Chaque projet d’allaitement est unique, et comme tout projet, il est fait pour évoluer. Un grand nombre de mères se retrouvent à allaiter finalement plus longtemps qu’elles ne l’avaient imaginé au départ, tandis que d’autres restent sur leur intention d’origine, contentes de ce qu’elles ont vécu et ne souhaitant pas – ou ne pouvant pas – poursuivre plus longtemps.
Comment faire pour guider un bébé du sein vers une alimentation avec une préparation pour nourrissons au biberon ?
Quelles formes peut prendre le sevrage du sein ?
Une maman peut souhaiter remplacer une tétée par jour, le plus souvent en introduisant un biberon avec un autre lait que le sien, à l’heure qui lui convient. Il peut y avoir des jours avec biberon et des jours sans, ou des soirées avec et des soirées sans, ou des nuits avec et des nuits sans. En fonction de l’âge du nourrisson, de l’importance de la lactation avant l’introduction de ce biberon quotidien, de la discipline des parents qui ne passent pas de 1 à 2, 3, puis 4… biberons quotidiens, la production de lait maternel peut rester suffisante pour le bébé.
Certaines mamans vont réussir à allaiter des mois avec un biberon ou deux par jour, et la poursuite de l’allaitement se fait alors avec une grande souplesse. D’autres, au contraire, verront leur lait diminuer très rapidement dès l’introduction d’un biberon quotidien.
Pour ces dernières, commencer les biberons peut signer le début d’une baisse inéluctable de la production lactée. Nous sommes toutes différentes, et il est important que le choix du don d’un biberon de lait industriel puisse se faire après avoir réfléchi aux diverses conséquences.
Parfois, par exemple lors de la reprise d’une activité professionnelle, les parents décident que l’enfant recevra dans la journée des biberons de lait industriel et sera nourri au sein quand sa mère est avec lui. Sur une journée habituelle de travail, il peut être ainsi amené à boire trois biberons. Certaines mamans, qui adoptent ce rythme en semaine, arrivent néanmoins à maintenir une lactation suffisante en allaitant exclusivement ou presque les soirs, les matins et le week-end.
D’autres parents encore peuvent décider d’un sevrage total du lait maternel. Le rythme du sevrage peut être très variable : très lent, avec par exemple la suppression d’une tétée par semaine ou par mois, accompagnée d’une augmentation très progressive des biberons, ou plus rapide. La plupart du temps, il faut compter deux à trois semaines pour passer de 7-8 tétées par 24 h à 5-6 biberons par 24 h. Tétées et biberons alterneront pour le confort des seins de la maman et pour le bien-être commun de la mère et de son enfant : il ne passe pas que du lait lors des tétées !
Quand commencer à réduire les tétées ?
L’âge d’introduction du biberon va dépendre du projet parental concernant l’allaitement. Plus le biberon avec une préparation pour nourrissons sera introduit tôt, plus la lactation diminuera. Elle diminuera d’autant plus vite que le nombre quotidien de biberons augmentera rapidement. Dans la perspective d’un sevrage total pour la reprise du travail, s’y prendre 2 à 3 semaines avant le jour J semble raisonnable, en sachant que s’il reste encore une ou deux tétées matin et soir, elles pourront s’arrêter dans les jours qui suivent la fin du congé maternité ou parfois se prolonger quelque temps selon le plaisir de chacun… Si les parents ont le projet de poursuivre néanmoins longtemps l’allaitement, mieux vaut attendre que l’enfant ait 4 mois pour qu’il commence à boire un biberon de lait industriel. La lactation est ainsi bien installée.
Comment proposer les premiers biberons au bébé ?
Téter un sein et boire au biberon sont deux choses complètement différentes. D’un côté, le bébé est actif et règle sa succion en fonction du débit de lait et de sa faim, il boit du lait et il « boit maman ». Au biberon, et tout particulièrement s’il est en position semi-couchée, il peut se retrouver dans une situation où il ne maitrise plus rien, avec du lait à déglutir sans trop comprendre ce qui lui arrive. La technique de succion est vraiment différente, et pour certains enfants, cela va prendre du temps avant qu’ils soient à l’aise avec le biberon.
