Dr Julie Hamdan, animatrice LLLF, médecin généraliste diplômée DIULHAM, consultante en lactation IBCLC,
et Marie Courdent, animatrice LLLF Lille, consultante en Lactation certifiée IBCLC, Diplôme InterUniversitaire de Lactation Humaine et Allaitement Maternel, infirmière-puéricultrice
Octobre 2025
Sommaire de la page
Q1 – Que dit l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) sur l’âge de la diversification alimentaire ?
Q2 – Discordances de recommandations vis-à-vis du début de la diversification : 4 mois vs 6 mois
Q3 – Ordre d’introduction des aliments – introduction des allergènes alimentaires
Q4 – Diversification alimentaire chez un bébé déjà allergique
Q5 – À partir de la vidéo de l'intervention du Professeur Turck lors de la conférence du 14 mars 2023 au CHU de Lille, "Alimentation : un enjeu santé pour maman et bébé", dans le cadre des 1000 jours. À la minute 41.25, question de la salle : "Dans le cadre des allergies familiales, est-ce qu'il y a des recommandations particulières pour l'introduction de certains aliments ?"
Q6 – Âge de la diversification et Diversification Menée par l’Enfant (DME)
Q7 – Quels sont les avantages à diversifier aux alentours de 6 mois plutôt qu’à 4 mois ?
Q1 – Que dit l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) sur l’âge de la diversification alimentaire ?
L’OMS dit sur ce sujet, et ce sans ambiguïté (article publié le 20 décembre 2023) : “L’allaitement au sein exclusif pendant une période de 6 mois présente bien des avantages pour le nourrisson et la mère, en premier lieu celui de protéger contre les infections gastro-intestinales, tant dans les pays en développement que dans les pays industrialisés.
Le lait maternel est aussi une source importante d’énergie et de nutriments pour les enfants de 6 à 23 mois. Il peut fournir la moitié ou plus des besoins énergétiques de l’enfant de 6 à 12 mois, et le tiers des besoins énergétiques de l’enfant de 12 à 24 mois. (...)
L’alimentation de complément :
Vers l’âge de 6 mois, le nourrisson commence à avoir des besoins d’énergie et de nutriments que le lait maternel ne peut plus satisfaire, d’où le recours aux aliments de complément. À 6 mois environ, son développement lui permet aussi de s’alimenter autrement. Les principes directeurs d’une alimentation de complément adaptée sont les suivants :
• poursuivre un allaitement fréquent, à la demande, jusqu’à l’âge de 2 ans, voire plus ;
• être à l’écoute (par exemple, nourrir les tout-petits directement et aider les plus grands. Nourrir les enfants lentement et patiemment, les encourager à manger mais ne pas les forcer, leur parler et garder le contact visuel avec eux) ;
• respecter les règles d’hygiène et manipuler correctement les aliments ;
• commencer à 6 mois par de petites quantités et augmenter progressivement la ration alimentaire à mesure que l’enfant grandit ;
• augmenter progressivement la consistance et la variété des aliments ;
• augmenter la fréquence des repas : 2 à 3 repas par jour pour des nourrissons de 6 à 8 mois, et 3 à 4 repas par jour pour des nourrissons de 9 à 23 mois, avec une ou deux collations supplémentaires, au besoin ;
• utiliser des aliments de complément enrichis ou une supplémentation en vitamine et en minéraux, le cas échéant (NDLR : sur prescription médicale, pour des situations particulières) ; et
• augmenter l’apport liquide en cas de maladie, y compris l’allaitement, et proposer des aliments mous, que l’enfant apprécie.”
Source : https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/infant-and-young-child-feeding
Q2 – Le médecin qui suit mon bébé, exclusivement allaité, me demande de commencer la diversification alimentaire à ses 4 mois de vie. Je souhaitais pourtant suivre la recommandation de l’Organisation Mondiale de la Santé qui préconise 6 mois d’allaitement exclusif. Que faut-il penser de cette discordance ?
