski, and O Wasz-Hackert. Effect of Cry Stimulus on the Temperature of the Lactating Breast of Primiparas. Psychosomatic Medicine in Obstetrics and Gynaecology, ed. N Morris (Basel, Switzerland) ; 1973, 293-95.
K Cristensson, C Seles, L Moreno, A Belaustequi, P De La Fuente, H Lagercrantz, and J Winberg. Temperature, Metabolic Adaptation and Crying in Healthy Newborns' Care for Skin-to-Skin or in a Cot. Acta Paediatrica Scandinavica 81 (1992) : 488-93.
K Christensson, J Bhat, B Amadi, B Eriksson, B Höjer. Randomised study of skin-to-skin versus incubator care for rewarming low-risk hypothermic neonates. The Lancet 35 (1998) : 1115.
CS Carter, LL Getz, and M Cohen-Parsons. Relationships between Social Organization and Behavioral Endocrinology in a Monogamous Mammal. Adv Study of Behaviour 16 (1986) : 109-45.
K Uvnäs-Moberg and J Winberg. Role of Sensory Stimulation in Energy Economy of Mother and Infant with Particular Regard to the Gastrointestinal Endocrine System. Textbook of Gastroenterology and Nutrition in Infancy, 2nd ed., ed. E. Lebenthal (New York: Haven Press, 1989).
M Kaitz, A Good, AM Rokem, and A Eidelman. Mother's Recognition of Their Newborns by Olfactory Cues. Developmental Psychobiology 20 (1987) : 5878-91.
M Kaitz, P Lapidot, R Branner, and A Eidelman. Mothers can recognize their infants by touch. Developmental Psychology 28 (1992) : 35-39.
AN Meltzoff and MK Moore. Initiation of Facial and Manual Gestures by Human Neonates. Science 198 (1977) : 75-78.
J Riordan et KG Auerbach. Breastfeeding and Human Lactation (Jones and Bartlett Publishers International, 2ème édition, 1999), 279-305.
N Mohrbacher et J Stock, Traité de l'Allaitement Maternel (LLLI International, traduction française de l'édition révisée 1997 du Breastfeeding Answer Book), 24-45.
ER Newton. Obstetric influences on the initiation and duration of lactation : the supportive role of the obstetrician. B Abst, Feb 1997, 18-20.
GC Anderson et al. Development of sucking in term infants from birth to four hours postbirth. Res Nurs Health 5 ; 1982 : 21-7.
J Williams, S Mueller. A message to the nurse from the baby. JHL (1989) 5 : 19.
C Sepkoski et al. Effects of maternal epidural anesthesia on neonatal behavior during the first month. Dev Med Child Neurol 34 (1992) : 1072-1080.
L Righard et al. Effec ts of delivery room routines on success of first breast-feed. Lancet 336 (1990) : 1105-1107.
E Nissen et al. Effect of maternal pethidine on infants' developing breastfeeding behaviour. Acta Paediatr 84(2) ; 1995 : 140-145.
M Crowell et al. Relationship between obstetric analgesia and time of effective breastfeeding. J Nurse Midw, 39(1994) : 150-156.
Edward Newton. Obstetric influences on the initiation and duration of lactation. B Abst, Nov 1996, 11-12.
M Walker. Do labor medications affect breastfeeding ? JHL (1997) 13 : 131-137.
J Needs. Sucking, swallowing and breathing : the effects of pethidine epidurals. Conference of Austr Lact Cons Ass, Aug 1996. B Rev, May 1997, 40.
A Smith. Pilot study investigating the effect of epidurals on breastfeeding. Conference of Austr Lact Cons Ass, Aug 1996. B Rev, May 1997, 40.
S Bizieau. La péridurale : risques pour le nouveau-né et l'enfant. Advances in Pediatrics 39 (1992) : 236-59.
Enquête nationale périnatale. Tableau emprunté à la revue du Ministère des Affaires Sociales (SESI – Info-Rapides n° 80 – octobre 1996).
LJ Smith. When to supplement a supposedly breastfed baby. JHL 1998 ; 14(2) : 145-46.
Les selles du bébé allaité. Dossiers de l'Allaitement 4 (1990) : 15-19.
YS Wang, YH Shen, JJ Wang and al. Preliminary study on the blood glucose level in the exclusively breastfed newborn. J Trop Pediatrics 40 (1994) : 187-88.
MM Ziemer et JG Pigeon. Changes and pain in the nipple during the first week of lactation. JOGNN 22 ; 1993 : 247-56.
Allaiter un bébé somnolent. Dossiers de l'Allaitement 34 : 26-27.
MJ Challamel. Les rythmes veille-sommeil chez le nouveau-né. Dossiers de l’Allaitement 24 (1995) : 5-6.
ES Buescher, SM McIleran. Colostral antioxydants: separation and characterization of two activities in human colostrum. J Pediatr Gastroenterol Nutr 14(1992) : 47-56.
J Moon, S Humenick. Breast engorgement : contributing variables and variables amenable to nursing intervention. JOGNN 18(4) ; 1989 : 309-315.
KF Shortridge et al. Protective potential of colostrum and early milk against prospective influenzae viruses. J Trop Pediatr 36 (1990) : 94-5.
MLM Silva, CMS Giampaglia. Colostrum and human milk inhibit localized adherence of enteropathogenic Escherichia coli to HeLa cells. Acta Paediatr 81 (1992) : 266-7.
S Chua, S Arulkumaran, I Lim et al. Influence of breastfeeding and nipple stimulation on postpartum uterine activity. B J Obstet Gynaecol 101 (1994) : 804-5.
K Frantz. Baby's position at the breast and its relationship to sucking problems. Exposé présenté à la conférence LLLI, 1983 et 1985.
S De Marzo et al. Initial weight loss and return to birth weight criteria for breastfed and bottlefed neonates. Develop Psych 23 (4) ; 1987 : 467-474.
M de Carvalho et al. Effect of frequent breastfeeding on early milk production and infant weight gain. Pediatrics 72 (1983) : 307-11.
J Newman. Decision tree and postpartum management for preventing deshydratation in the breastfed baby. JHL(1996) ; 12(2) : 129-135.
H Varendi, J Winberg. Human newborns reach the nipples by means of primitive reflexes. Prenatal and neonatal medicine, p. 580.
K Evans and K Simmer. Effect of the method of breastfeeding on engorgement mastitis and infantile colic. Acta Paediatr 84 (1995) : 849-52.
Pour poser une question, n'utilisez pas l'espace "Commentaires" ci-dessous, envoyez un mail à la boîte contact. Merci