Ce courrier a été publié dans le n° 85 des Dossiers de l'allaitement (octobre-novembre-décembre 2010).
Mise à jour 2016 : les noms de spécialités ont été remplacés par les DCI (dénominations communes internationales). À noter que la crème de kétoconazole est passée réservée à l'adulte, et que dans tous les cas elle n'était pas utilisable dans la bouche du bébé. Tout comme la crème d'éconazole.
J’ai été vivement intéressée par l’article sur les douleurs de mamelons du numéro 82 des Dossiers de l’allaitement. Mon expérience à ce sujet, en trois ans de consultations d’allaitement et de travail en maternité, m’amène à confirmer le fait que l’on a surestimé la fréquence des cas de candidose et qu’un nombre important de cas relève de l’infection bactérienne. Toutefois, on ne peut nier que les traitements antimycosiques font disparaître les symptômes dans un nombre non négligeable de cas. Ce qui n’est pas le cas de la lanoline. Je garde aussi à l’esprit que les traitements antibiotiques, même locaux, ne sont pas anodins.
En cas de symptômes « évocateurs de candidose » (douleurs persistantes en dehors des tétées, sensations de brûlures, couleur rose vif des mamelons avec une auréole rose sur l’aréole, dépigmentation, mycose vaginale associée ou fréquente chez la mère…), je traite avec du kétoconazole après chaque tétée, sans rinçage avant les tétées. Le traitement est habituellement efficace, en particulier quand il est utilisé très tôt, dès les premiers symptômes en maternité (j’y interviens deux fois par semaine et l’utilisation du kétoconazole y est fréquente, alternativement avec l’éconazole). Une infirmière spécialiste en cicatrisation m’a dit que c’étaient les excipients et non le principe actif qui étaient efficaces. Je ne peux le dire, ni affirmer non plus être vraiment en présence de candidose. Néanmoins, j’ai vu diminuer, avec les traitements précoces, les situations cliniques catastrophiques à 15 jours où il fallait finir par envisager un traitement per os.
Je ne traite désormais le bébé que s’il présente des signes cliniques évocateurs (muguet, érythème fessier). L'amphotéricine B en solution (pendant 15 jours à 3 semaines) marche très bien en badigeon après chaque tétée avec un doigt et une compresse, et ne provoque pas de vomissements comme le gel de miconazole.
Si le traitement ne fonctionne pas au bout de 5 à 8 jours chez la mère, je prescris la pommade "tous usages" de Newman (les recettes de la pommade tous usages adaptées à la France sont à trouver ICI), plus le traitement du bébé à l'amphotéricine B s’il n’est pas encore traité. À l’arrêt du traitement (je ne dépasse pas 10 jours), si celui-ci a été efficace, je relaie à nouveau avec du kétoconazole. J’ajoute le violet de gentiane au cas par cas pour plus d’efficacité, mais je trouve ce traitement un peu lourd psychologiquement pour la maman qui voit son bébé barbouillé de violet (Sur le violet de gentiane, voir : Controverses autour du violet de gentiane : où en est-on en 2020 ?).
Je complète parfois avec un traitement vaginal s’il y a des signes cliniques évocateurs. J’utilise aussi l’ibuprofène pour la douleur.
Si certains signes cliniques évoquent une infection (blessure avec perte de substance, aspect collant, blanchâtre ou jaunâtre, croûtes), je commence par la mupirocine, ou par la pommade « Newman » d’emblée. Entre un tiers et la moitié des cas relèvent de ce traitement. Les médecins de la région ne sont pas d’accord pour que les bébés tètent de la cortisone ou des antibiotiques. Je demande donc à la maman de rincer ses mamelons avec une solution de bicarbonate de sodium à 14 ‰ (en flacon de 500 ml en pharmacie) qui n’irrite pas et apporte un complément de traitement. Si la maman ne peut pas payer la préparation qui n’est pas remboursée (20 euros), j’utilise la méthode décrite par M Courdent, A Vitoux, D Ortaix et ML Hessel, en alternant les pommades (Doss All 2010 ; 82 : 22).
