Cet article est paru dans Allaiter aujourd'hui n° 57, LLL France, 2003
On a longtemps considéré les douleurs de mamelons comme une fatalité frappant les peaux claires et/ou fragiles ou comme la « punition » de celles qui n’avaient pas assez bien « préparé leurs mamelons » pendant la grossesse. On sait maintenant depuis une vingtaine d’années le rôle de la position du bébé au sein, de la position de ses lèvres, de ses gencives, de sa langue… dans l’apparition de ces douleurs.
Il n’en reste pas moins que des femmes souffrent de douleurs de mamelons et/ou de seins alors même que leur bébé tète correctement. Une des causes possibles en est la candidose mammaire, malheureusement très peu connue des professionnels de santé, et donc mal diagnostiquée et mal traitée.
Quels sont les symptômes qui doivent faire penser à une candidose mammaire ?
La candidose provoque une douleur intense au niveau des mamelons, puis à l’intérieur du sein quand la mycose « remonte » le long des canaux lactifères.
La douleur est à type de brûlure, les femmes parlent d’élancements rayonnants, de « feu liquide »…
Elle est ressentie pendant toute la tétée, est souvent plus intense en fin de tétée, et persiste entre les tétées (ce qui la différencie des douleurs provoquées par la succion du bébé).
Les mamelons peuvent être irrités, avoir un aspect rose luisant, être le siège de démangeaisons.
Le bébé peut avoir du muguet dans la bouche, un érythème fessier.
Attention : tous ces symptômes ne sont pas nécessairement présents en même temps (souvent, le seul symptôme est la douleur caractéristique décrite par la mère). Et contrairement à ce que laisserait supposer une affection contagieuse comme une mycose, ils peuvent n’être présents que sur un seul sein.
Qu’est-ce qui provoque la candidose ?
Comme son nom l’indique, le responsable est le Candida albicans qui, lorsqu’il prolifère de façon anormale, devient pathogène.
Les facteurs favorisants sont : l’existence chez la mère d’un autre site de candidose (notamment vaginale), la prise d’antibiotiques, une crevasse favorisant la surinfection, une fatigue et tout ce qui abaisse les défenses immunitaires, le port de coussinets et/ou de vêtements favorisant la macération (le Candida albicans aime les environnements chauds, humides et obscurs…), la prise de pilules contenant des œstrogènes, le trop ou le pas assez d’hygiène…
Faut-il faire des examens ?
C’est absolument inutile. La recherche du Candida est totalement aléatoire, et les examens ne donnent généralement rien. La décision de traiter se prend au vu des symptômes (en particulier la douleur caractéristique). Si le traitement apporte un soulagement rapide, c’est qu’il y avait bien candidose.
Qui traiter ?
Il est très important que la mère et l’enfant soient traités simultanément et pendant la même période de temps, et ce même si l’enfant ne présente aucun symptôme. Sinon, ils vont se réinfecter l’un l’autre dans un cycle sans fin.
Avec quoi ?
Le but du traitement est de limiter la prolifération du Candida et de rétablir des conditions qui restaureront la flore normale et le niveau immunitaire. On peut utiliser des traitements locaux et généraux, seuls ou en conjonction.
Parmi les traitements locaux, il y a d’abord le violet de gentiane (solution aqueuse à 1 %), normalement facile à se procurer (sans ordonnance) en pharmacie, rapidement efficace et peu coûteux. (Sur le violet de gentiane, voir : Controverses autour du violet de gentiane : où en est-on en 2020 ?)
Les antifongiques locaux peuvent être utilisés en suspensions buvables, en crèmes ou en gels (Daktarin®…). Le traitement est appliqué sur les seins et dans la bouche du bébé après chaque tétée.
Le Candida devenant de plus en plus résistant aux antifongiques les plus courants, il peut s’avérer nécessaire de frapper plus fort, avec du fluconazole. La plupart des médecins sont réticents à proposer ce traitement, car le fluconazole passe dans le lait (c’est d’ailleurs pour cela qu’il est efficace pour traiter une candidose des canaux lactifères). Cependant, les études n’ont montré aucun effet iatrogène chez les enfants exposés au fluconazole par le biais du lait maternel. C'est d'ailleurs un médicament utilisé en pédiatrie, même pour des prématurés
Enfin, en cas d’échec du traitement local, un traitement par voie générale peut s’avérer nécessaire.
Pendant combien de temps ?
Pour limiter le risque de récidive, le traitement doit être poursuivi assez longtemps. Il ne faut surtout pas l’arrêter à la disparition des symptômes. Les spécialistes recommandent de le poursuivre jusqu’à deux semaines après disparition de tous les symptômes.
Faut-il prendre des mesures d’hygiène ?
Les précautions à prendre sont celles qu’on recommande dans tous les cas de mycose, c’est-à-dire désinfecter régulièrement tout ce qui est en contact avec les seins de la mère et la bouche du bébé : mains, vêtements, tétines, sucettes, anneaux de dentition, jouets, coussinets d’allaitement, tire-lait… Le lait tiré pendant un épisode de candidose peut être donné au bébé. Par ailleurs, selon le protocole de l'Academy of Breastfeeding Medicine sur la conservation du lait humain (2017), "Si une mère souffre d’un problème de mamelons douloureux qui semble lié à une infection bactérienne ou mycosique, rien ne permet de penser que le lait exprimé et stocké à ce moment doit être jeté".
Dans certains cas particulièrement rebelles, il peut être nécessaire de traiter tous les membres de la famille.
Comment éviter que ça recommence ?
Dans certains cas particulièrement coriaces, il peut être nécessaire de traiter tous les membres de la famille.
Si une mère a des candidoses mammaires à répétition, il peut être utile de voir si elle ne souffre pas d’une affection qui abaisserait son niveau immunitaire.
Pour certains, le guérison des mycose serait dans une alimentation adaptée, pauvre en sucres rapides et en aliments contenant des levures alimentaires, riche en produits tels que les yaourts. Certaines mères se sont trouvées bien de prendre du Lactobacillus acidophilus et/ou du Bifidobacterium bifidum, ou de l’ail, ou des céréales complètes, ou un complexe de vitamine B, ou des oligo-éléments stimulant le système immunitaire, ou des vitamines, ou de la propolis, ou un traitement homéopathique.
Pour plus d'informations, allez voir le dossier Candidose mammaire, et notamment le DA 82.
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Allez voir cette page :
https://www.lllfrance.org/vous-informer/fonds-documentaire/feuillets-du-dr-newman/962-feuillet-6-uttilisation-violet-gentiane
Bonjour, comment utilise t-on le violet de gentiane? À quelle fréquence?
On traite le bébé aussi
Merci
Le bicarbonate de soude a t il été efficace pour traiter la mycose mammaire ?
Merci beaucoup pour toutes ces informations. Ma sage femme m'a recommandé de nettoyer les mamelons avant et après les tétées avec une compresse imbibée d'eau et de bicarbonate de soude. Et bien sécher la zone.
Merci pour ces informations claires, précises...
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