Plusieurs précautions facilitent les premiers biberons :
• Expliquer préalablement à l’enfant ce qui va se passer, pourquoi et comment, en « vérité », en langage « je ». Par exemple : « Tu vois, aujourd'hui, j'ai pris la décision d’introduire un biberon, d’aller vers le sevrage... On a fait un joli chemin d'allaitement, toi et moi. Peut-être que ce sera difficile pour toi, et même si c'est ma décision, cela peut être difficile aussi pour moi. Mais je suis en accord avec ce choix. Ton papa (ou co-parent ou autre) me soutient. Je (ou nous) serai (ou serons) là pour t'accompagner dans ce moment délicat. Tu verras, tous les deux (tous les trois), on y arrivera, parce que mon (notre) amour pour toi est bien toujours là, et toujours aussi fort. Alors je trouverai (nous trouverons) d'autres ressources pour te materner et répondre à tes besoins, mon bébé. »
• Lui faire découvrir la tétine et le biberon à un moment où il n’a pas faim et où il est ainsi disponible pour de nouvelles découvertes.
• Le tenir assis – et non semi-couché comme on le voit souvent dans les médias –, puis, comme avec le mamelon, lui chatouiller doucement la lèvre supérieure avec la tétine du biberon, sans chercher à pénétrer dans sa bouche en force. Lui laisser le temps d’apprivoiser, de chercher la tétine, de jouer avec et puis finalement de téter. Le biberon sera horizontal, à peine incliné, juste pour qu’il y ait du lait dans la tétine (voir plus bas l'article "Le biberon à l'horizontale"). De cette façon, cela ne coule que si le bébé tète !
• Certains enfants préféreront ne pas regarder l’adulte, en étant tenus dos contre la poitrine du porteur et distraits par une balade dans les pièces de la maison.
• D’autres enfants ont pris leurs premiers biberons installés dans un transat. Cette pratique ne peut durer, car l’enfant a besoin du contact chaleureux d’un adulte quand il mange. Où peut-il être mieux en relation avec son parent que dans ses bras ?
• Ne pas forcer, le laisser boire s’il veut. Tout comme on apprend à lire des lettres, puis des mots, puis des phrases, bébé boira des millilitres, puis des centilitres.
• Qui doit donner ces premiers biberons ? Bien souvent, la maman n’est pas la mieux placée : pour l’odorat aiguisé de son bébé, elle sent le lait maternel à 3 km à la ronde ! Cela peut être une personne proche et présente, mamie par exemple, puis l’assistante maternelle lors de la seconde ou troisième période d’adaptation. Cette approche progressive, au rythme de l’enfant, convient souvent mieux aux enfants. Ils ont des radars et sentent très bien quand maman est dans la pièce d’à côté, alors mieux vaut être en situation vraie.
Quel lait industriel choisir ?
Les premiers biberons peuvent être remplis de lait maternel exprimé à la main ou au tire-lait pour faciliter la transition. Ensuite, il existe de nombreux substituts du lait maternel destinés aux enfants. Au-delà de la publicité et du marketing prônant les avantages de telle ou telle marque, dans la réalité, les laits industriels répondent à un cahier des charges très précis et sont très voisins les uns des autres. Le pédiatre, le médecin ou la puéricultrice de PMI qui suit l’enfant, pourront vous guider.
Quelques principes de base
• Les préparations pour nourrissons s’achètent aussi bien en grande surface qu’en pharmacie : ne pas hésiter à comparer les prix !
• Les préparations pour nourrissons se déclinent en lait 1 « jusqu’à 6 mois », puis en lait 2 ou de suite « jusqu’à 10–12 mois », et enfin en lait 3 ou de croissance « jusqu’à 3 ans ». Cependant, là encore, les différences entre ces trois laits sont, dans la réalité, faibles.
