Publié dans le n° 191 des Dossiers de l'allaitement, février 2023
D'après : The protective effect of breastfeeding and ingesting human breast milk on subsequent risk of endometriosis in mother and child : a systematic review and meta-analysis. Youseflu S et al. Breastfeed Med 2022 ; 17(10) : 805-16.
L’endométriose est un problème chronique douloureux qui se caractérise par une prolifération ectopique de tissu endométrial plus ou moins étendue et infiltrante. Elle touche 10 à 15 % des femmes en âge de procréer, et jusqu’à 70 % d’entre elles présentent des symptômes tels qu’une infertilité, des cycles menstruels irréguliers et douloureux, des douleurs pelviennes chroniques… ayant un impact important sur leur qualité de vie et leur état émotionnel. Ses causes restent débattues mais elles sont multiples : hormonales, immunologiques, inflammatoires, génétiques, environnementales. Des études ont constaté que l’allaitement avait un impact protecteur vis-à-vis du risque d’endométriose, mais cela n’a pas été constaté par d’autres. Cet impact chez la femme qui a allaité pourrait être en rapport avec l’aménorrhée lactationnelle et/ou l’augmentation du taux sérique de prolactine et d’ocytocine, le climat hormonal spécifique de la lactation induisant une régression de l’endométriose. Les études ayant évalué l’impact de l’absorption de lait humain sur le risque d’endométriose ont donné des résultats contradictoires. Le but de cette méta-analyse était de déterminer l’impact de l’allaitement et de la consommation de lait humain sur le risque d’endométriose.
Les auteurs ont recherché toutes les études sur le sujet publiées en anglais ou en persan entre 2000 et mars 2022. Ils ont sélectionné les études originales, observationnelles (de cohorte ou cas-témoin), documentant l’allaitement et/ou la consommation de lait humain et fournissant des données quantitatives sur l’endométriose. Deux des auteurs ont sélectionné les études pertinentes, en ont extrait et classé les données, et en ont évalué la qualité méthodologique à l’aide de l’échelle Newcastle-Ottawa. Parmi les 37 articles évalués en profondeur, 18 ont été retenus : 10 articles évaluant le fait d’avoir été allaitée et 8 études évaluant le fait d’avoir allaité.
Concernant les 8 études évaluant l’impact chez les mères ayant allaité, 3 avaient été menées aux États-Unis, 3 en Iran, 1 en France et 1 en Belgique. 3 études étaient des études de cohorte et 5 étaient cas-témoin. 2 étaient de qualité élevée, les autres étant de qualité médiocre. 6 concluaient à une baisse du risque d’endométriose chez les mères qui avaient allaité (RR : 0,70), tandis que les 2 autres ne retrouvaient aucun impact. Concernant les 10 études évaluant l’impact de l’allaitement chez les femmes ayant été allaitées, 3 avaient été menées aux États-Unis, 3 en Chine, 2 en Italie, 1 en Iran et 1 au Japon. 9 études étaient cas-témoin et 1 était une étude de cohorte. 2 études étaient de qualité élevée, les autres étant de qualité médiocre. 5 études faisaient état d’une baisse du risque d’endométriose chez les femmes qui avaient été allaitées, les 5 autres ne retrouvant aucun impact significatif. Lorsqu’on regroupait les résultats de ces 10 études, le fait d’avoir été allaitée abaissait significativement le risque d’endométriose (RR : 0,67), en particulier dans les études menées aux États-Unis, en Chine et en Italie, et dans les études de qualité élevée.
Cette étude présentait des points faibles. Les études prises en compte avaient des méthodologies très hétérogènes. Certaines études ne documentaient pas la durée de l’allaitement, les données sur celui-ci se limitant au fait que la femme avait allaité ou non. Les variables confondantes prises en compte différaient suivant les études. Globalement, cette analyse est en faveur d’un risque plus bas d’endométriose chez les femmes qui ont allaité, ainsi que chez celles qui ont été allaitées. Le climat hormonal induit par l’allaitement et la lactation peut abaisser le risque d’implantation ou d’extension du tissu ectopique. En revanche, le mécanisme par lequel le fait d’avoir été allaitée abaisserait le risque d’endométriose reste à déterminer. Des études ont constaté que les enfants nourris au lait industriel avaient des taux sériques plus élevés d’œstrogène et de testostérone, ce qui pourrait avoir un impact à long terme sur la fonction reproductive. D’autres études sur le sujet sont nécessaires, menées dans davantage de pays et selon une méthodologie rigoureuse.
Pour poser une question, n'utilisez pas l'espace "Commentaires" ci-dessous, envoyez un mail à la boîte contact. Merci