DA 38 : Alcool et allaitement

Article publié dans les Dossiers de l'allaitement n° 38 (Janvier - Février - Mars 1999)

D'après BFUI (Breastfeeding Under the Influence of alcohol). L Gartner. ABM News and Views, vol 3, n° 1, 1997.

Nous avons tous reçu, ou recevrons un jour ou l’autre, une demande de renseignements concernant la prise d’alcool pendant l’allaitement. Pour l’auteur, la première demande de ce genre a été faite par le biais d’un appel téléphonique reçu un matin. Une mère voulait savoir si elle devait jeter le lait qu’elle venait de tirer, ou si elle pouvait le garder pour le donner à son bébé de 3 mois ; elle avait consommé de l’alcool la soirée précédente, et elle se demandait si son lait en contenait encore.

L’interrogatoire a mis en évidence la consommation de plusieurs cocktails, de plusieurs verres de vin, et de 7 ou 8 canettes de bière. La mère avait mis son enfant au sein avant toute absorption d’alcool, vers 20 heures, et ne l’avait pas encore remis au sein à 10 heures le lendemain matin, heure à laquelle elle a tiré son lait. Lorsque son bébé s’était réveillé, elle lui avait donné un biberon de son lait (tiré un certain temps auparavant et conservé au congélateur). Comme il refusait de se calmer, elle lui avait offert le sein, mais seulement pendant quelques instants. Depuis, son bébé lui semblait moins éveillé qu’à l’ordinaire, mais il n’était pas hypotonique, et elle pouvait le réveiller facilement.

L’auteur a suggéré à cette mère de jeter le lait qu’elle avait exprimé, de tirer à nouveau son lait et de le jeter, mais qu’ensuite elle pourrait mettre son bébé au sein lorsqu’il aurait faim. Le temps écoulé depuis l’absorption des boissons alcoolisées serait suffisant pour que l’alcool soit pratiquement totalement éliminé.

Après cet appel, l’auteur a réfléchi davantage à la question. Passé le premier « choc » en constatant qu’une mère qui allaite un nourrisson en arrive à absorber une telle quantité d’alcool en quelques heures, elle s’est demandé dans quelle mesure cette mère n’était pas coutumière du fait. Après tout, elle semblait, pour sa part, avoir bien toléré une alcoolémie élevée, ce qui semblait indiquer une certaine habitude du fait. Elle consommait peut-être quotidiennement des quantités non négligeables de boissons alcoolisées. Quelles conséquences cela pouvait-il avoir sur son bébé ?

Il existe diverses études portant sur des animaux, et montrant un abaissement significatif de la croissance cérébrale et du développement neurologique des petits lorsque les femelles allaitantes consomment régulièrement de l’alcool. Par contre, peu d’études ont été faites chez les humains. Toutefois, l’on peut a priori supposer que le résultat est similaire.

Quelle est exactement l’ampleur du problème de l’alcoolisation chronique pendant l’allaitement ? De quelle façon peut-il affecter l’enfant ? Sous quelles conditions exactement ? Devons-nous déconseiller formellement l’alcool aux femmes qui allaitent ? Leur dire qu’un verre de temps en temps ne pose pas de problème ? Est-ce vraiment le cas ? Si nous mettons trop l’accent sur les dangers de l’alcool pendant l’allaitement, combien de mères cela sera-t-il susceptible de faire renoncer à allaiter ? Avec quels inconvénients pour la santé des enfants ? Après tout, la consommation d’alcool est très largement répandue. En bref, beaucoup de questions, peu de réponses !