• Les allégations, c'est-à-dire des affirmations comme « confort », « proche du lait maternel », sont interdites par la loi. Le terme parfois vanté « relais de l’allaitement » est surtout une accroche publicitaire. Voir Préparations pour nourrissons "en relais de l’allaitement" ? Aucun intérêt selon la Société française de pédiatrie.
• Les préparations pour nourrissons sont des substituts au lait maternel. Bien que les industriels s’efforcent d’améliorer la composition de leurs produits pour qu’ils se rapprochent de la qualité nutritionnelle du lait maternel, de nombreuses propriétés restent totalement absentes. Par exemple, les laits industriels n’offrent aucune propriété immunologique pour protéger l’enfant. Et il ne suffit pas d’ajouter tel ou tel composant découvert dans le lait maternel pour penser qu’il aura le même effet une fois incorporé dans le lait industriel. 60 millions de consommateurs de mars 2014 écrit : « Les fabricants ont le droit d’ajouter certains ingrédients comme les acides gras polyinsaturés à longue chaîne, la taurine, la carnitine, les nucléotides, les prébiotiques et probiotiques. Aucune étude clinique n’a cependant validé l’intérêt de l’ajout pour la santé des nourrissons. » Le taux d’aluminium des laits industriels est 10 à 40 fois plus élevé que celui du lait humain par exemple. C’est le même constat pour d’autres « éléments traces ». UFC–Que choisir Aix-en-Provence a, en 2012, répertorié 69 additifs alimentaires présents dans les préparations pour nourrissons et enfants en bas âge. Voici leur conclusion : « Un tiers environ est a priori sans danger. Mais trente-deux sont suspects et donc à éviter. Enfin, neuf sont à proscrire absolument, car des études ont montré leur dangerosité, même si les résultats divergent parfois. » Il peut être judicieux de choisir une préparation pour nourrissons bio. Et de garder en tête qu’à ce jour, « la complexité biologique du lait humain défie les prouesses technologiques de l’industrie » (Infact Canada).
Ces préparations sont à base soit de :
- lait de vache,
- lait de chèvre,
- protéines de riz,
- protéines de soja,
à quoi on ajoute : des graisses végétales (huile de palme, coprah, colza, soja, tournesol, etc.), des sels minéraux et des vitamines synthétiques. Pour les graisses, certains industriels arrivent à apporter les lipides indispensables sans utiliser l’huile de palme. Des questions se posent sur les conséquences à long terme de l’absence de graisses saturées d’origine laitière dans la majorité des préparations pour nourrissons, quand on sait par exemple que le produit de référence, c'est-à-dire le lait maternel, est très riche en cholestérol.
Les substituts du lait maternel à base de riz (à différencier des boissons au riz pour les adultes) sont destinés à certaines situations spécifiques, par exemple pour les enfants de parents végétariens, et lorsque l’enfant se révèle allergique aux protéines du lait de vache au moment du sevrage. Le recul sur l’utilisation de ces substituts à base de riz est court.
Les substituts du lait maternel à base de soja (à différencier des produits à base de soja destinés aux adultes) sont peu proposés en France à cause des phyto-œstrogènes (hormones féminines) qu’ils contiennent.
L’ANSES déconseille fermement l’usage exclusif des préparations à base du lait d’autres animaux non bovins (brebis, jument, ânesse) et des produits à base de jus de châtaigne, avoine, amande, coco (et autres jus végétaux souvent appelés à tort "laits"), et se montre tout aussi défavorable à une utilisation même partielle pour des enfants de moins d’un an. Voir aussi Pourquoi il ne faut jamais donner de "laits végétaux" à un nourrisson.
• Il existe en pharmacie des laits pour enfants qui régurgitent, pour enfants constipés, pour enfants à risque d’allergie au lait de vache ou avec une allergie prouvée.
• Certains enfants digèrent mal un lait, et il faut parfois changer dans la même gamme ou dans une autre. Faites-vous aider par un professionnel de santé.
