Article paru dans le n° 149 des Dossiers de l'allaitement, août 2019
D'après : Breastfeeding and galactosemia. Scott R, Goldman A., Leader Today, October 1, 2018.
La galactosémie est une pathologie congénitale autosomique récessive sévère : les deux parents de l’enfant doivent être porteurs du gène défectueux et le transmettre tous les deux à l’enfant. La mutation génétique peut survenir au niveau de 3 gènes, avec pour conséquence l’impossibilité de métaboliser le galactose (qui est couplé à une molécule de glucose pour constituer le lactose), ce dernier s’accumule dans le sang, entraînant l’apparition de troubles très rapidement après la naissance (vomissements, diarrhée, perte de poids, ictère, troubles neurologiques…) qui peuvent être rapidement mortels en cas de forme sévère, si le nouveau-né n’est pas très rapidement alimenté avec un lait spécial pauvre en lactose. Il existe plusieurs formes de galactosémie de sévérité variable, dont une forme mineure, la forme Duarte, induite par une déficience partielle d’une enzyme, la galactose-1-phosphate uridyl transférase (GALT), dont la prévalence est d’environ 1 enfant pour 4 000 naissances ; le nourrisson touché peut métaboliser le galactose mais de façon réduite. Si la galactosémie est une contre-indication majeure à l’allaitement, ce dernier sera possible avec des aménagements si l’enfant présente la forme Duarte.
Après une grossesse parfaitement normale, cette mère a accouché à son domicile de son second enfant, qu’elle a immédiatement mis au sein. Elle allaitait toujours son premier enfant âgé de 4 ans et elle comptait bien agir de même avec son second enfant. Le pédiatre est passé à leur domicile pour effectuer le prélèvement de sang au talon destiné aux tests de dépistage en routine (dans certains états des États-Unis, la galactosémie fait partie des anomalies dépistées). 6 semaines plus tard, elle a reçu un appel du pédiatre. Il lui a annoncé que le test avait constaté une galactosémie et qu’elle devait immédiatement arrêter l’allaitement. Cette annonce a dévasté la mère, mais comme son bébé se portait globalement bien, elle a demandé un rendez-vous pour faire un nouveau prélèvement. Le pédiatre lui a dit que cela ne changerait pas le diagnostic, mais il a fait le prélèvement et a obtenu le résultat une semaine plus tard. Il était identique. On a dit aux parents que l’allaitement devait être immédiatement arrêté, et qu’à 12 mois, un test de tolérance au galactose serait effectué afin de voir comment leur enfant le métabolisait.
La mère est donc immédiatement allée acheter le lait spécial prescrit pour son bébé. Les parents ont également consulté un généticien afin de faire un bilan détaillé chez leurs deux enfants et chez eux-mêmes, mais ils devaient attendre deux mois avant d’obtenir les résultats. Pendant ces deux mois, la mère a donc nourri son bébé au biberon. Lorsque les résultats sont arrivés, les parents ont appris que leur bébé avait la forme Duarte, et le généticien leur a dit qu’il était possible de recommencer à l’allaiter. La mère était tellement heureuse qu’elle a immédiatement proposé le sein à son bébé. Ce dernier était exclusivement nourri au biberon depuis deux mois, mais il a immédiatement tété correctement (la production lactée maternelle ayant été maintenue par la poursuite de l’allaitement de son frère aîné). Moyennant des bilans biologiques réguliers qui sont restés dans les limites de la normale, elle a pu allaiter sans restriction son enfant. À 3 ans, ce dernier était en parfaite santé.
Les enfants présentant la forme Duarte de galactosémie sont souvent asymptomatiques (mais pas toujours) lorsqu’ils sont allaités ou nourris avec un lait industriel contenant du lactose, et de nombreux médecins estiment qu’il n’est pas nécessaire de donner à ces enfants un lait industriel spécial. Cependant, les données sur l’impact à long terme sont contradictoires, en particulier sur le développement neurologique. Dans le cas décrit ici, l’enfant ne présentait aucune anomalie clinique ou biologique. Le pédiatre a reconnu que les bénéfices connus de l’allaitement par rapport au risque théorique d’un impact à long terme de l’exposition au galactose du lait maternel justifiaient sa poursuite. D’autres études seraient nécessaires pour déterminer l’impact à long terme de la poursuite de l’allaitement ou de l’utilisation d’un lait industriel standard chez ces enfants. En attendant les résultats de telles études, l’alimentation de l’enfant sera discutée au cas par cas entre les parents et le médecin qui suit l’enfant, en prenant en compte les données du suivi clinique et biologique.
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