Publié dans le n° 209 des Dossiers de l'allaitement, décembre 2024.
D'après : Recommendations of health professionals on the issue of breastfeeding in BRCA carriers. Echar M et al. Breastfeed Med 2024 ; 19(7) : 534-8.
Les femmes porteuses des mutations génétiques BRCA1 ou BRCA2 ont un risque significativement plus élevé de cancer mammaire (d’environ 60 %) et ovarien (de 40 à 60 % pour la mutation BRCA1 et de 15-30 % pour la mutation BRCA2), les cancers les plus fréquents chez les femmes à l’échelle mondiale. La prévalence de ces mutations touche 1 femme sur 300 à 450 en fonction de l’origine ethnique. Par exemple, elle concerne jusqu’à 2,5 % des femmes juives ashkénazes. Des études ont constaté que l’allaitement abaissait le risque de cancers mammaires et ovariens, y compris chez les femmes présentant ces mutations. L’objectif de cette étude israélienne était d’évaluer les recommandations en matière d’allaitement prodiguées par les professionnels de santé aux femmes porteuses des mutations BRCA1/2, via un questionnaire ciblant ces femmes.
Un questionnaire en ligne a été développé. Il comprenait 3 sections : questions sur les données démographiques, socioéconomiques, religieuses, médicales, les antécédents familiaux de cancer et l’âge de la femme au moment de la découverte de son statut pour le BRCA ; questions sur le processus qui a amené à la recherche d’une mutation BRCA1/2, informations reçues à ce moment, explications données au moment de l’annonce des résultats ; qualité du suivi médical et des informations données sur ce suivi et niveau de satisfaction de la femme concernant les informations reçues et le suivi. Les auteurs ont exclu les femmes âgées de > 45 ans au moment de la découverte du port d’une mutation BRCA, ainsi que celles qui ont dit qu’elles n’envisageaient pas d’avoir des enfants et d’allaiter.
Parmi les 689 femmes porteuses BRCA1/2, 388 femmes correspondaient aux critères d’inclusion. Elles avaient 37,6 ± 7,3 ans au moment de l’étude, et 30,5 ± 6,2 ans au moment du dépistage de la mutation. 22,2 % avaient des antécédents personnels de cancer, 90,7 % avaient des antécédents familiaux de cancer et 89,8 % étaient juives ashkénazes. 66,5 % étaient régulièrement suivies par une consultation spécialisée dans le suivi de ces femmes. 60 % n’étaient pas satisfaites des informations reçues de la part des professionnels de santé sur la grossesse et l’allaitement. 76,6 % ont dit n’avoir reçu strictement aucune information sur le sujet, 6,3 % ont reçu des informations succinctes et 2,9 % des informations contradictoires. 4 femmes se sont entendu recommander de ne pas allaiter, une s’est entendue conseiller de sevrer immédiatement et on a suggéré à 7 femmes de limiter la durée de l’allaitement.
Cette étude présente des limitations. La participation des femmes était volontaire, ce qui constitue un biais de sélection. Il aurait pu être intéressant de connaître le point de vue des femmes de > 45 ans et de celles qui n’envisageaient pas d’être enceintes ou d’allaiter. Toutefois, alors que les résultats des études sur le sujet concluent à l’intérêt d’au moins 1 an d’allaitement pour abaisser le risque de cancer du sein chez les femmes porteuses BRCA1/2, il est désolant de voir que plus des ¾ des femmes incluses dans cette étude n’ont reçu strictement aucune information sur le sujet, et que 8 % se sont même entendu déconseiller l’allaitement ou d’en limiter la durée. Cela pourrait être lié au fait que l’imagerie de dépistage d’un cancer du sein, débuté beaucoup plus tôt chez ces femmes, est nettement plus difficile à lire pendant l’allaitement, raison pour laquelle certains conseillent de stopper ce suivi pendant l’allaitement et de le reprendre 6 à 8 semaines après le sevrage. Toutefois, ce suivi reste œuvre des actions de formation et d’information des professionnels de santé sur l’allaitement chez les femmes porteuses BRCA1/2. Recevoir une telle formation devrait être obligatoire. Les associations de femmes concernées pourraient jouer un rôle majeur dans le don d’informations à ces femmes. Davantage d’études évaluant les relations entre les mutations BRCA1/2 et l’allaitement sont nécessaires. Enfin, les recommandations données aux femmes par les services de santé devraient correspondre aux données scientifiques existantes.







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