Les sociétés savantes internationales ont établi des recommandations qui peuvent en effet déjà entrer en contradiction entre elles :
• L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a établi sa recommandation actuelle en 2001 ; celle-ci a été réaffirmée en 2023. C’est une recommandation valable pour l’ensemble des pays du monde, pays à niveaux de revenus faibles, intermédiaires et élevés compris. L’OMS recommande 6 mois d’allaitement exclusif, puis la poursuite de l’allaitement jusqu’à 2 ans ou plus en association avec la diversification alimentaire, (Sources : Victora, Cesar G, et al., « Breastfeeding in the 21st Century: Epidemiology, Mechanisms, and Lifelong Effect". The Lancet, vol. 387, n° 10017, janvier 2016, p. 475‑90. Et ; WHO guidelines 2023),
• L’ESPGHAN, European Society for Paediatric Gastroenterology Hepatology and Nutrition, s’est accordée en 2017, sur la base de preuves peu solides, pour recommander un démarrage de la diversification pas avant 17 semaines de vie (4 mois) et pas après 26 semaines (6 mois). Cette recommandation a été comprise et retransmise comme : démarrer la diversification à 17 semaines (4 mois), occultant la deuxième partie de la phrase,
• L’EFSA, Autorité Européenne de Sécurité des Aliments, déclare en 2019 ne trouver ni intérêt, ni nocivité à introduire une alimentation complémentaire à l’allaitement entre 4 et 6 mois.
Les recommandations françaises, quant à elles, ont progressivement évolué vers un avancement de l’âge conseillé pour démarrer la diversification. En effet, en 2015, la Société Française de Pédiatrie (SFP) évoquait le démarrage de la diversification comme une possibilité à partir de 4 mois, mais précisait ne pas y voir d’intérêt nutritionnel, le lait maternel couvrant tous les besoins nutritionnels du nourrisson jusqu’à 6 mois. En 2022, la même SFP faisait évoluer sa déclaration pour recommander une diversification alimentaire entre 4 et 6 mois. Cette dernière recommandation se retrouve dans les programmes gouvernementaux français du Programme National Nutrition Santé (PNNS 4) 2019-2023, et Manger Bouger en 2022 également. Voici ce qu’en dit le PNNS : “Commencez quand vous le souhaitez : à partir de 4 mois ou un peu plus tard, en particulier si votre enfant est prématuré. Si c’est votre cas, demandez un avis médical. Mais rappelez-vous qu’après 6 mois révolus, le lait seul ne suffit plus à couvrir ses besoins."
Si l'on résume, les sociétés savantes s’accordent toutes pour dire que le lait maternel couvre absolument tous les besoins du bébé jusqu’à ses 6 mois. Alors, pourquoi est apparue cette échéance de 4 mois ?
Ces dernières années, des chercheurs en allergologie pédiatrique se sont demandés si exposer les nourrissons plus précocément aux allergènes alimentaires pouvait induire une tolérance vis-à-vis de ces allergènes, et donc diminuer la prévalence des allergies alimentaires chez l’enfant. Plusieurs études se sont donc penchées sur la question, avec des interventions variées : introduction d’un ou plusieurs allergènes (œuf, lait de vache, gluten, poisson, arachide…), sous des formes diverses (poudre d’œuf déshydratée, marque de yaourt bien spécifique…) et à des âges variés (3 mois, 4 mois, 6 mois, entre 6 et 12 mois, etc.). Certaines études montrent, dans la population qu’elles étudiaient, une réduction du risque allergique pour tel ou tel antigène (l’arachide, l'œuf, notamment). Leurs résultats ne permettent cependant pas de tirer des conclusions à large échelle et notamment pas d’en conclure qu’il est préférable d’avancer l’âge de la diversification de manière globale, pour plusieurs raisons :
• Problème dans l’élaboration de ces études (Sources : Breen, Catherine, et al., "Food Allergy Prevention: Is Earlier Complementary Food Introduction Really the Optimal Approach?", Clinical & Experimental Allergy, août 2025, p. cea.70142. Et du même auteur, format vidéo, en anglais) : pour tester l’effet de l’avancement de l’âge de la diversification, il aurait fallu tester uniquement un changement dudit âge de diversification, sans jouer sur d’autres paramètres tels que l’ordre d’introduction des aliments, le type d’aliment donné (par exemple, poudre d’œuf déshydratée qui n’est pas un aliment courant) ou la fréquence de l’aliment donné. Modifier les paramètres un à un permet d’évaluer l’effet de ce paramètre, isolément. Or, à ce jour, aucune étude n’a comparé une diversification “habituelle” à 4 mois versus une diversification “habituelle” à 6 mois, sans rien changer d’autre.
