En 2010, un chercheur en sciences de l’éducation, Hugues Bardon, écrivait dans la revue Travail, genre et sociétés un article intitulé "Allaiter et travailler : puisqu’on vous dit que c’est possible !"
L’objectif de l’article était, je cite, "de montrer que le discours de la promotion de l’allaitement maternel [Ndlr : en particulier celui de La Leche League], tout en s’adaptant sur le plan rhétorique à la réalité contemporaine du travail des femmes afin de ne pas se couper de son public, est, sur le fond, resté le même que celui qui était tenu jusque dans les années 1980. Il tend à privilégier l’allaitement au détriment de l’activité professionnelle. Cette pseudo-évolution a été rendue possible grâce à des ressorts rhétoriques qui permettent, tout en prétendant soutenir une thèse, de faire prévaloir celle inverse, ce qui revient, tout en s’en défendant, à remettre en cause le travail des femmes".
Il assimilait ce que peut dire une association comme LLL à propos de travail et allaitement à "une véritable entreprise de gouvernement des autres de nature biopolitique […] c’est-à-dire une entreprise de gouvernement des individus non seulement grâce à des dispositifs disciplinaires, mais surtout grâce à des dispositifs de communication qui, sous des apparences non contraignantes, amènent les individus à un gouvernement de soi, auto-contrôlé […] Ici il s’agit plus précisément d’un gouvernement des femmes, de façon à les amener, dans ce domaine qui présente pour elles des enjeux si importants, à se rendre captives d’un modèle qu’on leur présente comme simple à réaliser et qui les amènera à se sentir coupables et incompétentes si elles échouent". Rien que ça !
Toutes les femmes qui témoignent dans le hors-série d'Allaiter aujourd'hui (en vente dans la boutique) seront sans doute étonnées d’apprendre qu’elles "participent volontairement et activement à leur soumission aux pouvoirs sociaux et médicaux qui tendent à imposer un allaitement maternel de longue durée au détriment de leur activité professionnelle".
J’ai tenu à citer largement cet article car il montre à mes yeux à quel point un certain discours sociologique et philosophique peut être déconnecté de la réalité.
Quels sont ces pouvoirs sociaux et médicaux qui veulent imposer un allaitement long aux femmes ?! Où les a-t-il rencontrés ? Dans la réalité, ces fameux pouvoirs font plutôt tout ce qu’ils peuvent pour empêcher les femmes d’allaiter longtemps, n’est-ce pas ?
En tout cas, ce n’est pas ce genre d’article qui nous dissuadera de redire encore et encore : oui, allaiter et travailler, c’est possible ! Et de laisser la parole à toutes celles pour qui, justement, cela a été possible !
À noter : "possible" ne veut pas dire "obligatoire", ni nécessairement "facile". Possible, c’est possible, tout simplement.
Claude Didierjean-Jouveau
Claude-Suzanne Didierjean-Jouveau
Pour plus d'informations sur le sujet, allez voir le dossier Travail et allaitement.
Bonjour,
Je confirme c'est possible ! J'ai allaité mes 2 filles jusqu'à leur premier anniversaire tout en travaillant.
Cela a demandé un peu d'organisation mais cela valait vraiment la peine.
Anne - Femme de Hugues Bardon, auteur de la thèse cité dans cet article
Merci 1000 fois pour vos précieux conseils !
Et oui allaiter et travailler c'est possible.
En temps qu'infirmière je n'ai pas le temps de tirer mon lait mais ma lactation s'est vite adapté à ce nouveau rythme et bébé se régale toujours autant à 1an!
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