Une mère qui allaite son enfant est parfois remise en question avec des arguments faisant référence à la théorie psychanalytique. Il est donc important de savoir ce qu'apporte exactement cette théorie sur l'allaitement et le maternage proximal qui l'accompagne. Quelle est la position de Sigmund Freud, le père de la psychanalyse, sur ces sujets ? Dans son ouvrage datant de 1905, Trois essais sur la théorie sexuelle, où il analyse longuement la psychologie de l'enfant, on trouve des réponses à cette question.
Ce que dit Freud sur ces sujets dans Trois essais sur la théorie sexuelle (1905)
Tout d'abord, on constate que pour Freud, seul l'allaitement au sein existe. Il n'est jamais fait mention de lait artificiel, ni même de biberon. La seule fois où il parle d'autre chose est ici : « La première et la plus vitale des activités de l'enfant, la tétée du sein maternel (ou de ses substituts), a dû déjà le familiariser avec ce plaisir. »
Il est probable que par " substituts ", il évoque le pouce ou une autre partie du corps qu’un nourrisson peut téter. L'allaitement est donc la norme pour Freud.
En ce qui concerne les rythmes auxquels il faut donner le sein à un bébé, il n'en est jamais question. L'allaitement à la demande ne doit pas être discutable pour Freud, puisqu'il n'aborde pas ce sujet.
Freud préconise-t-il une durée optimale de l'allaitement ? Voici les passages où il mentionne la fin de l'allaitement :
« Puis le besoin de répétition de la satisfaction sexuelle se sépare du besoin de nutrition, séparation qui est inévitable au moment où les dents font leur apparition et où la nourriture n'est plus exclusivement tétée, mais mâchée. »
« À une certaine époque de l'enfance, après le temps de l'allaitement, habituellement avant la quatrième année, la pulsion sexuelle de cette zone génitale a coutume de se réveiller et de subsister à nouveau quelque temps jusqu'à ce qu'elle subisse une nouvelle répression ou de se maintenir sans interruption. »
On comprend qu’au moment où les dents font leur apparition, les enfants commencent la diversification, et l'allaitement n'est ainsi plus exclusif. Et que le temps de l’allaitement prend fin habituellement avant la quatrième année. Freud ne s’alarme donc pas d’un allaitement qui pourrait être prolongé, et ne donne aucune date butoir qu’il faudrait respecter pour le sevrage.
On remarque d’ailleurs en lisant Freud qu’il ne fait que décrire les pratiques d’allaitement de la société viennoise (voire autrichienne) de son époque (ici 1905), et que ce ne sont pas des modèles à suivre absolument, seulement des constatations. Freud n'est, dans ses écrits, jamais dans la critique ou la préconisation au sujet de l'allaitement.
Dans ce texte, on peut aussi avoir l’éclairage de la psychanalyse sur le maternage proximal. Voici l’opinion de Freud sur des pratiques qui relèvent de ce concept :
« Le commerce de l'enfant avec la personne qui le soigne est pour lui une source continuelle d'excitation sexuelle et de satisfaction partant des zones érogènes, d'autant plus que cette dernière - qui, en définitive, est en règle générale la mère - fait don à l'enfant de sentiments issus de sa propre vie sexuelle, le caresse, l'embrasse et le berce, et le prend tout à fait clairement comme substitut d'un objet sexuel à part entière. La mère serait probablement effrayée si on lui expliquait qu'avec toutes ses marques de tendresse elle éveille la pulsion sexuelle de son enfant et prépare son intensité future.
Elle considère ses actes comme “pur” amour asexuel, puisqu'elle évite soigneusement d'apporter aux parties génitales de l'enfant plus d'excitations qu'il n'est indispensable pour les soins corporels. Mais, comme nous le savons, la pulsion sexuelle n'est pas seulement éveillée par excitation de la zone génitale, et ce que nous appelons tendresse ne manquera pas non plus de faire sentir un jour son action sur la zone génitale. Au demeurant, si la mère comprenait mieux la haute importance des pulsions dans l'ensemble de la vie psychique, dans toutes les réalisations éthiques et psychiques, elle s'épargnerait, même après [qu'on lui ait fourni] les éclaircissements [dont nous parlions], tous les reproches qu'elle est susceptible de se faire. Elle ne fait que remplir son devoir lorsqu'elle apprend à l'enfant à aimer ; celui-ci doit en effet devenir un être humain capable, doté d'un besoin sexuel énergique, et réaliser dans son existence tout ce à quoi la pulsion pousse l'individu. »
Il faut tout d’abord éviter de faire un contresens en lisant Freud : chaque fois qu’il parle de « pulsion sexuelle », il veut dire « poussée qui vise à obtenir une satisfaction », à comprendre au sens large, et les « zones érogènes » sont les lieux du corps concernés. Il explique qu'il n'y a rien de « génital » là-dedans pour l’enfant, c'est-à-dire, dans le langage courant, de « sexuel ». Par exemple, dans le langage freudien, le besoin de succion qu'éprouve l’enfant est une "pulsion sexuelle" dont la "zone érogène" est la bouche, mais il n’y a rien de sexuel au sens de notre langage d’adulte. Cela est du même ordre que ce qui pousse un enfant à avoir envie d’être pris dans les bras, d’être cajolé, ou de sauter dans les bras de son père, toutes ces petites choses que recherche un enfant et qui varient selon son âge.