• Pas d’information sur l’innocuité de cette modification de pratique : si une étude donnée montre une diminution de la prévalence des allergies en modifiant tel paramètre, cela ne nous donne pas d’information sur les risques éventuels associés à cette pratique. On parle de balance bénéfice-risque. Des surrisques éventuels, par exemple d’obésité ultérieure liée à l’utilisation plus précoce de produits alimentaires transformés, ou d’infection liée à un écourtement de l’allaitement exclusif ou la modification du microbiote du bébé, sont des hypothèses qui pourraient être testées avant que les recommandations soient largement modifiées.
• Liens financiers des sociétés d’allergologie avec les industries : comme l’a montré une étude récente, “il existe une forte prévalence des relations financières entre les professionnels de santé spécialisés en allergologie et immunologie pédiatrique et l'industrie des aliments pour nourrissons, en particulier dans les pays à revenu élevé. Ce soutien fréquent de l'industrie, associé à l'absence de politiques en matière de conflits d'intérêts, soulève de sérieuses préoccupations quant à l'influence potentielle sur les recommandations professionnelles, en particulier dans un domaine aussi sensible que la nutrition infantile et les allergies” (Henke‐Ciążyńska, Katarzyna, et al. "Financial Ties of Paediatric Allergy and Immunology Professional Associations With the Formula Milk Industry: A Global Cross‐Sectional Study". Clinical & Experimental Allergy, mai 2025, p. cea.70064.).
Bien que cela ne fasse pas consensus dans la communauté scientifique, certaines sociétés savantes comme l’ESPGHAN et la SFP ont donc tout de même modifié leurs recommandations pour avancer l’âge de la diversification.
Il est à noter que de nombreux autres pays n’ont pas fait évoluer leurs préconisations qui restent concordantes avec celles de l’OMS. Ainsi, le Canada, l’Italie, l’Angleterre, les États-Unis, l’Australie, les pays d’Europe du Nord, les pays baltes, par exemple, recommandent toujours un allaitement exclusif de 6 mois, et s’alignent avec la position de nombre d’entités ou associations œuvrant en faveur de l’allaitement, comme LLL, IBFAN, etc.
Figure tirée de l'article de Breen, Catherine, et al. "Food Allergy Prevention: Is Earlier Complementary Food Introduction Really the Optimal Approach?"
Clinical & Experimental Allergy, août 2025, p. cea.70142 (traduction libre)
Q3 – Le médecin qui suit mon bébé insiste pour que, dès le début de la diversification alimentaire, j'introduise les fruits à coque et les autres allergènes. Autour de moi, les parents semblent pourtant commencer par des fruits et légumes. Que penser ? Dans quel ordre introduire les premiers aliments solides ?
L’ordre d’introduction des aliments n’est pas le même d’un pays à l’autre, et est plutôt basé sur les habitudes culturelles et les régimes alimentaires différents, sans qu’un ordre particulier ait fait la preuve d’un avantage par rapport à un autre.
