Publié dans le n° 204 des Dossiers de l'allaitement, mai 2024
D'après : Breastfeeding and optimal health outcomes for women : cardiovascular disease. Tawia S. Breastfeed Rev 2023 ; 31(3) : 35-9.
L’allaitement présente de nombreux bénéfices pour la santé infantile, mais également pour la santé maternelle, même s’ils restent moins connus du grand public. Pourtant, mieux connaître les bénéfices de l’allaitement pour leur santé pourrait augmenter le niveau de motivation des mères. Les maladies cardiovasculaires (MCV) sont une cause importante de morbidité et de mortalité dans les pays développés. En Australie et en 2016, environ 22 200 femmes australiennes sont décédées suite à une MCV, soit le tiers de tous les décès survenus chez des femmes, ce taux étant encore plus élevé chez les femmes aborigènes. Les seules données fournies par les services de santé publique concernant l’impact bénéfique de l’allaitement sur la santé maternelle sont le risque plus bas de cancer du sein et de l’utérus chez les femmes qui ont allaité, alors que le pourcentage de décès féminins pour ces deux causes est significativement plus bas que celui des décès pour MCV. Le fait que l’allaitement a également un impact bénéfique sur la santé cardiovasculaire féminine devrait donc être largement porté à la connaissance du public. Le but de cette analyse était de faire le point sur le sujet.
L’étude australienne "45 and Up Study" est une vaste étude prospective de cohorte toujours en cours, dont l’objectif est d’analyser les facteurs de risque de diverses pathologies. Elle est menée sur environ 250 000 femmes. Elle a déjà constaté que, par rapport aux femmes qui n’avaient jamais allaité, celles qui avaient allaité avaient un risque d’hospitalisation et un risque de décès pour MCV respectivement plus bas de 14 et 34 % après prise en compte des diverses variables démographiques, socioéconomiques et liées au mode de vie. Dans la mesure où plus de 88 000 femmes incluses dans cette étude avaient allaité, la puissance statistique du résultat est de qualité élevée.
Plusieurs autres études prospectives menées sur d’importants groupes de femmes et dans divers pays ont donné des résultats intéressants. L’étude européenne EPIC, qui incluait 9 985 femmes résidant un peu partout en Europe, 87 % d’entre elles ayant allaité, rapportait un risque de MCV plus bas de 29 % chez les femmes qui avaient allaité par rapport à celles qui n’avaient pas allaité, avec un impact dose-dépendant. Cette baisse était de 27 % chez les femmes qui avaient allaité pendant une durée totale cumulée < 3 mois et de 38 % chez celles qui avaient allaité pendant ≥ 23 mois. Une étude chinoise incluant 289 573 femmes dont 97 % avaient allaité rapportait une baisse de 9 % du risque de pathologie coronarienne chez les femmes qui avaient allaité, cette baisse étant de 18 % chez celles qui avaient allaité pendant ≥ 24 mois. Cette même étude rapportait une baisse moyenne de 8 % du risque d’AVC chez celles qui avaient allaité, cette baisse étant de 17 % pour un allaitement de ≥ 24 mois. Enfin, une étude américaine menée auprès de 80 191 femmes dont 58 % avaient allaité faisait état d’un risque d’AVC plus bas de 23 % chez les femmes qui avaient allaité, cette baisse étant de 19 % chez les femmes qui avaient allaité pendant une durée cumulée de 1 à 6 mois et de 26 % pour une durée cumulée de ≥ 13 mois. Enfin, une méta-analyse a compilé les données de 8 études publiées entre 2008 et 2019, incluant au total 1 192 700 femmes, dont 82 % avaient allaité. Elle concluait que, par rapport aux femmes qui n’avaient jamais allaité, et pendant un suivi de 10 années, les femmes qui avaient allaité avaient un risque de MCV plus bas de 11 %, un risque de pathologie coronarienne plus bas de 14 %, un risque d’AVC plus bas de 12 % et un risque de mortalité suite à une MCV plus bas de 17 %, et ce quelle que soit la durée d’allaitement et après correction pour l’âge de la femme à l’entrée dans l’étude, la durée du suivi, la parité, la région de résidence, la qualité des diverses études incluses…
Les études sur le sujet, menées sur des groupes importants de femmes, montrent que l’allaitement abaisse le taux de morbidité et de mortalité des femmes pour les MCV, et ce d’une façon qui semble dose-dépendante. Au vu de la responsabilité importante des MCV dans le taux de mortalité des femmes vivant dans les pays en voie de développement, il est important que les femmes soient averties de l’impact de l’allaitement sur leur santé cardiovascu-laire, afin de faire des choix mieux informés.
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