Publié dans le n° 164 des Dossiers de l'allaitement, novembre 2020
D'après : Self-resolving vulvar breast tissue arising in the post-partum setting : a case report and review of literature. Lar-son S et al. J Hum Lact 2020 ; 36(2) : 348-51.
La zone vulvaire peut être le siège de tumeurs variées : kystes muqueux, lipomes, kystes des glandes de Bartholin… mais également de tissu mammaire ectopique, même si cette localisation est nettement plus rare qu’une localisation axillaire ou thoracique. Le premier cas de tissu mammaire vulvaire a été décrit en 1872, et depuis, 40 autres cas ont fait l’objet d’une publication médicale. Les auteurs présentent un nouveau cas.
Cette femme de 37 ans a accouché à 40 semaines de gestation de son premier enfant. Les suites de couches ont été normales. Elle avait présenté un fibroadénome mammaire au niveau du sein gauche, confirmé par une biopsie en 2004. Cette mère a commencé à allaiter, mais elle avait des difficultés pour mettre son bébé au sein et elle a été vue par une consultante en lactation. Au moment de sa sortie de maternité à J2, elle allaitait exclusivement et son bébé avait perdu 5 % de son poids de naissance. On lui avait donné un tire-lait fonctionnant sur piles, mais elle n’arrivait à exprimer que quelques gouttes à chaque sein. Le pédiatre a suggéré de donner des compléments de lait industriel via un tube posé sur le sein pendant les tétées. À J5, la montée de lait était survenue et l’enfant avait repris son poids de naissance. À J6, cette mère s’est présentée en consultation hospitalière en raison d’un gonflement vulvaire douloureux rendant la marche difficile. Elle présentait également un engorgement mammaire bilatéral, et elle faisait état de problèmes de mise au sein. L’examen clinique a constaté l’engorgement bilatéral des seins, ainsi que la présence de plusieurs nodules au niveau des grandes lèvres, dont la dimension allait de moins de 1 cm à 2 cm. Ils étaient moyennement sensibles à la palpation, fermes et mobiles, sans aucun écoulement.
En raison de la présentation clinique, la présence de tissu mammaire ectopique au niveau vulvaire a été suspectée. Il a été décidé de proposer à cette mère une gestion non invasive du problème, à savoir attendre et suivre l’évolution, en partant du principe que la situation devrait s’améliorer dans les jours suivants avec la résolution de l’engorgement mammaire, ce qui a été accepté par la mère. Celle-ci a arrêté de donner des compléments à son bébé une semaine après la naissance et elle a poursuivi l’allaitement exclusif avec un soutien téléphonique régulier par la consultante en lactation, et celui d’un groupe de soutien de mère à mère. La prise de poids du bébé était normale. La mère a été revue en consultation à 6 semaines : l’allaitement se passait bien et les nodules vulvaires avaient complètement disparu. À 4 mois, le bébé avait doublé son poids de naissance. La mère a poursuivi l’allaitement exclusif jusqu’à 6 mois et a continué à allaiter jusqu’à plus d’un an, y compris après la reprise de son travail.
L’engorgement de la lactogenèse survient le plus souvent entre 24 et 72 heures post-partum, et perdure pendant 1 à 7 jours. D’autres épisodes d’engorgement peuvent survenir par la suite en cas de drainage insuffisant des seins. Chez cette mère, l’engorgement de la lactogenèse est survenu au 6e jour, et s’est accompagné de difficultés de mise au sein et de l’augmentation de volume du tissu mammaire ectopique vulvaire. La gestion de l’engorgement mammaire a permis la disparition spontanée de l’engorgement au niveau vulvaire. Les problèmes liés au tissu ectopique mammaire au niveau vulvaire peuvent, dans la grande majorité des cas, se résoudre spontanément, et une biopsie sera pratiquée uniquement en l’absence de résolution du problème. Le tissu ectopique peut en effet être le siège des mêmes problèmes que la glande mammaire (kyste, fibroadénome, carcinome…), et nécessite donc un suivi.
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