Article publié dans les Dossiers de l'Allaitement numéro 64 (Juillet - Août - Septembre 2005)
D'après "Midwives’ knowledge of newborn feeding ability and reported practice managing the first breastfeed." R Cantrill, D Creedy, M Cooke. Breastfeed Rev 2004 ; 12(1) : 25-33.
Le contact peau-à-peau immédiat et ininterrompu après la naissance facilite l’adaptation du nouveau-né à la vie extra-utérine, ainsi que l’expression des réflexes qui l’amèneront à prendre le sein. Toutes les mères et tous les bébés devraient bénéficier d’un tel contact sauf nécessité médicale impérative. Les sages-femmes sont les plus susceptibles d’être auprès des mères au moment de la première tétée. Il est donc essentiel qu’elles possèdent les connaissances nécessaires pour aider les mères à ce moment important. L’objectif de cette étude australienne était d’évaluer les connaissances des sages-femmes en matière de capacité des nouveau-nés, ainsi que leurs pratiques d’aide aux mères pour la première tétée.
Pour ce faire, un questionnaire en 2 volets a été mis au point par un groupe d’experts en allaitement. Le premier volet comportait 22 questions dont la réponse était à cocher sur une échelle allant de 1 (pas du tout d’accord) à 5 (tout à fait d’accord). Les questions portaient sur l’intérêt du contact peau-à-peau, les réflexes du nouveau-né et les facteurs pouvant les perturber, leur pratique professionnelle, et leur compétence pour apprécier une mise au sein correcte et une succion efficace. Le score maximal possible à ce questionnaire était de 110. Le second volet comportait la présentation de 2 cas cliniques de mères souhaitant allaiter, et dont l’accouchement s’était déroulé dans des circonstances couramment constatées en maternité ; chaque cas était assorti de 12 questions destinées à évaluer le comportement de la sage-femme. Pour ce second volet, le score maximal était de 120.
Ce questionnaire a été envoyé à toutes les sages-femmes inscrites à l’association australienne des sages-femmes (ACMI), soit environ 3500 personnes. 1095 ont retourné le questionnaire (31,6%). Ces personnes (1080 femmes, 15 hommes) étaient représentatives de la population des sages-femmes australiennes en ce qui concernait l’âge, le sexe, le nombre d’années de pratique professionnelle. En moyenne, elles étaient âgées de 41 ans et avaient 12,74 ans de pratique. Les enfants des 2/3 d’entre elles avaient été allaités pendant au moins 3 mois. 17,6% étaient aussi consultantes en lactation.
Le score moyen obtenu au premier volet du questionnaire était de 85,94 (de 40 à 110). 96,8% estimaient que le contact peau-à-peau était important pour stabiliser la température de l’enfant, mais seulement 37,8% savaient que cela pouvait aussi stabiliser la glycémie du nouveau-né ; 86,7% pensaient qu’il facilitait l’expression des réflexes destinés à amener l’enfant à téter, 74,4% pensaient que le bébé pouvait trouver seul le sein, et 66,8% estimaient que le contact peau-à-peau facilitait l’apprentissage de la tétée par le nouveau-né. 57,2% ignoraient que le fait de suspendre le contact peau-à-peau au bout de 15 à 20 mn pouvait sérieusement affecter les réflexes de succion de l’enfant. 65,6% pensaient que la séparation précoce était source de stress pour l’enfant, et plus de 90% savaient que le stress de la naissance pouvait affecter négativement l’expression des réflexes de l’enfant. 88% disaient prendre le temps de laisser l’enfant téter, et considéraient cela comme une priorité.
Le score moyen obtenu au second volet était de 95,89. 86% des sages-femmes n’aspiraient jamais un nouveau-né en routine. La pratique « correcte » la plus souvent rencontrée chez ces sages-femmes était de proposer à la mère de l’aider à mettre son bébé au sein rapidement après la naissance. Celle qui était la moins souvent rencontrée était d’encourager la mère à permettre au bébé de prendre le sein seul ou avec le moins d’aide possible, en se guidant sur son comportement.
Ces résultats montrent que la 4ème Condition de l’OMS / UNICEF pour la réussite de l’allaitement (Aider les mères à mettre leur bébé au sein dans l’heure qui suit la naissance) n’est pas encore parfaitement comprise et appliquée par les sages-femmes australiennes. Le tiers des sages-femmes qui ont participé à cette étude avaient des connaissances insuffisantes sur le sujet. Même si la plupart des sages-femmes savaient que le bébé naît avec des réflexes qui l’amèneront à prendre le sein, elles avaient du mal à appliquer cette connaissance dans la pratique, et avaient tendance à interférer avec le comportement du bébé. Par ailleurs, les sages-femmes ne savaient pas toujours comment apprécier correctement le fait que l’enfant tétait efficacement, et avaient donc des difficultés à l’apprendre aux mères.
Les auteurs concluent que les sages-femmes devraient être encouragées à se tenir au courant des nouvelles données concernant l’allaitement pour les inclure dans leur pratique. Il est important qu’elles soient informées des capacités du nouveau-né. D’autres études sur le sujet seraient utiles afin de mieux cerner les domaines dans lesquelles les connaissances des sages-femmes ne sont pas optimales, afin de modifier en conséquence leur cursus d’études, ainsi que les livres et autres documents qu’elles ont l’occasion de consulter.
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