Le vasospasme est un problème de mieux en mieux connu en tant que cause des mamelons douloureux. Savoir le dépister et le traiter adéquatement permettra aux mères de poursuivre l'allaitement et d'éviter des traitements inutiles prescrits pour d'autres causes diagnostiquées à tort.
D'après : Nipple vasospasm : a manifestation of Raynaud's phenomen and a preventable cause of breastfeeding failure. L Lawlor-Smith and C Lawlor-Smith.NMAA International Conference Proceedings 1997 ; 121-23.
Le vasospasme du mamelon a été décrit pour la première fois par M Gunther en 1970 sous la terminologie de « mamelon douloureux psychosomatique ». Ce n'est qu'en 1992 que la possibilité d'une variante de la maladie de Raynaud a été envisagée comme cause de ce phénomène.
La maladie de Raynaud
C'est une ischémie intermittente des extrémités due à un vasospasme. Elle est dite primaire lorsqu'il n'existe pas de cause spécifique, et secondaire quand elle est la conséquence d'une maladie autoimmune ou dégénérative. Le vasospasme est le plus souvent constaté au niveau des doigts ou des orteils, mais on sait qu'il peut se produire absolument partout dans le corps ; on pense même que la maladie de Raynaud peut induire des migraines par vasospasme des vaissaux cérébraux. On estime que plus de 20 % des femmes entre 20 et 50 ans présentent des symptômes de maladie de Raynaud. Il n'est donc pas étonnant que l'on puisse observer un vasospasme au niveau des mamelons.
Le signe le plus caractéristique de la maladie de Raynaud est les changements locaux de couleur cutanée : d'abord une pâleur due à l'ischémie, puis une cyanose en raison du manque d'oxygénation, puis une rougeur provoquée par la vasodilatation réactionnelle. Ce cycle de variations de couleur est vu chez les 2/3 des personnes. Ces changements de couleur s'accompagnent souvent de sensations douloureuses (brûlure, engourdissement, picotements...) ; ce sont ces manifestations douloureuses qui seront les plus décourageantes chez les mères allaitantes. Le vasospasme peut être induit par le froid ou par un stress émotionnel.
Conduite à tenir
Le vasospasme n'est pas la cause la plus fréquente des mamelons douloureux. Il sera donc indispensable d'interroger la mère et d'examiner les seins. Le blanchiment des mamelons n'est pas suffisant à lui seul pour affirmer l'existence d'un vasospasme : on peut aussi l'observer lorsque le bébé prend mal le sein et comprime anormalement le mamelon. Par contre, l'observation de tout le cycle de changements de couleurs et/ou l'existence d'un déclenchement par le froid seront évocateurs. Mais même dans ce cas, la mise au sein et la succion de l'enfant doivent être évaluées : un problème à ce niveau peut aggraver le vasospasme.
L'une des premières choses à faire est d'éviter l'exposition des seins au froid. Il faut noter que dans certains cas, c'est tout le corps qu'il faudra garder au chaud pour éviter l'apparition d'un vasospasme réflexe au niveau des mamelons. Lorsqu'un vasospasme survient, l'application immédiate de chaleur peut faire céder la douleur. Les femmes atteintes doivent aussi éviter le tabac : 2 cigarettes/jour sont suffisantes pour augmenter la résistance vasculaire de 100 % et pour diminuer de 40 % le flux circulatoire cutané. La caféine exacerbe les symptômes chez certaines femmes. La pratique régulière d'un exercice physique modéré s'est avérée bénéfique. Certains auteurs ont fait état de l'efficacité d'un traitement à base de calcium (2 g/jour) et de magnésium (1 g/jour), tandis que d'autres prônent la consommation d'huiles riches en acides gras polyinsaturés à doses élevées. S'il n'existe aucune preuve scientifique de l'efficacité de ces traitements, ils ont l'avantage d'être dénués de toxicité.
Parmi les traitements médicamenteux utilisables pour traiter le vasospasme des mamelons, la nifédipine (Adalate®, Nifédipine®...), un inhibiteur calcique, représente actuellement le meilleur choix. Elle permet d'obtenir une diminution des crises de 50 à 91 % suivant les femmes. L'enfant allaité absorbe environ 5 % de la dose maternelle. Aucun effet iatrogène n'a jamais été rapporté. Les effets secondaires assez fréquents de la nifédipine (céphalées, bouffées de chaleur, odèmes, nausées, tachycardie...) peuvent être évités en débutant par une posologie basse, et en augmentant si nécessaire jusqu'à obtenir un résultat satisfaisant, ou en utilisant une forme à libération lente.
Documentation LLL
• DA n° 66 - Vasospasme du mamelon : un problème qu'on peut traiter
• DA n° 58 - Cas cliniques : Vasospasme du mamelon, syndrome de Raynaud et nifédipine
• DA n° 54 - Cas clinique : Vasospasme du mamelon
• DA n° 33 - Vasospasme du mamelon : l'expérience d'une consultante en lactation
• DA n° 31 - Vasospasme du mamelon : deux cas
• DA n° 15 - Cas cliniques : douleur des mamelons due à un vasospasme
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