Dossiers de l’allaitement n° 28, juillet-août-septembre 1996, p. 15.
D’après G Dunne et K Fuerst, Breatfeeding by a mother who is a triple amputee : a case report, Journal of Human Lactation 1995 ; 11(3) : 217-18.
Une femme avait subi de très graves brûlures électriques alors qu’elle avait 13 ans. Elle avait dû être amputée du bras droit à l’épaule, du bras gauche sous le coude, et de la jambe gauche au-dessus du genou.
Elle souhaitait d’autant plus vivement allaiter qu’il existait dans sa famille des antécédents d’allergie. Le fait que son handicap l’empêcherait de préparer un biberon et de le donner à son bébé était à ses yeux un motif supplémentaire pour allaiter.
Son mari la soutenait et était prêt à lui apporter tout le soutien nécessaire. Et sa mère avait offert de passer chez sa fille les premières semaines après la naissance.
Quand elle a accouché, elle a pu mettre son bébé au sein dans l’heure qui a suivi la naissance, avec l’aide d’une infirmière. Le principal moyen de soutien du bébé par sa mère était la partie supérieure de son bras gauche. On disposait des oreillers pour amener le bébé devant le sein. Quand le bébé était au sein, le père le tenait pendant toute la tétée pour le maintenir en bonne position.
Chaque tétée réussie augmentait la confiance des parents, qui sont rapidement devenus des experts.
Quelques jours plus tard, la mère a commencé à avoir les mamelons douloureux, sans doute en raison de ses difficultés à garder le bébé en bonne position pendant toute la tétée. Mais après que l’installation a été ajustée, les choses se sont très vite améliorées.
À cause de l’importance de son handicap, cette mère ne pouvait assurer presque aucun des soins à l’enfant. Il était donc particulièrement important pour elle d’allaiter : c’était l’unique chose qu’elle était la seule à pouvoir faire pour son enfant. C’était aussi pour elle une façon de « rentrer dans la normalité », de constater que son corps était capable de fonctionner correctement dans certains domaines. Elle était en outre convaincue que l’allaitement avait permis la création d’un lien mère-enfant étroit, ce qui lui aurait probablement été moins facile si elle n’avait pas allaité.
Ce cas rappelle celui d'Alison Lapper, née sans bras et avec des jambes très atrophiées. Arrachée à sa mère qui ne la voit même pas et à qui on dit qu’elle ne survivra pas, elle est élevée dans une institution pour enfants handicapés moteurs. Dotée d’une force de caractère peu commune, elle réussit à mener une vie autonome. C’est une artiste reconnue, membre de l’Association internationale des artistes peignant de la bouche et du pied.
Quand elle apprend qu’elle est enceinte, elle décide de garder l’enfant et d’assumer seule, comme elle l’a toujours fait.
Elle revendique ce qu’elle vit, pose nue pendant sa grossesse. Un ami sculpteur fait d’elle, alors qu’elle est enceinte de huit mois, une statue de marbre de près de 5 m de haut, qui ornera pendant deux ans le « 4e socle » de Trafalgar Square, à Londres (voir ci-dessous).
Elle se prête également au tournage, étalé sur trois ans, du film « Le bébé d’Alison (diffusé en mars 2005 sur France 3). On l’y voit s’occuper de son bébé Parys, avec l’aide d’une nounou présente 24 heures sur 24, lui changer sa couche (avec les pieds !), le soulever en saisissant ses langes avec ses dents, et l’allaiter dans une écharpe de portage.
Sans se cacher. Car, comme elle dit, « c’est intéressant d’allaiter en public, surtout parce que j’ai besoin d’aide pour m’installer et mettre le bébé au sein. J’ai renoncé à le faire discrètement, c’est impossible, mais c’est vrai qu’il y a des regards bizarres ! »
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