Historiquement, les bébés français recevaient plutôt des fruits et des légumes en premier lieu : plutôt par habitude qu’autre chose, donc. Pourtant, si la diversification a vocation, entre autres, à apporter au bébé les micro-nutriments que le lait ne couvre plus totalement après 6 mois, la logique voudrait qu’on introduise des aliments riches en fer et en zinc en priorité. Voir Comment mener la diversification alimentaire d'un bébé allaité.
Entre ses 6 mois et 12 mois, le nourrisson voit ainsi progressivement s’élargir le panel des aliments qu’il mange, jusqu’à avoir goûté à l’ensemble de ce qui fait l’alimentation familiale.
Le lait maternel reste la source principale d’alimentation pendant les premiers mois de la période de diversification alimentaire, jusqu’à ce que l’alimentation solide prenne le dessus, en général autour de l’âge d’un an. Les produits laitiers animaux (yaourts, fromage blanc, etc.) peuvent être démarrés au même titre que les autres aliments de diversification, en parallèle des tétées. Lorsque le bébé est gardé par une tierce personne, un produit laitier solide peut remplacer tout ou partie du lait maternel qu’il aurait bu en présence de sa maman ; en général, il/elle compensera par un plus grand nombre de tétées lorsque le sein lui sera de nouveau disponible.
En ce qui concerne les allergènes alimentaires, les recommandations françaises ont opéré un revirement total en une vingtaine d'années : quand on préconisait autrefois de retarder après 9 mois, voire un an, l’introduction de certains aliments (arachide, œuf, fraise, etc.), les études nous montrent aujourd’hui que cette attitude ne prévient pas les allergies alimentaires, et peut même en augmenter la prévalence.
Les allergènes sont donc à démarrer au même titre que tous les aliments de diversification, un aliment nouveau à la fois, au départ en petite quantité qui pourra augmenter progressivement. Les fruits à coque, le poisson, l’œuf, etc. peuvent donc s’introduire dès le début de la diversification, un à un, comme tous les autres aliments, avec une texture adaptée à l’âge du bébé : par exemple de très petites doses à donner sur le doigt et faire directement téter par le bébé, ou de la purée ou poudre (amande, arachide…) diluée dans du lait ou de la compote, etc. Les aliments que le bébé a déjà reçus depuis le début de la diversification peuvent continuer à lui être proposés régulièrement, afin d’entretenir le phénomène de tolérance alimentaire. Cette ligne de conduite est valable également chez les enfants dits “à risque allergique”, dont un parent, un frère ou une sœur souffre d’une allergie alimentaire.
Plus récemment, dans la lignée de ce qui a été expliqué dans la question précédente, certains allergologues sont allés encore plus loin en demandant de commencer par les aliments les plus allergènes. Or, comme on l’a vu, les études récentes ne justifient pas, à ce jour, de modifier à large échelle les recommandations.
Q4 – Les professionnels de santé me disent que la diversification alimentaire très tôt vise à éviter les allergies alimentaires. Or mon bébé de 4 mois exclusivement allaité a déjà des manifestations d’allergie retardée à plusieurs aliments (lait de vache, fruits à coque…) via mon lait. Que faire ?
Hormis l’éviction des aliments auxquels il/elle réagit, le reste de la diversification peut s’envisager chez le bébé allergique exactement comme chez un bébé non allergique. La réintroduction des aliments concernés par l’éviction se fait selon les préconisations du médecin référent de l’enfant.
Ce guide d'Allergies Québec (avril 2024) peut répondre à certaines de vos questions : Guide d'introduction des allergènes prioritaires chez les nourrissons. “Chez les nourrissons à haut risque, encourager l’introduction précoce des aliments allergènes comme les arachides et les œufs cuits (pas crus) à la maison, vers l’âge de 6 mois, mais pas avant l’âge de quatre mois, d’une manière sécuritaire et adaptée au développement. Chez les nourrissons à faible risque d’allergie alimentaire, les aliments allergènes peuvent également être introduits vers l’âge de 6 mois”
Q5 – À partir de la vidéo de l'intervention du Professeur Turck lors de la conférence du 14 mars 2023, au CHU de Lille, "Alimentation : un enjeu santé pour maman et bébé", dans le cadre des 1000 jours. À la minute 41.25, question de la salle : "Dans le cadre des allergies familiales, est-ce qu'il y a des recommandations particulières pour l'introduction de certains aliments ou pas ?"