• Il peut être judicieux, lors du premier biberon de lait industriel, de ne présenter que 30 ml à l’enfant pour observer ses réactions. Si ce premier biberon est bien toléré, l'enfant peut continuer à boire ce nouveau lait. Une allergie au lait de vache peut se révéler au début du sevrage, d’autant plus si l’enfant a reçu un ou des biberons de complément durant le séjour en maternité, ou s’il est né dans une famille avec des antécédents d’allergie. L’allergie peut se révéler très vite après l’ingestion du biberon par une urticaire, des vomissements, ou dans les heures qui suivent par un eczéma, une débâcle diarrhéique, du sang dans les selles, des régurgitations qui n’existaient pas auparavant, etc. Il faut alors consulter avant de poursuivre le sevrage.
• Dans tous les cas, la reconstitution est toujours la même : 30 ml d’eau pour une mesure rase de poudre de lait.
• Certains bébés apprennent à boire leur biberon à température ambiante, et c’est pratique lors des sorties. Est-ce pour autant le plus physiologique, le lait de référence étant livré à la température du corps ? Le premier travail de l’estomac sera de porter ce lait à la température interne de l’organisme, alors autant le faire avant de le proposer à l’enfant. L’utilisation du micro-ondes pour réchauffer les biberons est déconseillée par l’AFSSA à cause des risques de brûlure. Si le lait est réchauffé, il doit être consommé dans la demi-heure ; si le lait est à température ambiante, il doit être bu dans l’heure.
• Une fois ouverte, la boite de lait peut être utilisée trois à quatre semaines. Ensuite, les graisses rancissent à l’air. Il existe des boites de 400 g, que l’on trouve principalement en pharmacie et qui sont pratiques tant que le bébé ne reçoit qu’un ou deux biberons par jour. Le plus souvent, les boites pèsent 800 ou 900 g. Lors de l’achat, pensez à comparer le prix au kilo !
• Transvasez la poudre après ouverture dans un bocal en verre propre, afin de limiter la migration de l’aluminium de la boîte vers le lait.
• La poudre de lait n’est pas stérile, ni l’eau minérale.
• Ces préparations pour nourrissons, qui ne contiennent pas d’anticorps contre les germes, demandent un minimum d’hygiène : lavage des mains avant préparation, utilisation d’un plan de cuisine propre, bien refermer la boite.
• Il existe dans le commerce français plus de 200 préparations pour nourrissons. Laquelle est la meilleure ? Aucun organisme indépendant ne les a comparées. Laquelle contient le meilleur pourcentage de telle vitamine, de tel minéral ? Laquelle se révèlera être trop chargée en tel ou tel composant ? Il peut être judicieux de suivre la suggestion d’une consultante en lactation IBCLC australienne qui propose de varier régulièrement les marques de laits pour bénéficier des petits plus de plusieurs laits différents.
Quelle eau choisir pour les biberons ?
• Dans ses recommandations de 2006, l’AFSSA propose d’utiliser de l’eau du robinet s’il n’y a pas d’adoucisseur, ni de filtre, à condition que la robinetterie soit nettoyée très régulièrement, et de prendre de l’eau froide. Laissez couler l’eau 1 à 2 minutes si vous n’avez pas utilisé votre robinet récemment. Dans le cas contraire, 3 secondes suffisent.
• Néanmoins, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), à la date du 6 juin 2014, « recommande de diminuer les concentrations en ions perchlorate dans les laits infantiles et, dans les cas où l'eau du robinet présenterait une concentration en ions perchlorate supérieure à 4 microgrammes par litre (µg/l), recommande aux autorités d'informer la population, en conseillant de limiter sa consommation par les enfants âgés de moins de 6 mois ». Cette recommandation est particulièrement valable dans les zones de combat de la Première Guerre mondiale.
• Les eaux minérales destinées à la préparation des biberons doivent comporter la mention « convient aux bébés » ou « convient pour la préparation des biberons » ou le logo d’un bébé. Choisir l’eau la moins minéralisée semble judicieux pour ne pas surcharger l’organisme de l’enfant. Utiliser l’eau d’une bouteille ouverte depuis moins de 24 heures.