Freud écrit ainsi que la personne qui s’occupe de l’enfant, généralement la mère, apprend à l’enfant à aimer et prépare ainsi l’adulte qu’il sera demain. Et que c’est finalement son devoir de le caresser, de l’embrasser, de le bercer, de lui adresser toutes les marques de tendresse qu’elle puise en elle pour en faire ainsi plus tard un être humain accompli… Ce que nous appelons aujourd’hui le maternage, Freud le présente donc comme quelque chose d'indispensable à l'équilibre futur de l'enfant, de la part des personnes qui s’occupent de lui.
D’autre part, on peut trouver, sous la plume de Freud, une critique des châtiments corporels : « La stimulation douloureuse de l'épiderme fessier est connue de tous les éducateurs, depuis les Confessions de Jean-Jacques Rousseau, comme une des racines érogènes de la pulsion passive de cruauté. Ils en ont déduit avec raison que les châtiments corporels, qui sont pour la plupart appliqués à cette partie du corps, doivent être évités chez tous les enfants dont la libido est susceptible d'être poussée dans les canaux collatéraux par les exigences ultérieures de l'éducation culturelle. » Comme il n'est pas possible de savoir quels sont les enfants « dont la libido est susceptible d'être poussée dans les canaux collatéraux », on peut en déduire que la fessée doit être évitée.
Il faut donc chercher ailleurs que chez le fondateur de la psychanalyse des critiques sur l’allaitement ou le maternage. Dans Trois essais sur la théorie sexuelle, Sigmund Freud considère le premier comme une norme et le second comme bénéfique et indispensable au développement psychologique de l’enfant. La psychanalyse, l’allaitement et le maternage font donc finalement bon ménage !
Marjorie Dorez-Foucard
Trois essais sur la théorie sexuelle, Folio Essais, 2008.
Je partage le choc et la déception à la lecture de cet article.
Que des psys qui se réclament de Freud disent des sottises... c'était attendu vu leur référence ! Quel besoin de leur répondre ?
Le site ne devrait-il pas contenir des articles aux sources scientifiques fiables pour les femmes qui cherchent de réels conseils pratiques ?
Bonjour,
Je suis d’accord avec le commentaire précisant le manque de sources et de rigueur scientifique apporté par cet article.
Ça ne fait pas honneur à la leche ligue.
Dans notre intérêt commun à tous il serait vital de ne pas mélanger la psychanalyse à vos articles.
Cordialement
Isis
Bravo ! Un superbe écrit pour bien remettre les idées à plat !
Restons ouverts, avec les sciences humaines empiriques comme la psychanalyse et les apports des sciences "dures". Le développement des sciences doit rester diversifier pour exister !
L'important est que chacun reste à sa place, notamment les journalistes...
"Le sein nourricier de sa mère est pour l'enfant le premier objet érotique, l'amour apparaît en s'étayant à la satisfaction du besoin de nourriture. Au début, l'enfant ne différencie certainement pas le sein de son propre corps. C'est parce qu'il s'aperçoit que ce sein lui manque souvent que l'enfant le sépare de son corps, le situe au "dehors" et le considère dès lors comme un "objet", un objet chargé d'une partie de l'investissement narcissique primitif et qui se complète par la suite en devenant la personne maternelle. Celle-ci ne se contente pas de nourrir, elle soigne l'enfant et éveille ainsi en lui maintes autres sensations physiques agréables ou désagréables. Grâce aux soins qu'elle lui prodigue, elle devient sa première séductrice. Par ces deux sortes de relations, la mère acquiert une importance unique, incomparable, inaltérable et permanente et devient pour les deux sexes l'objet du premier et du plus puissant des amours, prototype de toutes les relations amoureuses ultérieures. Ici, le fondement phylogénétique prédomine à tel point sur les facteurs personnels, accidentels, qu'il importe peu que l'enfant ait réellement tété sa mère ou qu'il ait été nourri au biberon sans connaître jamais les tendres soins maternels. Le développement est semblable dans les deux cas. Il se peut même que la nostalgie, dans le second cas, n'en soit ultérieurement que plus forte. Si longtemps, d'autre part, que l'enfant ait tété le sein de sa mère, il restera toujours convaincu, après le sevrage, d'avoir tété trop peu et pendant un temps trop court."
Sigmund Freud, Abrégé de psychanalyse, 1938, première publication en allemand en 1946, p. 59.
Freud met en avant le sein maternel mais aussi il nous fait part du biberon dans se passage" l'enfant ait réellement tété sa mère ou qu'il ait été nourri au biberon" et pour répondre à la durée de la tété chez le nourrisson, dans un recueil de Freud sur la féminité, il précise bien que l'allaitement est de 4 mois et pour ceux (les mères) qui allaitent au delà de cette durée sont considérés de primitifs.
Cet article a été écrit par quelqu'un qui a découvert que le discours des psys à propos de l'allaitement long notamment, psys qui se réclament de Freud, ne pouvait pas s'appuyer sur les écrits de Freud sur le sujet.
C'est à ce titre que nous l'avons mis sur le site.
Bonjour,
Je suis choquée de voir un article résumant le point de vue d’un psychanalyste sur le site d’internet d’une association qui met toujours en avant la recherche et les données.
Le point de vue de Freud n’a rien de scientifique. Il était simplement un personnage “il était une fois” et ses travaux sont des simples mémoires subjectifs fondée sur aucune preuve ou plan expérimental.
La psychanalyse est et à toujours été Obsolète. Je suis énormément choquée et déçues de voir que LLLF n’est finalement pas si scientifique que ça.
Cordialement,
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