R du Professeur Dominique Turck (Département de Pédiatrie, Faculté de Médecine, CHR Lille) – "Je profite de votre question pour tordre le coup à un bruit de fond d'une recommandation qui n'en est pas une de quelques pédiatres allergologues qui recommandent, chez les enfants allaités exclusivement, de donner à partir de l'âge d'un mois 10 ml d'un lait pour nourrissons. C'est non fondé par la science, et c'est totalement irresponsable en termes de recommandation. Ce n'est pas un comité d'experts, c'est des gens qui se sont réunis, c'est la liberté de chacun d'écrire "Nous, on pense que", c'est une étude japonaise, une, et qui est mal faite sur le plan méthodologique... Pourquoi cette étude a eu tant d'écho ? Surprenant ! On peut se poser la question du fait que certains, suivez mon regard, aient donné de l'écho pour des raisons bassement mercantiles, mais c'est pas bien du tout, c'est pas bien du tout. Quand on fait une recommandation, on doit se mettre tous ensemble, on doit s'asseoir, on ne doit pas s'envoyer des scuds des allergologues ou nutritionnistes, des pédiatres à je ne sais quoi, c'est vraiment pas bien. Pour les enfants qui ont un risque allergique parce que papa, maman, frère, sœur... a une allergie authentique, au jour d'aujourd'hui, il n'y a aucune raison de faire différemment des autres enfants."
Q6 – Je voulais pratiquer la DME, mais le médecin m'a conseillé de diversifier mon bébé dès ses 4 mois. Pourtant, il n’est pour le moment pas intéressé par ce que je mets devant lui. Qu’en pensez-vous ?
On retrouve, chez l’ensemble des sources qui recommandent un allaitement exclusif de six mois, l’OMS en tête, la notion d’observation de l’enfant et des signes qu’il/elle est prêt.e à manger autre chose que du lait. L’OMS nous dit ainsi : “Vers l’âge de 6 mois, le nourrisson commence à avoir des besoins d’énergie et de nutriments que le lait maternel ne peut plus satisfaire, d’où le recours aux aliments de complément. À 6 mois environ, son développement lui permet aussi de s’alimenter autrement.”
Ainsi, plutôt que de regarder le calendrier et établir une date à laquelle tous les enfants devraient démarrer la diversification, les parents sont invités à regarder leur enfant et observer son intérêt pour la nourriture solide et ce qu’il y a dans l’assiette de ses proches, observer son tonus (se tient droit quand il/elle est placé.e sur une chaise haute ou sur les genoux), ses progrès en motricité (attrape les objets devant lui/elle, les porte à sa bouche). Toutes ces avancées sur le plan psychomoteur ne sont pas attendues d’un bébé de 4 mois, mais plus tard, autour de 6 mois. L’approche Diversification Menée par l’Enfant (DME) consiste à proposer à l’enfant non pas des purées d’aliments lisses données à la cuillères, mais des aliments en morceaux, de texture adaptée (mous), qu’il peut attraper lui-même et porter à sa bouche : par exemple, un morceau de carotte bien cuite, une banane bien mûre, etc. Certains parents optent pour une approche un peu intermédiaire avec des textures mixées en purées et compotes, en laissant le bébé découvrir avec une petite cuillère dans les mains, ou même directement avec les mains. Dans ce cas, comme en DME, le bébé gère les quantités d’aliments ingérés, les parents ne cherchent donc pas à finir le contenant ou à donner une quantité prédéfinie, ni à donner directement la cuillère à l’enfant.