• Pour les bébés qui n’ont pas de problèmes digestifs, il peut être judicieux de changer de marque d’eau minérale, ne serait-ce que pour varier un tout petit peu le goût du biberon.
• L’eau Hépar, parfois recommandée en cas de constipation, n’est pas une eau destinée aux bébés. Son utilisation doit se faire sur avis médical et ponctuellement. Elle ne doit pas servir à reconstituer tous les biberons d’une journée.
• Pour un enfant de moins d’un mois et afin d’éviter les risques microbiens, l’OMS demande de préparer les biberons avec une eau portée à 70° pour détruire les germes pathogènes potentiels.
Voir les directives de l'OMS pour la Préparation, conservation et manipulation dans de bonnes conditions des préparations en poudre pour nourrissons (page 17).
Quelle quantité de lait est nécessaire au bébé ?
Un bébé à partir de l’âge d’un mois boit environ 700–800 ml de lait par 24 h. Cette quantité divisée par le nombre de repas donne une idée du volume du biberon, et ensuite, le bébé guidera ses parents.
On peut dire que vers 1 mois, un enfant boit 7 biberons de 90 à 120 ml 7-6 fois par jour ; vers 2 mois, il boit entre 120 et 150 ml 6-5 fois par jour ; vers 3 mois, il boit entre 150 et 180 ml 5-4 fois par jour, puis 180 ml par repas.
Lors des premiers biberons, l’enfant boira souvent des petites quantités plus souvent. Les parents, l’auxiliaire de puériculture de la crèche ou l’assistante maternelle iront à son rythme.
Avec quoi donner ce lait industriel ?
On pense souvent biberon quand il faut nourrir l’enfant autrement qu’au sein, mais d’autres moyens existent :
- le biberon cuillère ou soft-cup de Medela
- le gobelet avec ou sans bec verseur
- la sonde de nutrition gastrique au doigt
- la pipette style pipette à médicament
- la cuillère pour du lait épaissi avec de la poudre d’agar-agar par exemple, si l’enfant n’accepte que ce moyen pour s’alimenter en l’absence de sa mère.
Si le choix se porte sur le biberon, le verre, matière neutre, sans risque, semble préférable à tout plastique. Vous pouvez ajouter une protection en silicone pour éviter le bris en cas de chute. Les tétines sont soit en silicone, transparent et inodore, soit en caoutchouc ou latex, plus souple. Il existe depuis peu des tétines en caoutchouc ou en latex 100 % naturel. Elles sont produites : sans adjuvants toxiques ; sans la protéine responsable des allergies au caoutchouc/latex. À noter : si vous souhaitez enlever le goût désagréable du caoutchouc, faites bouillir la tétine dans du lait pendant 3 minutes, puis rincez-la. Vous devrez en revanche la changer plus rapidement. Quant à la forme, il faut parfois en essayer plusieurs avant de trouver celle qui convient au bébé. Elles veulent toutes copier le sein, mais n’ont de physiologique que le nom !
Comment donner le biberon au bébé ?
Le concept BAABA de LLL France exprime bien ce dont a besoin le bébé. Il signifie « Bébé Assis Actif pour un Biberon Apaisé ».
Le tenir assis et non semi-couché, comme avec le mamelon, lui chatouiller la lèvre supérieure avec la tétine du biberon, sans chercher à pénétrer dans sa bouche en force. Le laisser apprivoiser, chercher la tétine, jouer avec et peut-être téter… Le biberon sera horizontal, à peine incliné, juste pour qu’il y ait du lait dans la tétine de façon à ce que cela ne coule que si le bébé tète. Avec cette approche, il boira selon son appétit, sans être suralimenté, car l’adulte ne cherchera pas à ce qu’il finisse son biberon. Et il repassera plus facilement au sein pour les tétées. Un maître mot guide les adultes : le respect de l’enfant.
Voir aussi plus bas "Le biberon à l'horizontale".