Au début de mon activité, il m’est arrivé de persister avec un traitement antimycosique sur une situation qui ne s’amélorait pas, demandant au médecin de prescrire du fluconazole, avec des résultats mitigés. Désormais, dans ce type de situation, j’essaie la pommade antibiotique avant de passer au fluconazole, tout en tenant compte de l’aspect clinique, qui me semble très important. Les résultats sont encourageants, la prescription de fluconazole rarissime.
M-F Morinaux
Sage-femme, IBCLC,
Formatrice AMF
Bonjour Élodie,
Votre sage-femme a raison de vous dire de vous méfier des pansements humides de lait maternel. Si vous consultez notre site vous verrez qu'on parle de pansements de colostrum mais pas de lait maternel. Ses remarques sont tout à fait justes : en mettant du film plastique alimentaire sur le sein sur une compresse humide, on crée un milieu chaud et humide propice au développement des germes et des champignons. Ce n’est donc absolument pas recommandé pour des crevasses qui trainent depuis 2 semaines et qui peuvent être surinfectées.
Le Lansinoh ne crée pas un milieu humide parce que sa composition permet les échanges avec le milieu ambiant. C’est toute la différence entre humidifier et hydrater. Traiter vos crevasses du mamelon comme vous traiteriez des crevasses des lèvres en les graissant est tout à fait judicieux.
Par contre avoir des crevasses c'est comme si vous aviez un caillou dans votre chaussure et que vous traitiez la blessure, cela ne suffirait pas, il faudrait enlever le caillou. Là il faut à tout prix revoir la position de votre bébé au sein, entre autres essayer cette position qui a rendu tant de service aux mamans, la position instinctive (appelée auparavant BN ou transat) dans laquelle étant semi-assise, soutenue par vos coussins, vous mettez votre bébé à plat ventre sur vous pour qu'il puisse avoir une grande bouchée de sein et avoir une succion bien ample, alors que dans la position madone, verticale, le bébé est comme suspendu à la branche et forcément il peut blesser le mamelon. Donc soigner c'est bien, mais prévenir, c'est encore mieux.
Bon maternage par l’allaitement
Marie Courdent Animatrice LLL France- Lille
Bonjour,
J’ai un bébé de 2 semaines et j’ai des crevasses d’un côté, j’ai essayé les compresses de lait mais la sage femme me dit que dans un milieu humide le risque de développer une mycose est important… du coup je mets une crème qu’elle m’a conseillé mais la crème est absorbée par les compresses et ensuite les compresses collent quand je les enlève et ça fait pire que mieux… du coup je mets le lansinoh pour que cela reste « gras » et que ça ne colle pas mais du coup on est encore dans un environnement humide…
Je suis un peu perdue
Que me conseillez vous?
Vous avez la réponse ici : https://www.lllfrance.org/vous-informer/votre-allaitement/surmonter-les-obstacles/901-candidose-mammaire
– Est-ce que la recommandation de ne pas conserver au congélateur du lait tiré pendant un épisode de candidose des mamelons est fondée sur des preuves scientifiques ?
– FR : Je n'ai trouvé aucune étude sur le sujet (mais je ne sais pas tout ce qu'il est possible de savoir sur le sujet...). Mais dans la mesure où le Candida albicans est un habitant normal de notre peau et de nos muqueuses et qu'il ne devient pathogène que dans certaines conditions, et dans la mesure où les prélèvements n'ont pas beaucoup plus souvent retrouvé de Candida chez les mères souffrant de "candidose" que chez les mères des groupes témoin (voir DA 134), cela semble en fait globalement parfaitement inutile.
Le protocole de l'Academy of Breastfeeding Medicine sur la conservation du lait humain (2017) dit d'ailleurs : "Si une mère souffre d’un problème de mamelons douloureux qui semble lié à une infection bactérienne ou mycosique, rien ne permet de penser que le lait exprimé et stocké à ce moment doit être jeté."
Bonjour,
Je souhaiterais savoir s'il est possible de tirer et stocker le lait en cas de candidose ?
Merci de votre réponse.
Bien cdlt
Sylvie Bouvarel
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