Les avantages de la DME sont multiples : l’enfant développe sa motricité, est acteur dans sa prise alimentaire, choisit la quantité qu’il absorbe et apprend à gérer sa sensation de satiété. En cela, la DME est dans la continuité de l’allaitement au sein depuis la naissance, qui permet au bébé de boire la quantité dont il a besoin. L’approche DME ne semble donc pas compatible avec un début de diversification à 4 mois.
Voir la vidéo de la conférence d'Adriano Cattaneo.
Q7 – Quels sont les avantages à diversifier aux alentours de 6 mois plutôt qu’à 4 mois ?
Retarder la diversification permet avant tout… de prolonger l’allaitement !
Des études ont montré un lien entre introduction précoce des aliments de diversification et durées d’allaitement raccourcies. Par exemple, en Suède, bien que les recommandations soient actuellement de démarrer avec de petites quantités (1 ml) d’aliments, donnés par exemple sur le bout d’un doigt, en conservant ces petites quantités jusqu’à 6 mois, en pratique les parents augmentent souvent rapidement les quantités de solides. Une étude de 2023 a montré que plus les “petites quantités” (tiny tastes) étaient démarrées tôt, plus les volumes de solides augmentaient rapidement et plus la durée d’allaitement était courte.
Ainsi, certains enfants peuvent avoir tendance à se détourner du sein après avoir mangé d’autres aliments en quantité significative. Or, le lait maternel, même s’il n’est plus suffisant à partir de 6 mois pour couvrir tous les besoins nutritionnels du bébé, reste l’aliment principal de son alimentation jusqu’à l’âge d’un an. Le lait maternel reste bien plus riche en calories que beaucoup d’aliments couramment proposés en France au début de la diversification, fruits et légumes en tête. Privilégier des légumes riches en eau au début du repas peut diminuer le volume de lait que l’enfant prend en tétant juste après, diminuant par la même occasion le nombre de calories avalées. Si, pendant la période de diversification, l’enfant a tendance à bouder ou refuser le sein quand il a déjà avalé un peu d’aliments solides, les parents peuvent privilégier de donner en premier lieu la tétée, avant de proposer les aliments complémentaires. Les tétées restent à la demande, ce qui contribue à bien stimuler la lactation, et peuvent donc s’intercaler avant, pendant, après le repas solide qui, souvent, est pris à heure plus fixe en fonction de l’organisation familiale.
Une diversification plus précoce et un allaitement écourté risquent donc de limiter les bienfaits de l’allaitement prolongé. C’est “l’effet-dose” : plus l’allaitement est long, plus les bénéfices seront, théoriquement, significatifs. Cela étant, peu d’études ont étudié les bénéfices de l’allaitement exclusif pendant 6 mois, la plupart des études observationnelles comparant des durées d’allaitement sans prendre en compte le caractère exclusif ou non de l’allaitement. Certaines études l’ont néanmoins pris en compte, et effectivement constaté un bénéfice lorsque l’allaitement était exclusif pendant six mois (baisse du risque d’otite et d’obésité notamment. Source : Breastfeeding beyond six months: evidence of child health benefits. Froń A, Orczyk-Pawilowicz M. Nutrients. 2024 ; 16 : 3891).
Dans le cadre d’une diversification démarrant à 6 mois, il est bien sûr possible d’introduire dès le départ les allergènes ainsi que des aliments riches en fer et zinc, oligo-éléments qui viennent à manquer en premier dans le lait maternel.
L’observation des nourrissons montre qu’aux alentours de 6 mois, ils sont prêts à être acteurs de leur alimentation. Ils sont alors, le plus souvent, partants ! Chaque bébé est unique, la formulation “aux alentours de 6 mois” permet donc un peu de souplesse, car certains bébés seront prêts un peu plus tôt, d’autres un peu plus tard. La diversification peut alors débuter sous forme de solides aux textures adaptées (DME) et/ou de purée, en fonction des souhaits des parents et des réactions du bébé.
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