Comment vont réagir les seins ?
Moins les seins sont stimulés par des tétées ou des séances de tire-lait, moins on leur demande de fabriquer du lait, moins ils produisent… La baisse de la lactation se fait ainsi sans médicaments inutiles, inefficaces voire dangereux dans cette indication. Elle va se tarir progressivement, et le maître mot est de rester confortable. C’est cette sensation qui guidera la maman pour savoir si elle peut diminuer le nombre de tétées. À la fin, il reste les tétées du matin et du soir, puis une tétée par jour, puis un jour sur deux. Si besoin, un peu d’expression manuelle aidera dans cette période critique. Les seins doivent rester souples, sans zone dure, chaude, rouge, douloureuse, qui pourrait signer une mastite ou un début d’abcès, conséquence d’un sevrage trop rapide.
Quelles conséquences pratiques pour l’enfant du sevrage du sein ?
Tout change pour l’enfant : il prenait le sein, on lui donne un biberon. Il ne contrôle pas grand-chose, car c’est l’adulte qui incline le biberon, stimule ou non l’écoulement du lait ; la composition du lait artificiel a changé du tout au tout et sollicite son organisme pour le digérer. Les régurgitations ont une autre odeur, la digestion dure plus longtemps. Ses selles changent d’aspect, ont une odeur plus prononcée, sont plus moulées et parfois difficiles à émettre, certains enfants deviennent même constipés.
Pour les bébés en allaitement exclusif, on recommande aujourd'hui (2016) de donner la vitamine K en 3 doses per os de 2 mg, à la naissance, à J4-J7, et à 1 mois. À partir du don régulier d’un biberon de préparation pour nourrissons, cette prescription n’a plus de raison d’être. En effet, la modification des germes de la flore intestinale liée à l’apport d’éléments nouveaux, en particulier des sucres, augmente la synthèse intestinale de vitamine K.
C’était toujours sa maman qui l’allaitait dans un grand câlin, et maintenant, ses repas peuvent être donnés par des personnes plus ou moins inconnues. On peut comprendre que certains enfants se rebellent et refusent le biberon. Reconnaître qu’ils sont bousculés contre leur gré et le leur dire est une marque de respect. Pour certains, il faudra même faire une pause dans ce sevrage lorsque vraiment, ils indiquent qu’eux ne le souhaitent pas, pour y revenir plus tard ou encore sauter l’étape biberon et passer directement à la cuillère.
Quelles répercussions pour la mère ?
L’introduction d’un premier « autre chose » dans l’alimentation de l'enfant signe le début du sevrage. Ce sevrage peut prendre des jours, des semaines, des mois ou des années, mais c’est l’annonce que ce temps privilégié de l’allaitement aura une fin. Si le sevrage est souhaité par la maman, qu’il n’y a pas d’ambivalence dans sa décision éclairée, alors elle est en mesure de vivre cette nouvelle étape très sereinement. Cependant, dans la pratique, les choses sont rarement aussi simples.
Pour certaines, un sevrage imposé par la société, un problème médical, la reprise du travail, un manque d’information... peut entraîner un air de déprime majorée par les modifications hormonales en cours. La chute de la prolactine peut jouer sur le moral, remet le cycle de la fertilité en route, et il faudra envisager un moyen de contraception dès que la maman sort de la MAMA (Méthode de l’Allaitement Maternel et de l’Aménorrhée).
À chacune son projet d’allaitement, à chacune son chemin, à chacune son sevrage du sein, du biberon. En matière de sevrage, on peut aller à pas de souris ou à pas de gazelle, on peut s’arrêter, ou rebrousser chemin. L’allaitement est comme une danse qui finit par s’arrêter, pour repartir dans un autre pas, dans le respect des deux partenaires et sans oublier le papa.
Marie Courdent
septembre 2014
animatrice LLL - formatrice Am-f
consultante en lactation IBCLC
DIU Lactation Humaine Allaitement Maternel
Puéricultrice PMI (59)
Bibliographie
1. Nancy Chuchu, Bhavini Patel, Blaise Sebastian, Christopher Exley, The aluminium content of infant formulas remains too high, BMC Pediatrics 2013 ; 13 : 162.
2. Shelle-Ann M Burrell, Christopher Exley, There is (still) too much aluminium in infant formulas, BMC Pediatrics 2010 ; 10 : 63.
3. Même bébé a droit à des additifs alimentaires... 69 !
4. Ions perchlorate : l'Anses pointe les risques pour les nourrissons exposés à des eaux et des laits contaminés, Actu-environnement, 6 juin 2014.
5. Journal de l'environnement, 20 mars 2013, Pas de "laits végétaux" pour les nourrissons, pour l'ANSES
6. Archives de pédiatrie, volume 20, supplément 2, novembre 2013, p. S29–S48. Allaitement maternel : les bénéfices pour la santé de l’enfant et de sa mère.
7. Les ingrédients du lait maternel et des laits artificiels.
8. High concentrations of essential and toxic elements in infant formula and infant foods – A matter of concern. Ljung K et al., Food Chem 2011 ; 127(3) : 943-51.
9. Trop d’alu dans les laits infantiles, 60 millions de consommateurs, mars 2014, n° 491, p. 24-28
10. Comment bien préparer et transporter le lait infantile en toute sécurité, ministère de la Santé
Le biberon donné quasi à l'horizontale
(pour éviter que le bébé ait peur ou rejette le biberon ou prenne trop du lait)
C'est une technique présentée par deux consultantes en lactation, Barbara Wilson-Clay et Kay Hoover, dans leur Breastfeeding Atlas (éd. LactNews Press, Texas, 2005).
L'idée est d'offrir le biberon au bébé plutôt comme on fait avec le gobelet : le biberon est tenu quasi à l'horizontale, au lieu d'être tenu à la verticale comme on le voit habituellement. Le lait est toujours à l’horizontale dans le biberon.
« N’aie pas ‘peur’ qu’il avale de l’air ! » Il ne va pas avaler d’air. Cela arrive plutôt quand l'enfant se sent « gavé » avec un biberon qui n'arrête jamais de couler, et qu’il s'étouffe. Alors, il prend peur.
Laissez le bébé boire tranquillement deux ou trois gorgées, puis ABAISSEZ le biberon pour vider la tétine, afin que le bébé puisse reprendre son souffle, respirer. Ensuite, attendez que le bébé « demande » à téter encore. Donc, encore deux ou trois gorgées, puis abaissez le biberon.
Et ainsi de suite. C'est le bébé qui dirige. Et il n'est jamais gavé ni étouffé. Souvent, il prend MOINS de lait comme cela, parce qu'il s'arrête quand il n'a plus faim ! Et comme pour une tétée au sein, cela peut prendre vingt à trente minutes.
De plus, avec le biberon à l'horizontale, le bébé n'est pas incité à mettre sa langue en arrière pour arrêter un flux du lait trop fort. Il respire tranquillement entre les salves parce que c'est lui qui dirige... quand la nourrice regarde bien ce qu'il fait.
Note : Depuis six ans, j'ai eu beaucoup de retours de parents très satisfaits de donner le biberon à l'horizontale et de laisser le bébé diriger la « tétée ». Tout le monde est ravi par un système aussi facile ! L’introduction du biberon chez les bébés allaités n’est plus synonyme de peur, pleurs, et difficultés !
Léa Cohen
consultante en lactation IBCLC
animatrice LLL France
Voir aussi Utilisation d'un biberon en cas de problème d'allaitement.
Merci, article instructif.
1er enfant sevrage imposé car tetait peu, 3kg a 1 mois. Moral à 0 à l'époque et encore de la tristesse ce jour.
Bébé 2 de poids "normal" mais quand même poussée à compléter. Il a 7 semaines aujourd'hui, je donne 1 bib / jour.
Heureuse de constater qu'il n'y a pas de sevrage unique. Je vais faire à mon rythme. Bébé 2 n'aime pas trop les tetines de biberon pour le moment. Je vais tester la méthode BAABA.
Je suis triste qu'on cherche dès la maternité à standardiser les bébés.
Bonjour,
Merci pour vos articles toujours aussi éclairants, en revanche le passage du biberon donné par la « mamie » m’a dérangée. Quand j’ai tiré mon lait pour la première fois c’est le papa qui a donné le biberon et lorsque nous passerons au lait en poudre c’est le papa aussi qui donnera le biberon. Si les parents ne confie par le rôle de « nourrice » à tout va le bebe n’a pas de raison de se sentir perdu. Ça me sidère justement ces parents qui délèguent le plus « tu lui fais la couche, tu lui donnes le biberon etc ». Bref, merci pour vos articles qui m’ont toujours aidée lors de mes insomnies et mes grandes angoisses !!
Bonjour,
Merci pour cet article très éclairant. Le site de la Leche League nous a beaucoup aidé, et je suis content de trouver du contenu à la fois scientifique et sensible. Cependant, je rejoins le commentaire de Maëlle sur les papas : je reste un peu sidéré de voir que le monde de la petite enfance et de l'allaitement s'adresse presque exclusivement aux femmes (et pour ma part, dans le monde hospitalier également depuis la première échographie...).
Si la Leche League pouvait inclure les papas et les couples homosexuels, je crois que ces informations gagneraient en qualité, non ?
Super article avec plein de bons conseils cependant je ne suis pas d'accord avec celui-ci :
• Transvasez la poudre après ouverture dans un bocal en verre propre, afin de limiter la migration de l’aluminium de la boîte vers le lait
Au bout de 5 jours la poudre avait tournée !
Article vraiment très intéressant, et la conclusion de Marie Courdent a son article est magnifiquement juste!
Après lecture des commentaires j'ai moi aussi récupéré un cycle menstruel a 2mois malgré un allaitement exclusif! J en ai d'ailleurs été très déçue et étonnée compte tenu de ce que j'avais pu lire sur le site de LLL.. mais bon la nature n'est pas identique pour tous ! Heureusement!
Excusez moi si ça paraît déplacer mais dans votre article (qui, en passant, est très intéressant ⯑) je ne vois pas le papa.....je sais que c'est qu'un détail mais on ne fait pas l'enfant avec la mamie ou la nounou alors pourquoi est-ce que le deuxième parent ne pourrait pas être cette personne qui peut (enfin) profiter de ce passage au biberon pour nourrir son bébé ⯑
Sinon merci pour l' article, je suis plus sereine pour le passage au biberon ⯑
Bonjour,
Juste un commentaire pour aller dans le sens de Céline.
J'allaite également mon fils depuis sa naissance, il a actuellement 2 mois et demi et j'ai déjà eu mon retour de couche, à 2 mois exactement.
Allaitement, même exclusif ne signifie pas forcément retard du retour de couche.
Bonjour,
Il n'est pas dit du tout qu'il faut attendre la fin de l'allaitement pour choisir sa contraception, mais juste qu'en cas de sevrage, on ne peut plus compter sur la MAMA.
Par ailleurs, rares sont les femmes qui allaitent à avoir leur retour de couches comme vous dès le premier mois.
Pour en savoir plus, vous pouvez lire ces pages :
http://www.lllfrance.org/vous-informer/fonds-documentaire/allaiter-aujourd-hui-extraits/1146-60-allaitement-et-fertilite
http://www.lllfrance.org/vous-informer/fonds-documentaire/dossiers-de-l-allaitement/1343
un peu stupide d'attendre la fin de l'allaitement pour choisir sa contraception... moi personnellement j'ai allaité dès le début, et arrêté à 5,5 mois parce qu'elle a eu des dents à 4,5 mois et qu'elle s'amusait à me mordre. mais mon retour de couche je l'ai fait dès le premier mois ! l'allaitement empêche en rien la fécondité, le cycle se remet en place sans nous demander notre avis ! j'ai eu mes règles 4 fois en moins de 2 mois...
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